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Québec a perdu le contrôle des pesticides (VIDÉO)

Québec a perdu le contrôle des pesticides

L'utilisation de pesticides agricoles atteint des niveaux records au Québec. De nouvelles données compilées par Radio-Canada montrent une présence préoccupante de ces produits toxiques dans l'environnement. Dans le même temps, le gouvernement provincial réduit ses efforts budgétaires pour trouver des solutions de rechange plus écologiques, et ce sont les vendeurs de pesticides qui en profitent.

Un reportage de Thomas Gerbet

Malgré la volonté du gouvernement de réduire de 25 % l'impact des pesticides sur l'environnement et sur la santé des Québécois, c'est tout le contraire qui est en train de se passer. Les ventes n'ont jamais été aussi élevées, alors que les surfaces cultivées, elles, diminuent légèrement. Sur chaque hectare (10 000 mètres carrés) de culture, on épand aujourd'hui plus de 2 kg d'ingrédients actifs.

« Dès que j'ai commencé à faire des arrosages, j'ai voulu porter une combinaison, parce qu'à l'école on nous a tellement parlé des effets néfastes », raconte Heidi Asnong, 33 ans, productrice de grandes cultures de maïs et de soya à Pike River, dans le sud du Québec. « Des fois, même quand j'arrose avec mon tracteur, dans la cabine, je sens vraiment que j'ai un mal de tête ».

Elle aimerait utiliser moins de pesticides pour lutter contre les insectes et les mauvaises herbes, mais elle se sent forcée de le faire.

« L'industrie te pousse toujours à être plus performant, à sortir le plus de rendement, à avoir les champs les plus propres possible. »

— Heidi Asnong, agricultrice

Les quantités de pesticides vendues aux agriculteurs ont augmenté de 27 % entre 2006 et 2012. Certains produits sont même en très forte hausse. C'est le cas de l'herbicide glyphosate, connu pour son appellation commerciale Roundup, de la compagnie Monsanto. L'ingrédient actif a été déclaré, l'an dernier, comme cancérigène probable chez l'humain, par le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé.

Certains nouveaux pesticides sont surutilisés depuis quelques années, comme les néonicotinoïdes. Ces dérivés de la nicotine agissent sur le système nerveux des insectes ravageurs pour les éliminer. Leur utilisation est très controversée, car elle décime aussi les populations d'abeilles. Plusieurs agriculteurs nous ont confié en épandre sans avoir toute l'information disponible sur son bon usage.

Même l'utilisation de l'atrazine est en légère hausse dans l'environnement, après des années de baisse. Cet herbicide est interdit depuis plus de 10 ans dans l'Union européenne, mais pas chez nous. Le gouvernement du Québec classe l'atrazine comme l'ingrédient actif à usage agricole le plus à risque pour l'environnement et pour la santé.

Omniprésence des pesticides dans l'eau des rivières en zone agricole

Pour mesurer la présence de ces produits dans la nature, le ministère de l'Environnement du Québec a prélevé des milliers d'échantillons dans les rivières des régions agricoles. Les résultats d'analyses viennent d'être publiés et nous avons compilé les résultats.

Dans près de 100 % des échantillons, le ministère de l'Environnement a retrouvé de l'atrazine, du glyphosate, des néonicotinoïdes ou encore du S-Métolachlore, qui sont tous en tête de la liste des produits à risque pour l'environnement et la santé, établie par le gouvernement.

Non seulement les chercheurs les ont retrouvés quasiment tout le temps, mais en plus, la présence de plusieurs d'entre eux dépassait les seuils de critère de la qualité de l'eau.

Cette carte présente les concentrations maximales retrouvées dans les différentes rivières :