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L'éloge de la salope

Conduit par la nécessité de choquer et de provoquer afin de maintenir leur part de marché, magazines, blogues et même les journaux, soi-disant traditionnels, sont de plus en plus nombreux à traiter de sujets qui ciblent plutôt à attiser le désir du lecteur qu'à le stimuler intellectuellement. Titres sensationnels, images fortes et sexuellement explicites transforment peu à peu le liseur en un voyeur affamé et désespéré. « Du cul, du cul, du cul! » Revendique-t-il sans cesse.
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Conduit par la nécessité de choquer et de provoquer afin de maintenir leur part de marché, magazines, blogues et même les journaux, soi-disant traditionnels, sont de plus en plus nombreux à traiter de sujets qui ciblent plutôt à attiser le désir du lecteur qu'à le stimuler intellectuellement. Titres sensationnels, images fortes et sexuellement explicites transforment peu à peu le liseur en un voyeur affamé et désespéré. « Du cul, du cul, du cul! » Revendique-t-il sans cesse.

L'esprit de l'Homme serait-il en train de rétrécir ?

Tiraillé entre une censure naturelle ou inculquée par une éducation puritaine et une envie de débauche fortement encouragée par les médias, celui qui serait quotidiennement exposé aux centaines d'images à connotations pornographiques verrait son jugement totalement perturbé. Le magnétisme opérant par la force répulsion/attraction finirait par anesthésier tout sens critique chez le lecteur, ce qui lui permettrait d'accepter d'être gavé d'indécences, de grossièretés, d'obscénités et de supporter, ce qui était jadis classé comme intolérable.

La recette a fait ses preuves. Les photos publiées mettant en scène des modèles (plus particulièrement féminins), photographiés dans des poses suggestives, aguichantes, parfois scandaleuses, lorsqu'elles ne sont pas tout simplement obscènes, provoquent chez l'individu, une réelle fascination tout en créant une véritable dépendance à ces clichés. Animé par un besoin manifeste de retrouver encore et encore, une satisfaction cérébrale et ensuite physique qui mènera à l'excitation sexuelle, il cherchera sans cesse à repousser les limites de ses fantasmes (parfois les plus sombres) et finira par cautionner des aberrations des plus notoires, comme des actes de traitements abusifs ou des simulations de viol. Le rendu est si parfaitement léché que l'esprit émerveillé par la beauté de la facture ne sait plus distinguer le vrai du faux, le bien du mal; une toute nouvelle forme de perversion se fraie ainsi un passage dans l'inconscient collectif.

C'est ainsi que sous le couvert de l'Art avec un grand A, de la liberté de presse ou, avec autant d'effronterie, la libération des mœurs, les Thierry Richardson de ce monde contribuent à réveiller l'instinct sauvage et primitif de l'Homme, alors qu'on l'espérait enterré à tout jamais.

Si, en se délectant de ces images, les mâles débordant de testostérones pourraient se voir qualifier de pervers à l'affût de sensations érotiques intenses, comment devrait-on décrire les femmes qui consentent à poser à moitié déshabillées, jambes écartées, se frottant contre tout ce qui bouge et mimant à la perfection la plus salope des salopes ?

Lorsque ces « pratiques » font référence à un féminisme moderne, il faut se demander : « Comment ces agissements profitent-ils aux femmes ? »

Il semblerait que la frontière entre la libre expression de la sexualité et l'avilissement mérite encore d'être surlignée !

Pourtant, nous dénonçons jour après jour, les atrocités faites à la gente féminine, ici et ailleurs. Nous nous alarmons de la multiplication des agressions qu'elles subissent et nous tentons de comprendre comment nos sociétés ont pu développer une culture du viol.

Et pendant que les, Rihanna, Kate Moss, Lady Gaga ou autres idoles se pavanent devant les caméras pour exhiber leur cul comme si le succès de leur carrière dépendait de leur nudité, des êtres infects profitent d'une notoriété artistique plus que douteuse et quelques éditeurs véreux se remplissent les poches.

Quel modèle de femmes sommes-nous en train de construire ?

Être traité comme un objet sexuel et être admirer expressément parce qu'on se comporte comme une belle pute n'a rien, mais vraiment rien de noble ou de valorisant. Se venter d'être la « bitch » de quiconque ne doit jamais faire partie des rêves d'une jeune fille. Aucune page couverture de magazine ou nombre de « like » sur Facebook ne devrait motiver de telles ambitions.

Si nos mères et nos grand-mères se sont battues pour la libération sexuelle, eh! bien, nous sommes bel et bien en train de mettre aux vidanges tous leurs efforts. Il faut vite nous secouer, laisser de côté cette puérile vanité qui fausse notre raison et réaliser enfin, que derrière tout ce cirque, il ya une sincère volonté de nous enfermer de nouveau dans la cage dont elles ont pu si difficilement échapper.

Dès l'instant où les femmes accepteront qu'elles puissent plaire OU de ne PAS plaire et qu'elles s'assumeront en apprenant vraiment à s'aimer sans être à la merci du regard des hommes, elles seront alors parfaitement libres d'adopter tous les comportements qu'elles souhaiteront.

En attendant, il faut refuser de se vendre dans l'espoir de susciter un peu d'attention.

Chaque femme vaut bien plus que ça!

Ce blogue a également publié sur le blogue de Tina Karr, Une mère en talons aiguilles

Marie Lacoste-Gérin-Lajoie (1867-1945)

Principales pionnières féministes du Québec

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