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J'ai sondé quelques amis en posant une question assez simple : qu'est-ce qu'une personne laïque se met sur le dos ? Parmi les réponses proposées, on a cité le «». Qu'est-ce qui plus homogène et inoffensif que des jeans et t-shirts? Vous savez qui se promènent aussi en jeans et t-shirts? Tous les membres du Westboro Baptist Church. Vous connaissez le WBC?
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Vous croyez peut-être que le débat sur la Charte des valeurs est fini depuis que le PLQ est revenu au pouvoir le 7 avril dernier. Sauf que le lendemain des élections, on a rapporté des incidents de vandalisme autour de deux différentes mosquées. Ensuite, Michèle Sirois, présidente de l'organisme Pour les droits des femmes du Québec, a affirmé au journal La Presse que la question de la laïcité ne s'arrêtait pas avec le retour du PQ dans l'opposition. Et enfin, le 14 avril, dans un texte publié dans Le Devoir ainsi que sur le Huffington Post Québec, Bernard Drainville a défendu son projet controversé une dernière fois.

Tout ça laisse croire que le raisonnement qui a alimenté la Charte n'a pas pour autant été anéanti. Alors, poursuivons, en utilisant la logique du PQ.

À quoi ressemble la laïcité ? Au lieu de nous poser la question, le projet péquiste de la Charte des valeurs a tenté de nous montrer à quoi la laïcité ne ressemblerait pas. Entre autres, ça nous a donné cette image iconique de « signes ostentatoires » interdits, un visuel financé par un budget publicitaire qui a coûté aux contribuables près de 1,2 million de dollars.

Mais ça n'a pas réellement éclairci le sujet. J'ai donc sondé quelques amis en posant une question assez simple : qu'est-ce qu'une personne laïque se met sur le dos ? Parmi les réponses proposées, on a cité le « normcore », ou, plus précisément, des jeans et t-shirts. Franchement, je m'y attendais. Qu'est-ce qui est plus homogène et inoffensif que des jeans et t-shirts ?

Vous savez qui se promènent aussi en jeans et t-shirts ? Tous les membres du Westboro Baptist Church (WBC), même les femmes. Vous connaissez le WBC ? C'est un groupe religieux, chrétien et extrémiste, qui organise souvent des manifs aux funérailles de soldats américains abattus. Chaque fois, les membres du WBC sont armés de pancartes déclarant que « God Hates Fags », et d'autres messages semblables. Grosso modo, le WBC prétend que ces combattants ont mérité leurs défaites parce que les États-Unis ont plus ou moins accepté l'homosexualité, ce qui a beaucoup vexé leur dieu.

« Ouais, mais ce sont des fous », me direz-vous ? Certes, sauf si que Shirley Phelps-Roper, principale organisatrice au sein du WBC, se cherchait un emploi à la Société de l'assurance automobile du Québec, personne ne lui dirait que son look n'est pas assez laïc et elle n'aurait pas à subir une période de transition de cinq ans pour faire le choix entre sa foi et sa job.

Hormis quelques exceptions, le christianisme ne s'affiche pas. Pourtant, les chrétiens extrémistes existent, mais essayez donc de les distinguer dans une foule de gens en jeans et t-shirt. Et puisque les chrétiens - modérés ou pas - sont plus nombreux au Québec que toutes autres religions, il faut croire qu'ils s'intègreront assez facilement au modèle laïc proposé par le PQ. C'est drôlement convenable que la laïcité péquiste ressemble au christianisme, non ?

Mais au fond, qu'est-ce qui dérange plus : les vêtements de Shirley Phelps-Roper, ou les propos de ses pancartes ? Ce qu'elle porte ou ce qu'elle croit ? Si ce n'était pas pour les pancartes, auriez-vous deviné ce qu'elle croyait juste en la regardant ?

La laïcité, la vraie, ce n'est pas un look. C'est un mode de vie, un comportement. À cet égard, regardons de plus près le comportement de l'État. En 2010 et 2011, dans le secteur public, aucun employé appartenant à une minorité culturelle ou ethnique a été embauché dans un poste de direction. À la Sureté du Québec, seulement 1 % du personnel en uniforme provenait de ces mêmes minorités. Et malgré les efforts de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le profilage racial est toujours un problème chez nos services policiers.

En autres mots, la discrimination systémique dans le secteur public québécois est un enjeu qui se chiffre ; l'intégrisme, ardemment cité par M. Drainville, pas tant que ça.

Nous ne vivons pas encore dans un État égalitaire, laïc ou non. Si la parité est réellement une valeur québécoise, nous devrons drastiquement changer notre perception de ceux qui ne nous ressemblent pas. Et ça, on ne le réalisera pas en forçant les femmes voilées de se vêtir de jeans et t-shirts. À suivre l'exemple du WBC, n'importe qui peut se cacher derrière un look laïc.

Pour mesurer la capacité d'un concitoyen de vivre de façon laïque, on ne peut pas se fier aux apparences. La laïcité se vit dans la tête et dans les gestes. Moi, j'ai plus peur de ceux qui ont vandalisé les mosquées le lendemain des élections que ceux qui priaient à l'intérieur.

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