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Emmanuel Schwartz voyage à travers l'histoire (ENTREVUE)

Emmanuel Schwartz voyage à travers l'histoire (ENTREVUE)
Jean-Francois Gratton

En portant les mots écrits par Molière au 17e siècle, l’interprète de Tarfuffe arborera le look coloré (et ajusté) des années 60, dans une mise en scène campée en pleine Révolution tranquille. En parallèle, Emmanuel Schwartz tournera dans la méga production cinématographique de François Girard, Hochelaga, qui survole l’histoire de Montréal, en plus d’apparaître dans Nelly, un film retraçant la vie de l’écrivaine de Putain.

Au cours des dernières années, Schwartz a flirté avec plusieurs grands classiques en jouant dans Richard III, Caligula et 5 Kings: trois visions peu conventionnelles de la dramaturgie d’un autre temps. Lorsqu’on lui dit qu’il ne semble pas le genre de comédien qui rêve de jouer dans un classique rien que pour jouer dans un classique, il prend tout de même la peine de nuancer.

«Je suis plus ouvert que j’en ai l’air. Les projets qui s’inscrivent davantage dans la tradition m’intéressent aussi. Peu importe le style ou le spectacle, je recherche une forme de profondeur, qui est peut-être associée plus souvent à la marginalité. Ou peut-être que je me suis énormément associé à des projets du genre. Mais ce n’est pas l’emballage qui compte. C’est la vibrance du sujet et la manière de l’aborder.»

Le voilà qu’il interprète Tartuffe, ce faux dévot hypocrite, prêt à bien des subterfuges pour manipuler le noble Orgon et séduire sa femme Elmire. Si les faux-semblants, les quiproquos et la prémisse de l’histoire appartiennent sans contredit à l’univers de Jean-Baptiste Poquelin, les comédiens qui fouleront les planches du TNM seront catapultés en 1969, dans un décor de cubes superposés rappelant Habitant 67.

De manière générale, la Révolution tranquille est directement associée à la fin du règne de l’Église sur la population du Québec, mais Emmanuel Schwartz est d’avis que la transposition théâtrale mettra particulièrement en lumière l’éclatement du noyau familial de l’époque. Et ce, même si on ne peut effacer les références au clergé, dans une pièce où Tartuffe se fait passer pour un homme de religion.

«La recomposition de la famille dans la pièce n’est pas si loin de quelque chose de très contemporain: Orgon a perdu sa première femme, il vit avec ses enfants et il s’est remarié avec une femme plus jeune, pendant que sa mère critique la situation et les comportements de sa nouvelle bru. On expose les rouages de cette famille sur laquelle le père tente désespérément de reprendre le contrôle, alors que Tartuffe lui apparait comme une solution à ses problèmes. »

Même si le personnage titre de la pièce est un être d’imposture, les metteurs en scène Denis Marleau et Stéphanie Jasmin ont convenu qu’il devait être interprété avec le plus de franchise possible.

«Évidemment, on ne peut pas réécrire la pièce: Tartuffe est un fourbe renommé. Mais la plupart du temps, quand il dit quelque chose, il le croit. Pour se jouer des gens comme il le fait, il ne peut pas avoir l’air mécréant ou avoir l’œil trouble, sinon il se ferait pogner. Je dois donc le jouer avec l’œil clair, éveillé, curieux, intelligent et charismatique. »

Un nouveau pas dans sa carrière

Défendant pour la toute première fois un texte de Molière dans un théâtre professionnel, Schwartz pouvait difficilement être mieux entouré, lui qui partage la scène avec Benoit Brière, Carl Béchard, Anne-Marie Cadieux et Monique Miller.

«J’apprends tout à les regarder aller: l’intelligence du texte, la réserve, l’assiduité au travail. J’ai un plaisir sans cesse renouvelé de les voir travailler. Et comme nous sommes aussi entourés de jeunes acteurs, dont certains viennent de sortir de l’école, je me retrouve dans le peloton du milieu. C’est une position que je trouve fort agréable. Je continue d’apprendre de mes pairs et je commence, peut-être, une forme de passation.»

Signe que le comédien avance dans le métier, il apparait cette fois au centre de l’affiche, après avoir tenu des rôles secondaires importants dans Richard III et En attendant Godot au TNM. Une situation qu’il savoure un jour à la fois.

«C’est une confirmation que je dois être au bon endroit. Parce que oui, je suis du genre à douter de ma place dans le métier, je n’ai pas de gêne à le dire. Je ne me questionne pas tant à savoir si j’ai du talent, mais pour déterminer à quoi je consacre mon temps, étant donné que j’ai une pratique artistique très diversifiée. Je me demande souvent si je devrais prendre une année pour écrire, faire un album, mettre en scène ou pondre un roman. Ce sont toutes des choses qui me stimulent! »

Musique, théâtre, cinéma

La preuve, il lancera sous peu un EP de rap anglophone avec Thomas Furrey. Il tournera dans l’adaptation d’une nouvelle de Marcel Dubé en moyen métrage, ainsi que dans le film Dérive, du couple de scénaristes et réalisateurs David Uloth et Chloé Cinq-Mars. Il jouera dans Huit à la Place des Arts et dans Un, Deux et Trois en France.

Dès le 20 janvier 2017, les cinéphiles le verront également dans Nelly, un film de la réalisatrice Anne Émond inspiré de l’œuvre et de la vie de Nelly Arcan. La défunte y sera représentée par quatre «personnages»: Nelly l’écrivaine, Amy l’amoureuse, Cynthia la putain et Marilyn la star. L’acteur apparaîtra seulement quelques minutes, dans la portion de Marylin.

«Je joue un grand auteur québécois, lors d’une soirée mondaine. Marylin veut se présenter à moi, mais elle est complètement saoule. On finit par danser de façon un peu déglinguée, en essayant de la protéger d’une chute, tout en me rapprochant d’elle.»

Au cours des prochains mois, il jouera aussi un coureur des bois de 1650 dans Hochelaga, terre des hommes, la fresque historico-cinématographique de François Girard. «Le film a la force narrative du Violon rouge, mais à la place du violon, c’est Montréal.» Rien de moins.

Tartuffe sera présenté au TNM du 27 septembre au 22 octobre 2016. Cliquez ici pour plus de détails.

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