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L'album Neo-Reconquista : du neo-Boogat

L'album Neo-Reconquista : du neo-Boogat

Après la sortie de quelques mixtapes faites avec Ghislain Poirier, Boogat proposait en 2013 un album en langue espagnole intitulé El Dorado Sunset, qui lui a valu un succès inattendu, dont un Félix pour l’Album de l’année - Musique du monde. Deux ans plus tard, le rappeur ajoute de la profondeur à son travail avec un nouveau long jeu, Neo-Reconquista, qui renferme des textes particulièrement engagés et des musiques mieux fignolées. Rencontre.

« On est en train de perdre nos acquis sociaux, lance le chanteur dans un café de la rue Wellington, à Verdun. On gère mal la richesse. » De manière sympathique, la table est mise. « Aujourd’hui, nous accordons énormément d’importance à l’argent, mais ce n’est pas tout le monde qui a sa part, de manière équitable. Mais bon, c’est un peu la nature humaine… Quelque part, nous sommes des enfoirés ! (sourire en coin) On pense toujours à soi d’abord. Et on en veut toujours plus. Mais je crois qu’un meilleur équilibre est possible. »

Voilà en quelque sorte la prémisse de ce Neo-Reconquista. Notre monde moderne ne répondrait visiblement pas aux attentes de tous.

Selon le chanteur, plusieurs doivent se battre, dont les jeunes, afin de s’assurer un avenir relativement sain. En quelque sort, les Québécois, mais à plus grande échelle les Occidentaux, doivent lutter pour espérer conserver (ou retrouver) les conditions souvent chèrement acquises par les générations précédentes. Et rien de serait garanti. D’autant plus que les dynamiques capitalistes, de plus en plus gourmandes, menaceraient nos libertés et, du coup, nos différences.

À cet égard, Boogat parlera longuement de l’érosion culturelle, qu’il traite d’ailleurs dans la chanson Los Tabarnakos : « Au début, je voulais parler des snowbirds québécois. Un pourcentage minime d’entre eux vont vraiment à la rencontre de l’autre [celui qui vit dans le pays visité]. Ça implique le phénomène du tout inclus. J’ai un problème avec la faiblesse des échanges. Et avec la mondialisation, ça commence à devenir une problématique très sérieuse. Au-delà de ça, j’ai réfléchi au rapport dominé/dominant. Il a une [toute particulière] résonance au Québec. Je pense au rapport des francophones avec les anglophones, qui a marqué l’histoire…»

De par sa mixité, ses origines, ses voyages, ses fréquentations hétérogènes, Boogat affirme qu’il observe les dynamiques sociales dans une lunette plus grande que celle locale, trop souvent utilisée.

« On ne peut pas seulement définir notre identité par notre langue et notre territoire. Aujourd’hui, on doit prendre du recul et observer ce qui se passe ailleurs dans le monde (mentionnons le morceau Londres, sur lequel chante Pierre Kwenders). Et les nombreux séjours de Booget en Amérique latine auraient nourri les réflexions.

De l’Amérique à l’universel

« J’ai écrit les paroles entre Montréal et le Mexique (d’où provient sa mère). J’ai passé pas mal de temps chez des amis mexicains. Les deux dernières années, je me suis fait inviter par des festivals. J’ai rencontré des bookers. Grâce à tout ça, j’ai dû faire une trentaine de spectacles dans différentes villes mexicaines. »

Par contre, Boogat souligne qu’il a composé et enregistré les musiques dans la métropole québécoise. Neo-Reconquista est donc une sorte de pont qui relie le monde de ses origines à sa terre natale, le Québec.

« Il y avait une volonté de produire un album aux thèmes assez universels. Quelque chose qui est à la fois pertinent chez nous et au Mexique. Je pense que dans les thèmes sociopolitiques abordés, les Mexicains s’y retrouvent également. Ils vivent aussi des combats identitaires et linguistiques (il mentionne le rapport au géant américain)… »

Au niveau musical, Neo-Reconquista est une véritable construction hybride : électro, hip-hop, cumbia, funk, reggae, salsa, pop rock sont autant de styles musicaux qui habillent les paroles écrites par Boogat.

« J’ai encore fait appel à quelques collaborations (Heavy Soundz et La Yegros) pour l’interprétation, mais il y en a moins. J’ai composé des musiques avec Jean Massicotte (réalisateur de l’album de Boogat, ce dernier a collaboré aussi avec Lhasa, Pierre Lapointe, Patrick Watson, Jean Leloup, Arthur H). J’ai travaillé avec des musiciens très talentueux comme Kiko Osorio, Philippe Brault et Serge Nakauchi Pelletier, qui augmentent certainement la qualité de l’album. »

« Je ne voulais pas refaire le même disque, ajoute-t-il. Depuis la sortie de El Dorado Sunset, j’ai joué avec plusieurs personnes. J’ai appris beaucoup d’affaires. Je me suis rendu compte que je comprenais davantage les mécaniques musicales. Je me suis dépassé pour ce nouveau disque. Je pense que je n’ai pas juste fait des beats.

J’ai écrit des chansons. Je rappe, mais c’est autre chose. C’est très mélangé. C’est plus théâtral, plus complexe et plus texturé. Les atmosphères sont mieux travaillées. »

***

Sous étiquette Maisonnette, l’album Neo-Reconquista dès aujourd’hui, 5 mai.

Pour connaître les dates des éventuels concerts, on peut consulter le site internet de Boogat (boogat.com).

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