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Concilier déconfinement et respect des consignes sans se chicaner

Entre ceux qui partent à dix faire le party dans des chalets et ceux qui maintiennent la distanciation sociale - s’autorisant un petit verre à distance - les comportements semblent irréconciliables.

Avec le déconfinement et l’arrivée soudaine de la chaleur, des clans se dessinent et certaines relations amicales, amoureuses et familiales sont bousculées par des divergences de points de vue. Entre ceux qui partent à dix faire le party dans des chalets et ceux qui maintiennent la distanciation sociale - s’autorisant un petit verre à distance - les comportements semblent irréconciliables. Comment composer ensemble et ne pas se faire la guerre?

Entretien avec Dre Christine Grou, Présidente de l’Ordre des Psychologues du Québec.

«Chaque année avec l’arrivée du beau temps, il y a une vraie frénésie au Québec. Cette année, alors qu’on a l’impression d’avoir été puni pendant des semaines dans notre chambre avec le confinement, c’est à la puissance 12. Il y a deux extrêmes qui se dessinent en effet: ceux qui vont appliquer les directives à la lettre, et ceux qui vont les interpréter. On parle là de deux profils aux antipodes, mais il y a du gris aussi et une variété d’autres réactions possibles. Ceux qui ont peur pour leurs proches notamment.»

Cela s’explique comment?

«Il y a ceux qui pensent qu’on en a trop fait pour rien versus ceux qui pensent qu’il faut continuer. Ceux qui sont dans le déni, donc la négation de l’importance du danger, et ceux qui, à l’opposé, sont dans l’hypocondrie et ont peur de mourir de la COVID-19. Pour ces derniers, le moindre frôlement deviendrait une menace. Ceux qui vont vouloir exercer le contrôle et ceux qui se mettent en action. La perception et la capacité d’adaptation sont déterminantes.»

On parle de déconfinement, mais en conservant la distanciation sociale. Ne pas toucher nos proches est un vrai défi?

«C’est en effet la grande crainte, qu’on étire l’élastique un peu trop. C’est la chose la plus primaire. On le sait, la sécurité passe par le toucher dès la naissance. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a une différence entre isolement et confinement. En prenant soin des autres, en leur apportant l’épicerie par exemple, on manifeste également mais différemment notre amitié, notre amour.»

L’amitié a pu être mise à mal?

«L’amitié a pu être repensée parce que la pandémie a permis de voir ce qui est important. Confinés, on a pu juger qui est important pour nous, qui nous manque, qui nous fait du bien, qui nous réconforte. On a pu jauger la réciprocité et la profondeur de l’amitié.»

Prostock-Studio via Getty Images

Comment réconcilier les clans opposés, entre ceux qui partent à dix faire le party dans des chalets et ceux qui maintiennent la distanciation sociale?

«La solution collective, c’est la tolérance, la bienveillance, l’indulgence sans oublier l’auto-indulgence. Tolérer que l’autre n’est pas comme nous. Ne pas oublier qu’on n’est pas tous sensibilisés ou désensibilisés de la même façon. Depuis des semaines, on ne parle que de COVID-19, il est donc prévisible que plus l’été avancera, plus les gens vont s’exposer - et à l’inverse d’autres ne s’exposeront pas du tout, donc ne se désensibiliseront pas. La clé est de surtout ne pas juger.»

Le danger?

«En période de grand stress et face aux multiples incertitudes, les gens sont encore plus tendus et donc moins ouverts aux autres. Là est le danger. Vivre ensemble, cela demande d’être tolérant. Il est important de faire un effort collectif de bienveillance particulièrement en cette période.»

Comment voyez-vous la suite?

«On a assisté au départ à des comportements survivalistes, on partait en guerre contre le virus. Ensuite on a vécu les effets du confinement, puis les craintes économiques, les craintes alimentaires, les inquiétudes au sujet du développement des enfants, et n’oublions pas les pertes humaines et tous ces endeuillés du COVID qui n’ont pas pu accompagner leurs parents. Ne perdons pas de vue que ce confinement, on l’a vécu sans en connaître la durée. La situation appelait une capacité d’adaptation inouïe. On n’en sort pas indemne, et ce trauma on va le ressentir encore longtemps, bien après la pandémie.»

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