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«Edmond» de Serge Denoncourt: le texte riche d'un chaos ordonné

Au texte riche de cette pièce de théâtre s'ajoute une mise en scène solide, nerveuse, complexe et physique.
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Capture d'écran Vimeo / TNM / Edmond

Lundi soir dernier, à la sortie de la première médiatique d'Edmond, mise en scène par Serge Denoncourt, j'arborais un sourire ravi. J'avais en tête le mot de Gide:

«L'art commence à la résistance, à la résistance vaincue. Aucun chef-d'œuvre humain, qui ne soit laborieusement obtenu.»

Tout ce que j'ai vu et entendu ce soir-là est contenu dans cette pensée. La genèse de la pièce originelle d'Edmond Rostand est l'archétype de cela. Elle sert de trame à l'œuvre d'Alexis Michalik, dont la plume au service d'une écriture généreuse rend hommage à ce monument du théâtre français.

Au texte riche, s'ajoute une mise en scène solide, nerveuse, complexe et physique. Tous les acteurs sont impliqués dans ce qui a des allures de ballet à la faveur du déplacement des éléments de décor. À l'époque une des particularités du Cyrano de Rostand était d'offrir aux spectateurs une grande variété de changements de décor d'une scène à l'autre. Il y a un beau clin d'œil à cette innovation dans le travail créatif de Denoncourt.

On sent bien la «résistance vaincue» dans la remarquable fluidité des enchaînements.

Il fallait composer avec une somme impressionnante de déplacements et d'interactions de toutes sortes. On a parfois l'impression d'un «chaos ordonné», si on me pardonne l'oxymore. Tout est propice au dérapage. Il y a un grand nombre de personnages et une quantité formidable de répliques. La pièce elle-même est longue. La tension est palpable, tout doit se placer, rein ne doit ennuyer. À la fin, le pari est réussi. On est ébahi et enchanté.

Qu'en est-il du jeu des acteurs? Ce qui m'a le plus touché est leur travail en équipe. Cette pièce ne met pas les personnes, mais le jeu lui-même de l'avant. Peut-être est-ce là, l'effet combiné du rôle que l'on incarne et du labeur de chacun à manipuler les décors? Le fait est: on oublie les individus, on salue l'ensemble!

Un seul bémol

Un seul petit bémol à ce tableau de maître. Le texte est brillant et très dense, le débit est rapide et il arrive quelquefois que l'on perde des bouts de phrases, des mots, ici ou là. La voix projetée n'atteint pas toujours sa cible.

«Aucun chef-d'œuvre humain, qui ne soit laborieusement obtenu!» La pièce de Michalik, en exposant la genèse de la création de Cyrano, nous a rappelé qu'il s'agissait de la chronique d'un fiasco programmé.

Mais voilà, le 28 décembre 1897, à la fin de la première, la représentation fut saluée par vingt minutes ininterrompues d'applaudissements! Qui plus est, le ministre des Finances de l'époque Georges Cochery alla épingler sa propre médaille de la Légion d'honneur sur le vêtement de Rostand en déclarant: «Je me permets de prendre un peu d'avance.» Quelques jours plus tard, soit le1 janvier 1898, Edmond reçu la sienne. N'est-ce pas là le beau retournement d'un chef-d'œuvre humain?

La pièce Edmond est présentée au TNM jusqu'à la fin août. Laissez-vous surprendre, ça vaut le détour!

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