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Deuil périnatal: revenir de l'hôpital les bras vides et le coeur gros

«C’est un grand choc, et en même temps un deuil de quelque chose qui est difficile à cerner.»
La série «Revenir les bras vides», produite par le CHU Sainte-Justine, est présentée sur le site web de Savoir média.
CHU Sainte-Justine
La série «Revenir les bras vides», produite par le CHU Sainte-Justine, est présentée sur le site web de Savoir média.

En un peu plus d’un an, Josianne Dicaire a vécu deux grossesses… et le deuil de trois bébés. D’abord un premier bébé qui s’est révélé non viable à la première échographie de 12 semaines. Puis, quelques mois plus tard, Josianne était enceinte de jumeaux. C’est la vie qui reprend ses droits, a-t-elle pensé. Mais le malheur l’a encore frappée; une des deux poches s’est fissurée prématurément et elle a dû accoucher beaucoup trop tôt pour que les deux jumeaux puissent survivre.

Josianne et son conjoint ont ressenti une grande injustice, évidemment. Une peur de ne jamais être capables d’avoir d’enfants. Mais aussi une douleur difficile à extérioriser, puisque ce type de deuil fait l’objet d’un certain tabou. C’est pour venir en aide à ces parents que le CHU Sainte-Justine a produit sa série intitulée «Revenir les bras vides», disponible sur le site web de Savoir média depuis cette semaine, et en ligne sur le site de Sainte-Justine dès le 13 mai.

La série présente quatre parents ayant vécu cette épreuve, qui racontent leur expérience. Tous expliquent avoir été en état de choc, sur le coup.

«On n’a pas de repère, on ne comprend pas, explique Josianne. C’est un grand choc, et en même temps un deuil de quelque chose qui est difficile à cerner. Tu le vis intensément, mais tu ne sais pas comment le vivre en société, parce que ce n’est pas légitimé. Les gens autour de toi ne savent pas comment en parler. Il y a toujours des gens qui ont l’impression que comme tu n’as pas connu cet enfant, ce n’est pas trop grave, un autre va le remplacer bientôt…»

Les témoignages des parents sont entrecoupés de précisions d’experts du centre hospitalier. Cette série s’adresse à tous ceux qui ont vécu un deuil périnatal, de près ou de loin, pour mieux comprendre ce qui leur arrive. Parce que les ressources sont assez limitées sur le sujet.

«Oui, il y a quelques ressources qui existent. Des blogues, des groupes Facebook, entre autres, précise Josianne Dicaire. Mais ce projet-là donne des avis médicaux et en même temps donne la parole à des humains. Parce que quand on vit ça, on a besoin d’avoir accès à des témoignages, de se sentir moins seul. Et moi, à ce moment-là, je n’ai pas trouvé de ressources qui répondaient à ça.»

Briser l’isolement

L’obstétricienne-gynécologue Catherine Taillefer fait partie des experts interviewés pour la série. Elle accompagne quotidiennement des parents qui ont perdu un bébé en période néo-natale ou qui ont un grand risque de le perdre, au CHU Sainte-Justine. «On voit à quel point c’est un deuil difficile. Et les gens ont l’impression d’être seuls avec ça.»

Cette série, elle l’espère, pourra aider à briser l’isolement vécu par beaucoup de ces parents endeuillés. Et répondra aussi à leurs questions. Parce que bien souvent, lorsqu’ils apprennent la dure nouvelle (soit que leur bébé est mort dans l’utérus de la mère, ou bien qu’il risque de ne pas survivre), ils sont sous le choc. Et ne pensent pas nécessairement à poser les bonnes questions. Ils retournent à la maison avec plein de questions… auxquelles ils vont souvent chercher des réponses sur le vaste web, qui n’est pas toujours le plus fiable - on en convient.

«Quand on est enceinte, on ne s’attend tellement pas à cette éventualité-là, on n’est pas nécessairement au courant de tout ce vocabulaire et de toutes ces procédures… Cette ressource-là permettra de répondre à des questions comme: c’est quoi, une amniosynthèse, ou pourquoi je dois accoucher de mon bébé même s’il est mort?»

Les professionnels de la santé pourront donc orienter les patients vers le site web du CHU Sainte-Justine, qui pourront visionner les capsules de «Revenir les bras vides» à leur rythme, selon leurs questionnements.

Josianne Dicaire a aujourd'hui deux enfants.
Courtoisie
Josianne Dicaire a aujourd'hui deux enfants.

Pour Josianne Dicaire, il était tout naturel de participer à ce projet, pour aider d’autres parents. Aujourd’hui, elle est maman de deux enfants de cinq et trois ans. Son parcours est assurément teinté des deuils qu’elle a dû traverser pour arriver jusque-là. «Ça se termine bien, mais disons que ça n’efface pas l’histoire», résume-t-elle.

«J’ai besoin de donner, pour permettre à ces histoires d’avoir des retombées positives.»

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