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Élection britannique: le Royaume désuni

À quelques jours de l'élection britannique, les conservateurs et les travaillistes sont au coude à coude. Le vote du 7 mai pourrait se solder par la paralysie du Parlement, forçant une fois de plus un jeu d'alliances.
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À quelques jours de l'élection britannique du 7 mai, les conservateurs et les travaillistes sont au coude à coude dans les sondages. Les derniers chiffres du Financial Times leur donnent respectivement 274 et 270 sièges, loin de la cible des 325 nécessaires à la formation d'un gouvernement majoritaire. Le Parti nationaliste écossais (SNP) s'impose en troisième position avec 54 sièges, près de deux fois plus que les libéraux démocrates (Lib Dems) qui ferment la marche avec une projection de 26 sièges. L'élection se solderait le lendemain par la paralysie du parlement, forçant une fois de plus un jeu d'alliances.

Le Royaume désuni

Premier constat : le Royaume est « désuni ». Aucune force politique ne peut aujourd'hui prétendre jouir d'un appui ferme au niveau pan-national. On assiste, non sans rappeler le Canada post-Meech, à des oppositions morcelées, voire des blocs régionaux.

Au-delà des débats idéologiques, il existe un véritable écart de priorités entre les différentes régions du Royaume-Uni: Londres n'a d'yeux que pour la relance économique et la poursuite de la croissance, dont les effets se font de moins en moins sentir dans le nord dominé par un tissu industriel qui pâtit d'une politique économique qui favorisait les services; au sud-est, terreau fertile pour les populistes du UK Independence Party (UKIP), les enjeux gravitent autour de l'immigration et de la sortie de l'Union européenne; enfin, en Écosse, au Pays-de-Galles et en Irlande du Nord, les questions qui dominent sont celles de l'identité nationale et de l'opposition à l'austérité.

The Mousetrap : séparatistes d'un côté, séparatistes de l'autre

Le SNP «kingmaker»? Les Écossais n'apprécient pas que les grands partis politiques n'aient pas livré la marchandise promise en échange d'un «Non» au récent référendum sur l'indépendance du pays.

Aussi s'apprêtent-ils à les balayer de la carte électorale écossaise en votant massivement pour le SNP. Déjà très impopulaires en Écosse depuis Margaret Thatcher, les conservateurs y perdront moins. En revanche, les travaillistes pourraient ainsi être privés d'une majorité au Parlement de Westminster, ce qui les obligerait à former une coalition pour gouverner.

Les conservateurs ont parfaitement intégré cette donne et adoptent, depuis quelques semaines, le rôle du seul parti apte à sauver le Royaume. I fear for our country («J'ai peur pour notre pays»), ira jusqu'à dire le premier ministre David Cameron. Ultimement, nous verrons si cet argument de peur saura faire la différence à l'échelle pan-nationale. À partir de 290 sièges, les conservateurs peuvent prétendre former une alliance avec les libéraux démocrates, comme ils l'ont fait à la suite des élections précédentes. En deçà de ce nombre, un gouvernement travailliste soutenu par le SNP semble être le scénario le plus probable.

Un autre séparatisme se dessine en toile de fond: le risque que le Royaume-Uni quitte l'Union européenne. Majoritaire ou minoritaire, David Cameron a réitéré sa promesse de tenir un référendum sur l'appartenance à l'Union européenne d'ici la fin de 2017. Une majorité d'Anglais semble être passée d'eurosceptiques à carrément «eurohostiles».

En 2013, 67% des Britanniques se disaient hostiles au maintien du royaume dans l'Europe. Hubert Védrine, ancien ministre français des Affaires étrangères, ajoute: «L'événement serait de toute évidence tragique pour la City, mais il ne serait pas indolore pour le reste de l'Europe. Un jugement négatif pourrait en découler ou s'intensifier à travers le monde à propos de la construction européenne».

Dans ces circonstances, si les conservateurs forment le gouvernement, les pro-européens souhaiteront qu'ils doivent s'allier aux libéraux démocrates (qui sont favorables à l'Europe), liant ainsi les mains de David Cameron.

Le splendide isolement

L'enjeu de cette élection prend en ceci une nouvelle dimension: David Cameron affirme vouloir sauver l'intégrité du Royaume-Uni, mais le choix du 7 mai pourrait en définitive le faire tomber dans un engrenage qui, pour reprendre les propos de Denis Macshane, ancien ministre travailliste des Affaires européennes, «bouleverserait politiquement et économiquement la première zone commerciale du monde» et replongerait le Royaume-Uni dans un «splendide isolement» qui ne manquerait pas de l'affaiblir, voire même de le perdre.

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