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Premier témoignage de Rachid Kassim, l'un des plus influents jihadistes français de Daech

Le jihadiste est soupçonné d'avoir piloté plusieurs actions terroristes en France depuis la zone irako-syrienne tenue par le groupe État islamique.

Il est l'un des jihadistes français les plus influents de la zone irako-syrienne. Rachid Kassim, 29 ans, est notamment soupçonné d'avoir téléguidé les deux jeunes hommes de 19 ans qui ont tué un prêtre dans son église fin juillet à Saint-Étienne du Rouvray, avant d'être abattus par les forces de l'ordre. Surveillé de près par les services de renseignement, il a accepté de parler pour la première fois à un chercheur de l'université George Washington, aux États-Unis.

"La violence ne vient pas de nous. La France et les États-Unis ont commencé à nous attaquer. Quand ils arrêteront, nous arrêterons", explique-t-il à Amarnath Amarasingam, qui interrogé Rachid Kassim pour le site d'analyse du jihad Jihadology.net.

Rachid Kassim, visé par un mandat d'arrêt international dans l'enquête sur l'attentat de l'église de Saint-Étienne du Rouvray, est soupçonné d'avoir piloté plusieurs attaques depuis la zone irako-syrienne, notamment grâce à Telegram. Cette messagerie, où les comptes peuvent être cryptés et difficiles d'accès pour les services de renseignement, est prisée par les jihadistes comme Rachid Kassim, qui y appelait à passer à l'acte dans sa chaîne de messages nommée "Sabre de Lumière" (aujourd'hui fermée). Les terroristes y voient un moyen de s'adresser à leurs partisans, mais aussi à des jeunes fragiles et manipulables.

"Je suis très très fier" de Kermiche et Petitjean

Les enquêteurs soupçonnent Rachid Kassim d'avoir été en lien avec Larossi Abballa, tueur du couple de policiers de Magnanville en juin, Abdel Malik Petitjean et Adel Kermiche, les deux auteurs de l'attaque de Saint-Etienne-du-Rouvray, ainsi qu'avec Inès Madani, membre du commando de femmes qui projetait un attentat à la voiture piégée près de Notre-Dame en septembre.

Depuis cet été, au moins une quinzaine de personnes, souvent jeunes voire mineures, ont été interpellées et mises en examen pour des menaces d'attentats inspirées par les appels au meurtre lancés sur Telegram par Rachid Kassim. Ce 19 novembre, un adolescent de 17 ans, en lien sur les réseaux sociaux avec Rachid Kassim, a été mis en examen par des juges antiterroristes et placé en détention provisoire.

"Je suis très fier d'eux, très très fier, dit Rachid Kassim à propos de Kermiche et Petitjean. Pour moi, ce sont des modèles et des héros. En ce qui concerne mon rôle (dans cette attaque, ndlr), les services secrets le savent. Je n'ai rien à ajouter".

"J'ai pensé à attaquer la France quand j'y étais"

Rachid Kassim raconte également comment il a vécu ses années passées en France, le pays où il est né en 1987, d'un père yéménite et d'une mère algérienne. "J'étais dans une école dirigée par deux homosexuels, dit-il. La France est un pays de décadence. Quand j'étais à l'école, ils essayaient de me faire manger du porc. J'étais si choqué que j'ai retourné la table, et mon père a dû venir et leur parler", raconte le jihadiste.

Les services de renseignement français se seraient peu à peu intéressés à lui au fil de sa radicalisation. "J'ai pensé à attaquer la France quand j'y étais, et ma famille a pris peur à cause de ça. Les policiers me connaissaient. Dès que j'allais courir, il y en avait toujours deux qui me suivaient. Puis ils se cachaient. C'était ridicule."

"J'ai migré vers la Syrie il y a un an, mais aujourd'hui je suis triste", confie le jihadiste à Amarnath Amarasingam. "Beaucoup d'entre nous sont jaloux des frères qui attaquent" directement les zones considérées comme non-musulmanes, explique-t-il. "Nous pensons que même une petite attaque dans ces zones-là est vaut plus qu'une grande attaque en Syrie".

"Nous n'arrêterons jamais de nous battre"

Arrivé en Syrie en 2015 avec sa femme et sa fille, Rachid Kassim raconte en détail son périple au chercheur... notamment son passage de Turquie en Syrie: "Nous avons tout laissé derrière nous. Surtout mon chat. J'avais un chat merveilleux que j'ai laissé à Gaziantep. C'était l'une des choses les plus tristes que j'aie vécues pendant ma hijrah."

En juillet, six jours après l'attentat de Nice, Rachid Kassim est apparu dans une vidéo du groupe État islamique, dans laquelle il menaçait directement la France. On le voyait décapiter un prisonnier. "Décapiter un animal serait difficile (psychologiquement, ndlr). Avec les ennemis d'Allah, c'est un plaisir", commente-t-il.

Rachid Kassim dit ne pas craindre la fin du groupe État islamique avec les batailles actuellement menées sur Raqa et Mossoul: "Nous trouverons un moyen, mais c'est sûr que nous n'arrêterons jamais de nous battre. Même si nous devons vivre dans des grottes dans les montagnes, le combat continuera. Le jihad a existé avant et pendant l'État islamique, et il sera là après l'État islamique. Nous ne perdrons pas inch'Allah. Si nous perdons une main, nous continuerons de nous battre avec l'autre."

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