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Citoyenneté: le Canada organisera des cérémonies d'assermentation virtuelles

Après un parcours long et éprouvant pour devenir citoyens, des immigrants déplorent que la COVID-19 vienne repousser leur rêve alors qu'ils étaient si près du but.
Le gouvernement du Canada a suspendu toutes les cérémonies de citoyenneté en raison de la COVID-19. (photo d'archives)
jimfeng via Getty Images
Le gouvernement du Canada a suspendu toutes les cérémonies de citoyenneté en raison de la COVID-19. (photo d'archives)

La Montréalaise Alevtyna Markina devait officiellement devenir canadienne le 13 mars dernier. Mais la cérémonie qui devait clore son long parcours vers la citoyenneté, entamé neuf mois plus tôt, a été annulée à peine à quelques heures de préavis en raison de la pandémie de COVID-19. Elle ignore quand elle pourra devenir citoyenne, mais une lueur d’espoir pointe à l’horizon: Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) permettra sous peu aux nouveaux citoyens de prêter serment par vidéoconférence.

Le 14 mars, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a suspendu jusqu’à nouvel ordre toutes les activités liées à la citoyenneté, ce qui inclut notamment les cérémonies d’assermentation des nouveaux citoyens, les tests de citoyenneté et les entrevues.

Le Canada s’apprête toutefois à emboîter le pas à l’Australie, qui permet temporairement à ceux qui le souhaitent de prêter serment par vidéoconférence.

«Reconnaissant que des personnes peuvent avoir des raisons urgentes de terminer le processus de citoyenneté, y compris de prêter le serment de citoyenneté lors d’une cérémonie de citoyenneté, le ministère organisera bientôt des cérémonies de citoyenneté virtuelles pour les personnes et les familles qui avaient déjà communiqué avec IRCC et indiqué qu’elles devaient obtenir la citoyenneté de façon urgente, notamment pour satisfaire à des exigences en matière d’emploi», a confirmé Shannon Ker, porte-parole d’IRCC dans un courriel au HuffPost Québec, mardi soir.

La mesure, d’abord réservée à des cas exceptionnels, sera étendue à d’autres «le plus rapidement possible», assure Mme Ker.

«La cérémonie de citoyenneté est l’aboutissement d’années de travail pour les nouveaux Canadiens et leurs familles», rappelle-t-elle. «Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada prend au sérieux la responsabilité d’administrer le serment de citoyenneté.»

Des rêves sur pause

Des centaines de résidents permanents qui ont déjà complété le test de citoyenneté, comme Mme Markina, doivent attendre avant de pouvoir prêter le serment à la reine, ultime exigence afin d’obtenir le certificat de citoyenneté du Canada.

«Je suis triste parce que ça a été un long processus et que j’ai connu plusieurs problèmes», raconte celle qui est arrivée de l’Ukraine comme étudiante étrangère en 2011. «Je me répétais toujours “au moins, je vais l’avoir bientôt”, mais là je ne sais pas quand je vais l’avoir.»

Alevtyna Markina a hâte d'avoir le même passeport que sa fille, née au Québec.
Courtoisie Alevtyna Markina
Alevtyna Markina a hâte d'avoir le même passeport que sa fille, née au Québec.

Elle espérait pouvoir clore ce chapitre de sa vie avant de célébrer ses 30 ans, en juillet, mais elle sait maintenant que les chances sont minces d’y arriver.

Si les résidents permanents du Canada profitent déjà de la plupart des privilèges conférés aux citoyens, le report des cérémonies et des tests a des conséquences réelles pour certains.

Japjot Gill, arrivé de l’Inde en 2011 à l’âge de 11 ans, ne sait pas comment il pourra entreprendre la formation de pilote dont il rêve depuis l’adolescence sans le soutien financier que lui proposent les Forces armées canadiennes, qu’il ne peut rejoindre comme résident permanent. La pandémie le force à remettre ses plans en question.

«Je ne suis plus certain de vouloir m’enrôler. J’ai déjà 21 ans et je serais beaucoup plus vieux que les autres recrues, surtout si le processus est encore retardé longtemps», explique-t-il. «C’est encore dans mes plans, mais on ne dirait pas que ça va se réaliser bientôt.»

