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Propos racistes: indignation après le décès de Joyce Echaquan à l'hôpital de Joliette

Une enquête du coroner est en cours.
Joyce Echaquan a diffusé des images de son hospitalisation sur Facebook dans les heures qui ont précédé sa mort.
Capture d'écran/Facebook
Joyce Echaquan a diffusé des images de son hospitalisation sur Facebook dans les heures qui ont précédé sa mort.

Une infirmière ayant tenu des propos dégradants à l’endroit d’une patiente autochtone quelques heures avant sa mort a été congédiée par l’hôpital de Joliette, a annoncé mardi le premier ministre François Legault.

Le traitement raciste reçu par Joyce Echaquan de la part du personnel soignant quelques heures avant sa mort lundi, dans des circonstances nébuleuses, a soulevé un tollé au Québec au cours des dernières heures.

Dans une vidéo diffusée en direct sur Facebook quelques heures avant sa mort, Joyce Echaquan plaide pour qu’on «vienne la chercher» à l’hôpital, où elle se serait rendue quelques jours plus tôt pour des douleurs à l’estomac.

Le premier ministre a lui-même qualifié les propos tenus par le personnel hospitalier de «totalement inacceptables» en conférence de presse mardi.

La vidéo montre la mère de sept enfants attachée à sa civière, affirmant avoir été «droguée». Selon une entrevue accordée par des membres de sa famille à Radio-Canada, la femme de 37 ans avait des «problèmes cardiaques» et pourrait avoir reçu trop de morphine.

On peut ensuite entendre deux membres du personnel hospitalier proférer des insultes à son endroit. «Hey, t’es épaisse en câlisse», entend-on notamment une des femmes dire.

«Ça là, c’est mieux mort ça», laisse également tomber une des employées.

«T’as fait des mauvais choix, ma belle. Qu’est-ce qui penseraient, tes enfants, de te voir comme ça ? Pense à eux autres un peu», ajoute aussi l’une des femmes à l’endroit de Mme Echaquan. «C’est meilleur pour fourrer qu’autre chose, hein? Surtout que c’est nous autres qui paie pour ça.»

Enquête du coroner

Offrant ses condoléances aux enfants, à la famille à la communauté de Mme Echaquan, la ministre responsable des Affaires autochtones Sylvie D’Amours a confirmé mardi qu’une enquête du coroner est en cours «afin de faire la lumière sur ce drame».

«Quel que soient les résultats de cette enquête, les propos entendus sont inacceptables et intolérables», a-t-elle ajouté sur Twitter.

Lundi soir, le ministre fédéral des Services aux Autochtones, Marc Miller, avait réclamé «une enquête approfondie et complète» sur les «événements choquants» entourant la mort de la femme.

Des élus de tous les partis à l’Assemblée nationale ont aussi dénoncé le traitement réservé à Mme Echaquan dans les moments qui ont précédé son décès.

La députée péquiste de Joliette Véronique Hivon a parlé d’«événements extrêmement graves qui enragent et arrachent le [coeur]». Son chef intérimaire Pascal Bérubé a par ailleurs affirmé en point de presse qu’il était «convaincu que ces propos ont été tenus parce qu’elle est autochtone», appelant à des mesures «fortes» contre les employées qui les ont proférées.

La co-porte-parole de Québec solidaire Manon Massé a quant à elle déclaré sur Facebook que «personne ne devrait mourir comme ça», y voyant aussi un racisme qui «peut même tuer».

Racisme systémique

Le décès de Mme Echaquan est survenu quelques heures avant que l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APQNL) ne dévoile son plan d’action sur le racisme. Ce plan avait été annoncé il y a deux semaines, devant la lenteur des travaux du groupe d’action contre le racisme créé par Québec dans la foulée des manifestations antiracistes ce printemps.

«Le racisme et la discrimination envers les Premières Nations sont bel et bien présents au Québec et le décès d’une femme Atikamekw hier à l’hôpital de Joliette illustre cette triste réalité», a déclaré par voie de communiqué le chef de l’APNQL Ghislain Picard, en dévoilant le plan.

Le plan d’action formule 141 recommandations à l’intention des citoyens du Québec, des organisations, des services policiers, des médias, des municipalités et du milieu de l’éducation, notamment.

On suggère par exemple aux particuliers de «participer à des rassemblements, festivals et événements authentiques locaux organisés par les Premières Nations dans les communautés et dans les milieux urbains» ou de lire la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Le plan d’action réclame également la réouverture de toutes les enquêtes non résolues pour meurtre, décès ou disparition d’Autochtones, ainsi qu’une formation aux corps policiers sur les réalités socioculturelles et les enjeux propres aux Autochtones.

Le Conseil de la Nation Atikamekw (CNA) a dénoncé la «condescendance troublante» et les «propos racistes de la part du personnel soignant» envers Mme Echaquan.

«Il est malheureux de constater qu’en 2020 de tels comportements puissent encore se produire. Il est de la responsabilité de tous de les dénoncer, surtout dans le contexte des services de santé et dont la déontologie devrait nous protéger de l’inconfort du racisme», a mentionné Constant Awashish, Grand
Chef de la Nation Atikamekw.

Lundi, jour de la mort de Mme Echaquan, marquait aussi le premier anniversaire du dépôt du rapport Viens, qui a conclu que les Autochtones sont victimes de discrimination systémique dans les services publics québécois.

À la lumière du décès d’une membre de la communauté, le CNA a réclamé que l’application des recommandations de ce rapport soit accélérée.

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