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Comment les entreprises québécoises peuvent exporter plus sans être plus grandes ou plus innovantes?

Alors que les exportations des entreprises québécoises ont cru de 8,3 % en 2015 une nouvelle stratégie à long terme pour les exportations devrait, à mon sens, être envisagée. Pourquoi, alors que les résultats semblent bons? Parce qu'une grande partie de cette hausse est due essentiellement aux exportations vers les États Unis.
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Alors que les exportations des entreprises québécoises ont cru de 8,3 % en 2015, par rapport à 2014, une nouvelle stratégie à long terme pour les exportations devrait, à mon sens, être envisagée.

Pourquoi, alors que les résultats semblent bons? Parce qu'une grande partie de cette hausse est due essentiellement aux exportations vers les États Unis, exportations qui ont bondi de plus de 12 %. Celles vers l'Union européenne ont stagné, tandis que les exportations vers la Chine étaient, elles, en légère baisse

Ce qui est assez préoccupant, selon moi c'est qu'il n'y a essentiellement que deux ou trois secteurs qui exportent : l'aéronautique, les minerais et l'aluminium.

Cela étant dit, il ne faut pas tomber dans le piège, répété et répété, que pour exporter, les entreprises doivent absolument offrir des produits totalement innovants. On le sait tous, il y aura toujours sur le marché un produit plus innovant que le vôtre!

Et, surtout, n'essayons surtout pas de copier, ce qui a été fait dans un autre pays. Si nous prenons pour exemple la France, ses entreprises (dont les plus grosses) ont tenté de copier le modèle allemand depuis 30 ans. Mais elles n'y sont jamais parvenues. Par contre, les entreprises qui ont été imaginatives et créatives ont généralement toutes réussi. L'ultime point fort de l'Allemagne n'est pas la qualité, mais le positionnement de ses marques, positionnement aujourd'hui quasiment indétrônable. Certaines entreprises japonaises qui depuis longtemps fabriquent des produits irréprochables, dont des automobiles, ont mis plus de trente ans pour approcher partiellement et avec difficultés, le positionnement allemand.

Exporter grâce au management

Posons-nous la question : dans une entreprise qui a déjà une histoire (pas une start-up), les performances seront liées à l'innovation pure et dure ou à l'amélioration substantielle des services et/ou des produits? Le numérique et l'innovation (deux processus très commentés) deviendront-ils des accélérateurs de ventes? Oui. En créeront-ils substantiellement? Certainement pas!

Les entreprises très performantes ne se focalisent pas sur ce qu'il faut faire, mais sur ce qu'il ne faut pas faire.

Si on procède à une analyse qualitative et quantitative sur les entreprises nord-américaines, dont la valeur a été multipliée par 450 au cours des 50 dernières années, en décortiquant leurs stratégies, la technologie, les acquisitions, l'innovation, le turnover du management, etc. on note des différenciations fondamentales avec la plupart des autres entreprises dont la valeur a été multipliée par 50 au cours de la même période. (Source : livre « From good to Great » de Jim Collins) Nous reprenons ci-après quelques recommandations de ce livre.

Les trois seules questions qu'une entreprise non utopique doit se poser sont :

  • En quoi puis-je être le meilleur demain et après-demain?
  • Qu'est-ce qui « tire » déjà mon profit et cash-flow?
  • Qu'est-ce qui aujourd'hui, nous passionne?

Si elle peut répondre à ces trois questions, l'entreprise pourra alors construire un « moteur économique basé sur ses fondamentaux »; un moteur fabuleux, assez indépendant du secteur et des cycles économiques.

Il faut savoir, tout d'abord, que les entreprises très performantes ne se focalisent pas sur ce qu'il faut faire, mais sur ce qu'il ne faut pas faire; que la technologie très innovante, la plupart du temps, n'a pas grand-chose à voir avec le décollage des entreprises très performantes. Par contre une innovation planifiée, mesurée, sera très utile pour communiquer, et pour assurer l'avenir en mettant régulièrement sur le marché des produits différenciés ayant reçu des améliorations substantielles!

