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Cloîtrés en couple: survivre à l'isolement

Comment sortir de cette période d'isolement encore en couple, voire avec un couple encore plus fort? Voici les conseils de Louise Sigouin, sexologue.
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Notre couple va-t-il survivre à cette période d’isolement alors que nous vivons 24h sur 24 ensemble? Comment ne pas marcher dans les pas de la Chine qui enregistre des records de demandes de divorce à la suite du confinement?

Pour faire face à cette période sans précédent, qui nous propulse toutes et tous dans un schéma que nous n’aurions pu imaginer, nous avons interviewé Louise Sigouin, sexologue, membre de l’Ordre professionnel des sexologues du Québec.

© François Couture

Les besoins de base à combler

La pandémie de COVID-19 a fait exploser tous nos repères. Les soucis d’argent, le confinement, le stress, les tâches ménagères, les enfants à plein temps ont ébranlé notre cadre et nos certitudes.

«Depuis lundi, je consulte en ligne ou au téléphone. Ce qui en ressort, il y a ceux pour qui cette période d’isolement sert, elle leur permet d’enfin prendre le temps, de s’arrêter. Pour les autres, c’est la montée en puissance de l’anxiété liée aux soucis financiers et à l’inconnu qui les submerge. Ceux-là se projettent vers l’avant par la négative. Ceux-là sont inconsolables.»

Face à l’anxiété, l’ennemi numéro 1, et au stress, il est important en premier lieu de sécuriser nos besoins de base qui sont: l’argent, un toit, la nourriture.

«On sécurise notre base. On appelle une institution financière, un proche. À partir de là, on va pouvoir accéder à des dimensions plus affectives. Lorsque l’insécurité est là, le relationnel n’est pas une priorité, stress et libido ne sont pas bons amis. Une fois les besoins essentiels stabilisés, il faut se poser ces questions: “Comment vit-on la situation ensemble? Comment revient-on à l’essentiel?”»

Face à cette période, il est important de se recréer une routine, plus que jamais.

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“«Il faut faire équipe, avoir un sentiment d’appartenance face à l’urgence. Se rappeler qu’heureusement on est ensemble. Se parler, encore et encore! »”

Se réapproprier l’intimité

«Au cours de toutes ces années de consultation, j’ai pu constater que dans les couples où l’un des deux ne travaille pas, celui qui reste à la maison aura tendance à rester en mou, ne pas se doucher avant le retour de l’autre. Ce n’est évidemment pas bon. Il est important d’avoir une routine en tout temps et de ne pas se négliger physiquement. C’est particulièrement vrai en cette période d’isolement afin de conserver une intimité.»

Conserver un cadre, une routine, éviter de se négliger physiquement, ne pas couper la relation, ne pas s’enfermer dans sa bulle sont des notions plus importantes que jamais. Préserver une bonne hygiène, c’est-à-dire: un bon sommeil, du sport ou de la marche, pas trop d’écran aussi, des activités intellectuelles, sont autant de conseils que prodigue notre spécialiste.

Le terreau de l’intimité est la discussion. Le couple repose sur l’échange et donc la parole.

«Ne pas couper la conversation est primordial. Il faut faire équipe, avoir un sentiment d’appartenance face à l’urgence. Se rappeler qu’heureusement on est ensemble. Se parler, encore et encore! »

Les cinq archétypes

L’approche de Louise s’inspire des cinq grandes dualités fondamentales qui sont au cœur de toutes nos relations. Chaque dualité a son défi.

En couple, nous sommes soit un ou l’autre :

  • dépendant ou codépendant
  • fusionnel ou solitaire
  • rationnel ou émotif
  • actif ou rêveur
  • vite ou lent

«Les cinq dualités sont ces caractéristiques qui mettent en relief nos différences. L’idée est donc : “j’apprends à m’identifier et on va faire la moitié du chemin ensemble”. La façon la plus sûre de vivre en couple, c’est que l’un et l’autre acceptent d’être à la fois élèves et profs et suivre ce précepte: connais-toi toi-même.»

*Dépendant-codépendant

Le dépendant est centré sur ses besoins, passionné et très contrarié par ce qui se passe. Le codépendant, lui, est au service des besoins des autres et va s’assurer que tout le monde va bien autour de lui. La conversation entre les deux est essentielle.

