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Meurtre de George Floyd: les mots puissants de Gregory Charles

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Gregory Charles a pris la parole sur les réseaux sociaux, ce mercredi 3 juin, afin de réagir à son tour à la mort de George Floyd, un Afro-Américain mort sous le genou d’un policier lors de son interpellation à Minneapolis le 25 mai dernier, et au vent de solidarité et de protestation qui souffle actuellement sur le monde entier.

Pour l’artiste multidisciplinaire, bouleversé par les manchettes des derniers jours, les policiers responsables ont failli à leur tâche et ont déshonoré la devise du service de police de leur ville: «To protect with courage, to serve with compassion» (protéger avec courage et servir avec compassion).

«Comme des millions de personnes sur ce continent et dans le monde, j’ai pleuré en voyant les images. J’ai pleuré, j’ai été rempli de colère et d’incompréhension. Je me suis senti dégoûté, impuissant, découragé. Étant le papa d’une petite fille caramel, je suis aussi inquiet. J’ai peur pour ma fille parce qu’elle a vu ces images et qu’elle ne pourra jamais les oublier. Et parce que je ne sais pas où vont mener les événements du moment», a-t-il expliqué.

“Le racisme et la discrimination ne discriminent pas. Aucun continent n’en est exempt. Nous n’en sommes pas exempts. Il y a eu du racisme ici. Il y en a aujourd’hui. La question est de savoir ce qu’on fait aujourd’hui, maintenant.”

- Gregory Charles

Gregory Charles poursuit en expliquant que depuis les tragiques événements de la fin mai, il entend souvent la voix de son défunt père Lennox, «dans sa tête, dans son coeur», lui qui a marché avec Martin Luther King et qui a assisté à son discours historique prononcé à Washington, en 1963.

Il prend son père en exemple en racontant un incident raciste dont ce dernier a été victime au début des années 1970, lorsqu’un propriétaire de Montréal avait refusé de lui louer un logement parce qu’il était noir. Environ quinze ans plus tard, le sort a voulu que le père de Gregory Charles, qui travaillait au département d’orthopédie de l’hôpital général juif de Montréal, ait à s’occuper de l’homme en question à la suite d’une fracture.

«L’ayant reconnu, mon père a choisi de s’occuper de lui. Il s’agissait d’une fracture compliquée et pénible. J’étais adolescent et je travaillais avec mon père dans ce même établissement à l’époque. J’avoue que je ne comprenais pas bien pourquoi mon père voulait aider, mais surtout servir un homme qui avait été si cruel avec lui, avec nous. J’entends sa réponse depuis quelques jours, dans ma tête: “Il souffre et il a besoin de réconfort. I will do for him what must be done and I will do it as well as I can” (″Je ferai pour lui ce qui doit être fait, et je le ferai du mieux que je peux″). Et je l’entends ajouter: ″Because that is how we love and how we win, son” (″Parce que c’est comme ça qu’on aime et qu’on gagne, mon fils″)».

«Je n’oublierai pas les quelques mots qu’il a dits à mon père quand il est parti: “Merci Lennox de m’avoir guéri. Et je ne parle pas de ma jambe”. Et à moi il ajouta: “Ton père est tout un bonhomme. T’as des grosses bottines à chausser”.»

Gregory Charles termine en affirmant que pour son père, le coeur du problème n’est pas seulement le policier directement responsable de la mort de George Floyd, mais les autres officiers à proximité qui auraient pu intervenir, mais qui n’ont rien fait, «pas de compassion et encore moins de courage».

«Ces autres officiers, c’est parfois nous. Noirs ou blancs, jeunes ou moins jeunes, on se campe parfois dans nos certitudes. On se donne des explications, des justifications courtes alors que les problèmes sont complexes et cruels. Il faut qu’on s’insurge, qu’on se soulève, qu’on refuse ce qui est inacceptable, ce qui est imbuvable. Mais on ne peut pas répondre à la cruauté par de la cruauté. On ne peut pas répondre à la violence par de la violence. On ne peut pas répondre à de l’indifférence par de l’indifférence. Il faut répondre à la colère par de l’écoute. Il faut répondre à l’indifférence par de la compassion. Il faut répondre à la haine par d’irrésistibles gestes d’amour. Et il faut encore et toujours rêver d’un monde où nous sommes tous et toutes blancs ou noirs, jeunes ou vieux, hommes ou femmes, croyants ou non, influents ou non, libres parce que capables d’aimer les autres plus qu’on s’aime soi-même. C’est ça que j’entends mon père me dire depuis quelques jours, dans ma tête. Dans mon coeur», conclut-il.

Au moment de publier ces lignes, le message de Gregory Charles avait déjà été partagé par plus de 6000 internautes.

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