À l’âge de 53 ans, Maneesh Goswami, qui vit à Edmonton en Alberta, rêve quant à lui de s’enrôler comme réserviste au sein des Forces armées canadiennes «pour redonner à ce merveilleux pays». Il lui faut pour cela un passeport canadien, le «meilleur au monde», selon lui. Mais son test de citoyenneté, prévu le 18 mars, a été annulé. Il risque de devoir attendre encore plusieurs mois avant de pouvoir prêter serment.

“J'avais hâte de rejoindre la réserve des Forces armées canadiennes pour redonner à ce merveilleux pays.”

- Maneesh Goswami, résident permanent vivant à Edmonton

Le Montréalais Mortoza Rahman Shuhan, lui, risque de passer à côté d’une promotion s’il n’obtient pas bientôt sa citoyenneté. Le poste qu’il convoite dans le domaine de l’aérospatiale n’est ouvert qu’aux citoyens canadiens puisque son employeur fait affaire avec les États-Unis et est soumis à la Réglementation américaine sur le trafic d’armes au niveau international (ITAR). «Je suis pas mal sûr que le poste va avoir été comblé quand tout ça va être réglé», se désole-t-il, alors qu’il attend toujours de pouvoir passer son test de citoyenneté.

Prêter serment sur Zoom

En avril, le Canada a exceptionnellement autorisé la première cérémonie d’assermentation sur la plateforme Zoom. Le chercheur Adolf Ng, dont les recherches sont liées à la COVID-19, a donc prêté serment par vidéoconférence, sans avoir eu à passer le test de citoyenneté.

Nombreux sont ceux qui souhaitent voir cette possibilité offerte à tous les demandeurs. Une pétition réclamant notamment que les tests, entrevues et cérémonies d’assermentation puissent avoir lieu à distance a recueilli plus de 1700 signatures depuis sa création, le 9 mai dernier.

«Cette incertitude crée une situation très stressante pour les centaines de milliers de demandeurs qui souhaitent obtenir la citoyenneté», écrit l’auteur de la pétition, Hadi Rezvani. «Présentement, c’est un fardeau supplémentaire pour notre santé mentale, en plus de la peur du virus lui-même.»

«La vie n’arrête pas à cause du virus. Devenir citoyen du Canada est un rêve pour moi depuis près de 10 ans», laisse tomber Ji, arrivé du Vietnam en 2010 comme étudiant étranger à l’Université Concordia.

Son test devait avoir lieu le 16 mars et il craint que les délais s’étirent si les activités ne reprennent pas bientôt. «Les dossiers vont s’accumuler et l’arriéré va être énorme», s’inquiète-t-il. «Ceux qui souhaitent prêter serment à distance devraient pouvoir le faire.»

Mais d’autres préféreraient attendre de pouvoir prêter serment en personne. «La cérémonie sera un événement spécial. Mes proches vont célébrer avec moi et prendre des photos. Ce sera un souvenir à chérir pour toujours», confie Carlota Wilkins. Elle espère ne pas être forcée à prêter serment devant son ordinateur.

Japjot Gill devait obtenir la citoyenneté canadienne lors d'une cérémonie prévue à la fin mars, mais celle-ci a été annulée en raison de la pandémie de COVID-19.
Courtoisie Japjot Gill
Japjot Gill devait obtenir la citoyenneté canadienne lors d'une cérémonie prévue à la fin mars, mais celle-ci a été annulée en raison de la pandémie de COVID-19.

Japjot Gill, lui, est partagé. «Je serais très fier d’accepter ma citoyenneté en personne, de souligner le fait que je suis devenu un Canadien lors d’une cérémonie», dit-il. «Mais d’un autre côté, je veux juste que ce soit fait.»

En attendant, Alevtyna Markina rêve quant à elle d’amener sa fille de six ans visiter Disney World «quand tout sera fini». Un rêve qu’elle n’a jamais pu réaliser puisque les États-Unis lui ont refusé un visa de touriste il y a cinq ans, avec son passeport ukrainien.

«J’ai hâte d’avoir un passeport canadien pour ressentir la liberté de ne pas être traitée comme une personne de seconde classe quand je voyage et de savoir que le gouvernement de ton pays te protège.»

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