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En Crimée, la situation est préoccupante pour les droits de l'Homme

Depuis l'annexion de la Crimée par la Russie, la communauté internationale a pu constater la situation alarmante des droits de l'Homme dans la péninsule, particulièrement vis-à-vis des Tatars de Crimée.
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Depuis l'annexion de la Crimée par la Fédération de Russie, la communauté internationale a pu constater la situation alarmante des droits de l'Homme dans la péninsule, et tout particulièrement vis-à-vis des Tatars de Crimée.

Fin janvier, la délégation du Conseil de l'Europe sur les droits de l'Homme, dirigée par le diplomate suisse Gérard Stoudmann, a effectué une visite de sept jours dans la péninsule. Le secrétaire général du Conseil de l'Europe, Thorbjørn Jagland, avait auparavant déclaré que «la mission, qui jouira d'une autonomie totale, ne s'intéressera pas aux questions liées au statut territorial de la Crimée. Elle nous permettra d'obtenir des renseignements clairs et globaux sur la situation liée aux droits de l'Homme et de faire en sorte que la population de Crimée ne soit pas oubliée».

Dans le cadre des nombreuses rencontres et réunions de travail qui se sont tenues, la délégation a pu rencontrer Akhtem Tchiïgoz, vice-président de l'Assemblée du peuple tatar de Crimée (Mejlis), qui se trouve en détention à Simféropol. Un rapport basé sur l'information récoltée durant ce voyage sera prochainement présenté au secrétaire général du Conseil de l'Europe.

Le 4 février, le Parlement européen a, de son côté, adopté une résolution par laquelle les députés «condamnent le niveau sans précédent des violations de droits de l'Homme perpétrées contre des résidents de Crimée, en particulier contre les Tatars, un peuple autochtone de Crimée, ainsi que les graves entraves à la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique».

En plus, la résolution rappelle la ferme condamnation par le Parlement européen de l'annexion illégale de la péninsule de Crimée par la Russie.

Rappelons que la péninsule de la Crimée, avec 2,5 millions d'habitants, a été illégalement annexée par la Fédération de Russie en mars 2014. De nombreuses familles ont quitté le territoire désormais russe par peur des violences commises contre les pro-ukrainiens. Ce sont surtout les Tatars de Crimée qui subissent, au quotidien, des persécutions de la part des autorités russes. La situation est doublement tragique pour les Tatars, qui ont déjà vécu des déportations organisées par la Russie.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Tatars de Crimée ont en effet vécu la plus grande tragédie de leur histoire. L'ensemble de la population, environ 200 000 personnes, a été déportée de Crimée sur ordre de Staline, sous prétexte de collaboration avec les nazis au cours de la Seconde Guerre mondiale. Cette déportation, connue sous le nom de «Sürgünlik», pour sa motivation, sa formation et son champ d'application, était une action sans précédent dans l'histoire du régime soviétique car elle a touché un peuple entier. L'opération, à laquelle ont participé 32 000 agents du NKVD (NdT: police politique de l'Union soviétique), a duré 2 jours, du 18 au 20 mai 1944. Les Tatars ont été déplacés essentiellement vers l'Asie centrale: 82,5% vers l'Ouzbékistan, 2% vers le Kazakhstan et le Tadjikistan; la partie restante a été envoyée en Russie, dans la Sibérie et l'Oural. Environ 46% de la population déplacée a succombé à la malnutrition et aux maladies durant les deux années qui ont suivi la déportation. Et c'est seulement à la fin des années 1980 que les survivants ont eu l'autorisation de revenir en Crimée.

Aujourd'hui, suite aux répressions massives de la part du Kremlin, environ 7000 Tatars ont été obligés de fuir leur patrie historique. Ceux qui sont restés doivent faire un choix crucial: soit ils renoncent à leur nationalité ukrainienne en faveur de la nationalité russe, soit ils deviennent des «étrangers» dans leur propre pays. Moustafa Djemilev, l'ancien président du Mejlis du peuple tatar de Crimée et le chef du Mouvement national des Tatars de Crimée, et Refat Chubarov, le président actuel du Mejlis, ont l'interdiction par la Russie d'entrer en Crimée pendant 5 ans.

L'unique chaîne de télévision des Tatars de Crimée, ATR, qui avait appelé ouvertement au boycott du référendum sur le rattachement à la Russie, a cessé d'émettre sur la péninsule en mars 2015. Elle est désormais installée à Kiev. Les nombreux activistes tatares et ukrainiens qui revendiquaient ouvertement leur désaccord avec l'annexion, se retrouvent aujourd'hui en détention.

Le 25 août 2015, un cinéaste ukrainien, Oleg Sentsov, arrêté en Crimée en mai 2014 et accusé d'avoir créé une organisation terroriste visant à obtenir la restitution de la péninsule à l'Ukraine, a été condamné par un tribunal militaire russe, à Rostov-sur-le-Don, à vingt ans de réclusion criminelle. Son co-accusé, Alexandre Kolchenko, considéré comme membre de la même organisation terroriste, a été condamné à 10 ans de prison. Le 6 février, Oleg Sentsov a été transféré dans la prison d'Irkoutsk en Sibérie, tandis qu'Alexandre Kolchenko a été transféré à Tcheliabinsk dans l'Oural.

Dans la résolution évoquée ci-dessus, le Parlement européen se félicite de l'initiative ukrainienne visant à mettre en place un mécanisme de négociation sur le rétablissement de la souveraineté de l'Ukraine, sous le format «Genève+», qui devrait inclure la participation directe de l'Union européenne (UE). Tout récemment, le président ukrainien, Petro Porochenko, a annoncé qu'il envisage une série de mesures pour que la péninsule revienne pleinement à l'Etat ukrainien.

«L'Ukraine doit proposer des négociations sous le format "Genève+"», a souligné le président ukrainien. Rappelons que le «format Genève» fait référence à la première rencontre quadripartite, qui a eu lieu à Genève en avril 2014 entre Ukraine, Russie, États-Unis et UE pour essayer de résoudre la crise ukrainienne. En parlant de format «Genève+», le président ukrainien envisage la participation d'autres États dans les négociations, comme par exemple la Turquie, et des organisations internationales. Selon Porochenko, les priorités dans les discussions sont: libérer les Tatars de Crimée détenus illégalement par le pouvoir russe; assurer le respect des droits des Tatars de Crimée; préparer une feuille de route pour que la péninsule retourne à l'Ukraine, qui, entre autres choses, devrait inclure des mesures internationales, y compris des sanctions et des poursuites judiciaires.

Rappelons que l'État ukrainien ainsi que toute la communauté internationale n'a jamais reconnu l'annexion de la péninsule de la Crimée par la Fédération de Russie.

La question de la Crimée a ressurgi à nouveau à l'automne 2015 dans l'actualité mondiale, à la suite du lancement d'un blocus massif de la Crimée par des militants tatars et des membres de bataillons de volontaires. Cela d'autant plus que, depuis fin novembre, la péninsule connaît des coupures d'électricité, d'abord totales, puis partielles, conséquences de la destruction des quatre lignes qui fournissaient la Crimée en électricité depuis l'Ukraine. L'état d'urgence a donc été décrété en Crimée, les entreprises de la péninsule ont arrêté de fonctionner, tandis que les habitations n'ont reçu de l'électricité que quelques heures par jour. Depuis, la Crimée ne s'alimente que par des générateurs et par le «pont énergétique» qui la relie au système électrique russe. Ce câble à haute tension a été mis en route le 2 décembre, en présence de Vladimir Poutine.

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