*Émotif-rationnel

Les émotifs ont une grosse charge émotive et mettent peu de mots sur ce qu’ils ressentent. Le danger est qu’ils se replient sur eux-mêmes. Le rationnel, lui, a besoin de beaucoup d’informations. Ensemble, ils vont devoir travailler et apprendre à s’exprimer sur ce qu’ils vivent et ressentent. Par exemple en se posant une question aussi simple que: “Comment tu vas?”.

*Actif-rêveur

Pour l’actif, tout doit être fait. Le rêveur cherche tout pour s’écraser. Dans ce cas présent d’isolement, le rêveur peut nous apprendre à prendre le temps.

*Vite-lent

Le vite va gigoter, il va tout faire dans les premières heures de la journée. Le lent ne se sentira pas bousculé pour une fois et pourra donner l’exemple à l’autre.

*Fusionnel-solitaire

C’est cette dualité qui entraîne la plus grande confrontation. Le solitaire aura besoin de retirer dans un coin de la maison de temps en temps pour ne pas se sentir envahi. Le défi pour eux sera de trouver l’équilibre entre besoins personnels, couple, famille.

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Pour éviter les disputes

Prendre le temps! Cette période sans précédent en est l’occasion.

«Les gens se plaignent de manquer de temps, c’est ce qui revient le plus souvent au cours de mes consultations - et c’est bien là l’un des obstacles à l’épanouissement du couple. Cas de force majeure, on a le temps, pas le choix, profitons-en! On a du temps pour l’autre, pour discuter, échanger, faire un bilan, revoir la direction que l’on souhaite prendre ou encore désengorger la garde-robe, notre ordinateur, jouer avec les enfants!»

Prendre le temps, c’est aussi prendre le temps d’écrire ce que l’on ressent, ce qui nous fâche, nous contrarie.

«Un papier, un crayon, on écrit. Rien de mieux que cette bonne vieille méthode.»

L’écriture est à la fois le moyen le plus simple, mais aussi le plus efficace pour décrire ce qui nous rend anxieux, ce qui nous stresse. Autrement dit: écrire pour prendre conscience de nos émotions et ne pas passer nos frustrations sur l’autre.

«Sinon appelez un ami, partagez votre colère, votre rancoeur contre l’autre. Et surtout, dites-vous bien qu’on est tous dans le même bateau. Tout le monde est confiné!»

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Dans la chambre à coucher

La sexualité ne peut pas se développer sans intimité.

Cette intimité se travaille, s’entretient à deux. Des outils proposés ci-dessus permettront de ne pas s’affronter et de retrouver et d’entretenir cette intimité.

«Ceux qui sont sexuellement investis n’ont pas de problème. “Plus on est ensemble, plus on fait l’amour” est leur credo. Pour les moins investis sexuellement, il faut accepter de dire: NON. Faire respecter son rythme, être moins rapide, faire de la place aussi sur comment aborder l’autre. Et ce n’est certainement pas un problème homme-femme.»

Pour la spécialiste, le confinement va développer les rencontres plus intimes au sein du couple. Plus intimes que génitales. Faire le point: tête - coeur - corps est recommandé.

Cette période d’isolement forcé serait-elle l’occasion de découvrir de nouvelles facettes à notre sexualité...

«Ceux qui sont prédisposés à utiliser des objets sexuels vont pousser l’exploration. Les autres, je ne pense pas. Idem pour la porno, il faut aimer cela. On ne va pas s’y mettre parce qu’on est isolé. Mais chose certaine, on aura aussi plus de temps pour se confier sur nos fantasmes.»

Contacts importants

  • Êtes-vous dans une situation de crise? Besoin d’aide? Si vous êtes au Canada, trouvez des références web et des lignes téléphoniques ouvertes 24h par jour dans votre province en cliquant sur ce lien.

  • Pour joindre la ligne de soutien de Suicide Action Montréal, composez le 1-866-277-3553 (1-866-APPELLE)

  • Pour joindre les intervenants professionnels de Tel-jeunes :
    Téléphone : 1 800 263-2266 / Texto : 514 600-1002 / teljeunes.com
  • Pour joindre Jeunesse, J’écoute:
    Appelez le 1-800-668-6868, envoyez TEXTO à 686868 ou utilisez le clavardage.

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