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La légitimité du droit de grève des étudiants en débat

La légitimité du droit de grève des étudiants en débat
Radio-Canada.ca

Tandis que des étudiants contre l'austérité et des policiers se sont affrontés lundi à Montréal, le débat sur la légitimité du droit de grève des étudiants reprend au Québec.

Quelque 62 000 étudiants étaient en grève lundi, et 40 000 le demeureront pour une période de deux semaines. Contrairement aux manifestations de 2012 qui portaient sur la hausse des droits de scolarité, les étudiants dénoncent cette année les mesures d'austérité du gouvernement de Philippe Couillard et l'exploitation des hydrocarbures.

« C'est une grève qui n'est qu'étudiante pour le moment, mais c'est réellement une lutte sociale pour préserver l'ensemble et l'accessibilité à nos services publics », a affirmé Camille Godbout, porte-parole de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE), qui espère entraîner une partie de la population dans son sillage.

Le mouvement de grève se heurte toutefois à l'opposition des anciens « carrés verts », maintenant regroupés au sein de la Fondation 1625, et qui veulent éviter que le scénario de 2012 se répète.

« Comme l'ont démontré plus de 50 jugements depuis 2012, les étudiants ne bénéficient pas du droit de grève. Donc, de bloquer des cours, ce sont des actes illégaux », a soutenu Miguaël Bergeron, directeur des affaires juridiques à la Fondation 1625, en entrevue à 24/60 avec Anne-Marie Dussault.

« Nous sommes déjà en communication avec plus de 50 étudiants à travers le Québec qui ont l'intention de déposer des demandes d'injonction pour avoir accès à leur cours », a ajouté M. Bergeron à l'attention de Camille Godbout, aussi invitée à l'émission.

« On considère qu'il est inacceptable que des étudiants qui veulent étudier doivent en appeler aux services de sécurité, aux services de police, aux tribunaux, alors que le ministre [de l'Éducation] et le gouvernement actuel ne font rien et abandonnent encore les étudiants, comme en 2012. »

— Miguaël Bergeron, directeur des affaires juridiques à la Fondation 1625

« Selon nous, il n'y a aucune possibilité de grève dans le milieu étudiant. Au Canada, le droit de grève, c'est quelque chose qui est accordé aux employés qui veulent négocier des conditions de travail. Je suis étudiant moi-même, on travaille très fort, mais on n'est pas des employés », a ajouté M. Bergeron, qui reconnaît le droit de manifester, sans que cela ne brîme l'accès aux salles de classe.

À l'Université Laval, quelques échauffourées verbales se sont d'ailleurs produites entre des étudiants en grève et un autre groupe qui tentait de pénétrer dans une salle de classe.

« Le ministre [de l'Éducation] François Blais est autant responsable que les associations étudiantes du climat d'intimidation et de violence qu'on a retrouvé ce matin, par exemple, à l'Université Laval, parce qu'il refuse d'agir clairement pour protéger le droit d'accès au cours des étudiants », a affirmé M. Bergeron.

Comment exprimer son choix pour la grève?

Comme en 2012, le fait que plusieurs associations étudiantes tiennent des votes de grève à main levée est remis en cause, tout comme le quorum pour que le résultat d'un vote de grève soit reconnu.

Tandis que Miguaël Bergeron de la Fondation 1625 qualifie les votes étudiants de « démocratie chinoise », la porte-parole de l'ASSE, Camille Godbout, soutient que les assemblées générales sont « très encadrées par des différentes règles, différents protocoles » et qu'« avec cet encadrement-là, on voit que les assemblées générales sont des structures démocratiques et aussi qui favorisent la participation du plus grand nombre possible de gens ».

Selon Gérald Larose, professeur de travail social à l'Université du Québec à Montréal et ex-leader syndical, des responsabilités politiques s'imposent pour que les règles des grèves étudiantes soient clarifiées. Alors que les mandats de grève étaient généralement respectés avant 2012, le printemps érable a amené certains étudiants a s'adresser aux tribunaux pour s'opposer à la grève, et ce, « dans une zone juridique qui est plutôt floue ».

M. Larose se dit favorable à la reconnaissance du droit de grève pour les étudiants, avec une légitimité qui repose sur la convocation des membres, un débat et un vote secret.

De l'avis de M. Larose, le gouvernement Couillard « va essayer de reproduire ce que Jean Charest a fait, c'est-à-dire le plus qu'il y a de discorde dans les rangs, le mieux ça va servir ses intérêts.

Appel à manifester le 26 mars

Les étudiants tiendront une grande manifestation le 26 mars, devant l'Assemblée nationale du Québec, à l'occasion du dépôt du budget. Une autre grande manifestation est prévue le 2 avril.

« On a l'espoir que dans les prochaines semaines, il va y avoir plusieurs personnes qui vont se joindre au mouvement, que ce ne sera pas seulement une question étudiante, mais bien un mouvement social qui va s'enclencher », a déclaré la porte-parole de l'ASSE, Camille Godbout, en entrevue à Radio-Canada.

Mme Godbout souligne que plusieurs acteurs des milieux communautaires et syndicaux ont tenu des manifestations contre l'austérité. L'ASSE appelle également les autres associations étudiantes nationales, comme la Fédération des étudiants universitaires du Québec (FEUQ) et la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), à se joindre au mouvement.

« On ressent déjà les effets des compressions budgétaires dans nos universités, dans nos cégeps, un peu partout dans la province. Ça se traduit par des réductions de centaines de charges de cours, que ce soit à l'Université de Montréal ou à l'Université du Québec à Montréal, soutient Camille Gadbout. « Par des réductions de programmes aussi: certains ont été supprimés par les administrations en raison des compressions. Et il y a des réductions dans l'offre de services à la population étudiante : psychologues, infirmières. Les heures d'ouverture des bibliothèques ont été réduites de moitié », ajoute-t-elle.

De leur côté, les centrales syndicales, très actives en 2012, ont décidé de prendre leurs distances par rapport à la présente grève étudiante.

Des votes de reconduction de grève se tiendront le 7 avril.

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