D'autre part, vous retrouverez toujours le concept du « volant » : le processus de transformation ne résultant pas d'une décision unique, d'un grand programme, d'une innovation majeure, mais plutôt d'une impulsion donnée lentement, mais sûrement à un volant (les fondamentaux) tour après tour.

Exporter en positionnant bien sa marque

Comme évoqué précédemment, pour réussir à l'international, les entreprises doivent donc être performantes, c'est évident, mais elles ne doivent surtout pas faire une « fixation » sur l'innovation.

On l'oublie trop souvent, la perfection du banal est toujours source d'innovations venant de ceux qui savent, c'est à dire ceux qui font!

On rappellera encore que le modèle allemand de néo-innovation n'est pas copiable, car les entreprises allemandes bénéficient depuis très longtemps déjà, dans de nombreux domaines, de leur stratégie «branding». Cette «brand culture» cohérente, consistante et valorisante raconte une histoire de produits, quelquefois en décalage avec la réalité, on l'a vu récemment dans l'automobile. Il est aussi clair que si votre VUS de luxe payé très cher est en panne, vous aurez de la peine à l'avouer. Vous direz alors qu'il est en révision, car vous serez victime du «branding».

Par contre, ce que l'on peut copier en Allemagne, c'est «la perfection du banal» et, cela dans tous les domaines de l'entreprise : du nettoyage des toilettes à la cafétéria, en passant par la logistique, l'accueil téléphonique, la relation clients, la logistique, ou encore les RH, la R et D et, bien sûr les produits et services qu'elle produit. On l'oublie trop souvent, la perfection du banal, qui fait partie de l'amélioration continue des performances, est toujours source d'innovations venant de ceux qui savent, c'est à dire ceux qui font!

Exporter en choisissant bien ses cibles

Le Canada a deux atouts considérables, le bilinguisme, et surtout un « soft power » très positif lié au fait qu'il n'a jamais été un pays agresseur ou colonisateur. Le Canada devrait donc, à mon avis, mieux communiquer sur ses forces : le seul pays vraiment multiculturel au monde, sympathique, et bénéficiant de deux cultures «business», celle de l'Amérique du Nord et celle du reste monde!

Quant aux cibles, vous avez dû noter que dans notre monde occidental, on est de plus en plus « courtermistes » et qu'on ne s'intéresse pas vraiment à l'évolution démographique. Donc, pour mieux choisir vos cibles, et bien exporter, intéressons-nous maintenant à l'évolution de la population mondiale. Celle-ci devrait passer de 7,7 à 9,7 milliards dans les 20-30 ans! Mais ce qui est surtout étonnant, c'est que la répartition va totalement changer!

Dans 20 à 30 ans, d'après l'ONU, l'Asie ne représentera plus que 51 % de la population mondiale, au lieu de 61 % aujourd'hui. L'Afrique va faire un bon de 13 à 25 %! Les Amériques vont être quasiment stables de 14 à 13 %, mais l'Europe va elle, passer de 12 à 7 %, un vrai choc sismique!

Avant de prendre une décision hâtive, n'oubliez pas aussi qu'avoir raison trop tôt, c'est avoir tort! La question qui se pose alors est : vers quels pays orienter votre stratégie export ? La réponse dans un prochain billet! Faute de conclusion, je terminerais donc par une petite histoire sur les fondamentaux et sur l'innovation.

Dans son célèbre essai Le hérisson et le renard, Isaiah Berlin divisait le monde entre ces deux animaux selon une parabole grecque : «Si le renard sait beaucoup de choses, le hérisson n'en sait qu'une, mais importante.» Le renard est une créature astucieuse capable d'imaginer une myriade de stratégies complexes pour attaquer furtivement le hérisson. Il tourne autour du terrier jour et nuit, attendant le bon moment pour bondir, il a tout du vainqueur. Oui mais, le hérisson emprunte son itinéraire droit vers le renard. « Ha! Ha! Je t'ai eu! », pense le renard. Le hérisson se met en boule et soupire : « Encore! Il n'apprendra donc jamais? »

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