Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.
Ce que j'aime avec les experts, c'est qu'ils sont experts. Qu'importe leur expertise, ils en ont une, ils sont donc experts, et souvent autoproclamés.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.
Si nous voulons nous sortir de notre petite misère et de notre revenu minimum garanti, nous n'avons plus le choix que de devenir des experts de quelque chose.
Westend61 via Getty Images
Si nous voulons nous sortir de notre petite misère et de notre revenu minimum garanti, nous n'avons plus le choix que de devenir des experts de quelque chose.

Ce que j'aime avec les experts, c'est qu'ils sont experts. Qu'importe leur expertise, ils en ont une, ils sont donc experts, et souvent autoproclamés.

Je ne me dis pas expert, on peut m'attribuer ce qualificatif, mais je ne me l'attribue pas. J'agis, je démontre, je livre la marchandise, j'anticipe, je guide, je préviens et prévois. Je peux être amené à faire bien des choses dans ce merveilleux monde du travail, sauf m'autoproclamer expert. Je peux influencer à l'occasion ou bien servir de référence, point.

Pour moi, en arrivant à Montréal, dans le très chaleureux arrondissement de Côte-des-Neiges, le premier expert qui m'a été donné de voir a été Simon. Simon, l'expert de la coupe aux ciseaux, du moins selon la publicité sur la vitrine de son salon de barbier.

Présentement, c'est la période des impôts, donc les experts pullulent et polluent.

À l'heure actuelle, l'utilisation de cet adjectif est très tendance, puisque si vous écoutez la radio ou bien lisez des articles et des blogues, vous constatez que tout le monde utilise cet adjectif pour tout et n'importe quoi.

Faisons quelque chose ensemble que vous n'avez probablement pas fait depuis bien longtemps, c'est-à-dire, nous référer au Larousse. Selon le dictionnaire, expert est à la fois un nom et un adjectif et la nuance est très importante ici. Lorsque nous utilisons expert comme un nom, il signifie une personne dont la profession consiste à évaluer la valeur de quelque chose ou encore à une personne apte à juger de quelque chose par sa connaissance.

En revanche, lorsque nous utilisons expert comme un adjectif, il signifie plutôt quelqu'un qui connaît très bien quelque chose par la pratique. La nuance faite, nous nous apercevons que la plupart de nos experts autoproclamés sont davantage des adjectifs que des noms.

La différence réside dans le fait que l'adjectif n'est qu'un mot que l'on peut adjoindre au substantif pour exprimer une qualité de l'être, alors que le nom est un mot servant à désigner ou à nommer une catégorie d'êtres et à la distinguer d'autres catégories. En poussant davantage la réflexion, l'expert comme nom, donc comme être distingué, constitue l'élément principal de l'identité de chacun.

Quoique ce ne sont que des mots et des définitions, c'est fou comment la signification et la valeur des mots dans le dictionnaire collent souvent à la réalité du merveilleux monde du travail. C'est tellement bien fait!

Expert de ceci et de cela: nos experts affirment ceci et cela. Sans cynisme, ce que je comprends bien souvent de ceci est le fait que Bob, le no name de son quartier, a eu une idée, un moment donné, et, comparativement à ses voisins, Bob s'est roulé les manches et a fait quelque chose pour affirmer quelque chose, et puisque son affirmation se fait dans un cercle où personne d'autre ne s'est affirmé, et bien Bob est devenu l'expert. C'est correct, ça en prend aussi des experts de cette catégorie.

Après les prophètes et les gourous, voici qu'arrivent les experts et leurs expertises sur un spectre incommensurable. Que voulez-vous, le monde des ressources humaines et les fonctions multiples que nous devons accomplir, font en sorte que nous ne sommes pas réellement des spécialistes, mais des généralistes experts, ou bien des experts plus vraiment généralistes, puisque la pratique nous oriente vers une ou deux spécialités après quelques années. C'est nous ça.

Experts québécois, dans l'immédiat et non avec l'œuvre du temps, quelle solution proposez-vous pour contrer la pénurie de la main-d'œuvre? Développer plus d'experts. Sauver des emplois bien réels et concrets, menacés de disparaître, ou bien laisser miroiter l'idée de créer un jour davantage d'emplois à 50 000$ et 60 000$?

Si nous voulons nous sortir de notre petite misère et de notre revenu minimum garanti, nous n'avons plus le choix que de devenir des experts de quelque chose.

Beaucoup de belles rencontres avec des orienteurs scolaires sont à prévoir.

La réalité du marché du travail en 2019

Faisons un peu de rhétorique si vous le voulez bien, et parlons de la réalité du marché du travail en 2019. Si vous ne la comprenez pas ou bien si vous laissez croire, preuve à l'appui, que vous êtes déconnecté de la réalité du monde du travail, c'est ce que vous êtes soit un politicien, un fonctionnaire ou un milliardaire.

Puisque nous vivions au Québec, il a plus de probabilité que vous vous retrouviez dans une des deux premières catégories. La preuve, quand c'est trop évident, plutôt que de prendre des décisions et agir, eh bien, nous créons des groupes d'experts sur l'emploi chez les jeunes. Avez-vous déjà entendu parler de cette énième structure bancale, inutile et triviale, payée à même nos taxes et impôts?

Pour la petite histoire et pour notre culture générale, dans le budget fédéral de 2016, le fils de l'autre annonçait la création d'un Groupe d'experts sur l'emploi chez les jeunes qui évaluera les obstacles que doivent surmonter les jeunes, y compris les jeunes vulnérables, lorsqu'il s'agit de trouver et de conserver un emploi. Que c'est beau, mais surtout, que c'est superflu.

Vous me dites cynique, ben voyons, je ne fais que regarder sans lunettes roses ce qui nous pend quelques fois au bout du nez. Ce matin, j'ouvre ma fenêtre et je constate les éléments suivants: précarité d'emploi, double emploi, stagnation salariale, syndicalisme suranné, dépréciation des connaissances, ignorances volontaires de certaines générations, et non-reconnaissance des diplômes. Ouvrir ma fenêtre, comme tout le monde, et constater ne m'a rien coûté, et ne m'a surtout pas demandé de créer un groupe d'expert.

J'ai une admiration pour les faux experts qui doivent trouver de vrais experts pour des dossiers ou autres. Ils doivent bien s'apercevoir un jour ou l'autre qu'ils ne sont rien sans les gens qui les entourent pour avaler leur expertise.

Comme Louis Baribeau, avocat du Barreau du Québec, le rapportait en 2005: «Le parti-pris de l'expert pour la partie qui l'a mandaté peut amener le tribunal à écarter complètement son expertise. [...] L'expert doit être impartial et ne doit jamais être inféodé à son client».

Les experts s'étaient prononcés pour le bogue de l'an 2000, et rien ne s'est produit. Les experts s'étaient aussi prononcés sur la légalisation du pot, et le chaos qui allait s'en suivre. L'ignorance nous amène souvent à combler notre vide par une expertise quelconque. Il ne suffit que de trouver notre expert.

Vous en voulez des experts et des expertises? Je vous invite à syntoniser votre radio et à écouter les lignes ouvertes, elles regorgent d'experts. Parfois, je préfère quelqu'un d'animé et de dévoué à la matière qu'un soi-disant expert en la matière.

La section des blogues propose des textes personnels qui reflètent l'opinion de leurs auteurs et pas nécessairement celle du HuffPost Québec.

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.