Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Ce que nous dirons à nos enfants quand on ne voudra pas avouer s'être rencontrés sur Tinder

Sur Tinder, soit tu appartiens au clan de ceux qui veulent du cul, soit tu fais partie de celles et ceux qui cherchent le grand amour et qui, ayant épuisé les tentatives dans la vraie vie, n'avaient pas d'autres choix que d'aller récupérer les restes sur une appli dénuée de tendresse.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.
Couple in love, hanging out in coffee shop.
mihailomilovanovic via Getty Images
Couple in love, hanging out in coffee shop.

Une partie de notre entourage connaît la vérité (nous nous sommes rencontrés sur Tinder), l'autre croit que tout a commencé au travail (dans un monde où les pharmaciens partent en séminaire avec les contrôleurs SNCF). Faut dire qu'aujourd'hui, si on assume de plus en plus d'être inscrit sur les applis de rencontre, on n'assume pas toujours de bâtir une histoire d'amour dessus. La faute à la "magie" absente des rencontres en ligne. Les relations qui naissent après un match virtuel laissent penser que deux avatars bidon se fréquentent. On imagine qu'ils font l'amour avec trois filtres et que chaque matin, ils se disent "salut sa va?". Ils ne se connaissent pas vraiment. Ils n'étaient que deux âmes désespérées qui un soir de merde ont fait défiler des profils sans grande conviction.

Sur Tinder, soit tu appartiens au clan de ceux qui veulent du cul (et ça fait bien), soit tu fais partie de celles et ceux qui cherchent le grand amour et qui, ayant épuisé les tentatives dans la vraie vie, n'avaient pas d'autres choix que d'aller récupérer les restes sur une appli dénuée de tendresse.

On ne s'est pas rencontré sur Tinder, on est frère et sœur

Si bien que quand des gens que nous connaissons peu nous demandent comment nous nous sommes rencontrés, nous répondons que nous sommes frère et sœur. Ou alors nous laissons un long silence,en espérant qu'ils en déduisent qu'on ne s'est finalement jamais rencontré. La conception du PowerPoint de notre mariage va être un gros bordel.

Mais ce n'est pas ma pire angoisse. Ma pire angoisse est: comment allons-nous dire aux enfants (que nous n'avons pas encore) que nous nous sommes rencontrés sur Tinder? J'ai compris ma crainte quand une copine se rongeait les ongles en se demandant ce qu'elle allait répondre à son fils qui veut savoir comment on fait les bébés. Facile. Expliquer que papa est entré dans ma maman à l'aide d'une gestuelle bien précise, ça passe tout seul. Mais nous, on va leur dire quoi quand ils attendront de leurs parents une rencontre magnifique avec des princes et des princesses, des chevaliers et des donjons? Qu'on était deux pauvres gens en mal d'amour et que sans un service de géolocalisation bien rodé, on ne serait jamais tombé l'un sur l'autre? Que la première fois qu'on a discuté, papa était sur le trône? Qu'avant le premier rendez-vous, j'avais peur qu'il soit en réalité tout petit? Que j'ai failli annuler à cause de ses ^^ frénétiques? C'est mort.

Il y a toujours l'option de ne pas faire d'enfant, mais l'envie nous titille le ventre. Il serait dommage de se priver alors qu'on peut abuser de petits mensonges de rien du tout. Nous avons déjà une liste. Nous sommes des trentenaires bourrés de sagesse et visiblement de futurs parents responsables. Parmi nos scénarios de gros mensonges à faire gober, il y a la rencontre en UberPool, qui reste moderne, mais romantique (on passait vers la Grande Roue), la rencontre dans la rue (on s'est cogné, papa a ramassé les dossiers de maman qui se sont éparpillés au sol), la rencontre en avion (papa avait peur, maman lui apprenait la respiration ventrale). On aime aussi la rencontre dans "L'amour est dans le pré", mais le souci c'est que papa a grandi dans un HLM et que maman est intolérante au lactose.

Les bébés issus du digital n'auront jamais aussi bien porté leur nom

De toute façon, le problème, c'est que dans dix ans, les gamins Tinder, Adopte et même Grindr, seront certainement plus nombreux que les gamins "bar" ou "boulot". On aura l'air bien con quand les petits camarades rigoleront dans la cour de récré: "Non, mais tes parents, ils se sont forcément rencontrés sur Tinder, t'es trop naïf". Même combat que pour le Père Noël. J'aimerais rassembler tous les couples dans notre cas. On pourrait établir un marché. Celui de révéler la vérité tardivement. En attendant, papa et maman se seraient rencontrés dans un conte de fées, même que ta mère était une licorne.

Un marché qui ne marchera qu'à une condition: que la génération suivante ne s'inscrive pas sur Tinder dès six ans pour choper le samedi soir. Après tout, nos enfants seront bien plus connectés que nous. Pour eux, rencontrer l'amour sur Tinder sera aussi normal que d'aller à l'épicerie. Peut-être qu'à leurs yeux, nous serons des héros. Les premiers à avoir compris que sans Tinder, nos chemins ne se seraient jamais croisés. Et qu'il aurait été bien triste de passer à côté d'une aussi belle histoire d'amour.

Les célébrités avec des tatouages d'amitié

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.