POLITIQUE - Dans l’attente des premières annonces d’Emmanuel Macron après le grand débat, les gilets jaunes veulent maintenir la pression ce samedi 13 avril avec notamment un rassemblement national prévu à Toulouse, l’un des principaux bastions du mouvement. A la veille de cet acte XXII, la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale a acté le lancement d’une mission d’information visant à établir le bilan financier et budgétaire de ce mouvement de contestation inédit pour la France.
Initiée par son président, le député LREM Roland Lescure, cette mission veut “s’intéresser aux coûts des violences et dégradations commises en marge du mouvement”, a-t-il précisé dans une réponse adressée au député de la France insoumise François Ruffin, qui a pour sa part réclamé une mission pour établir les “bénéfices des gilets jaunes” pour les Français.
Dans un premier courrier adressé vendredi au président de la commission des Affaires économiques, François Ruffin, qui vient de signer un film consacré aux gilets jaunes, s’est dit “pas étonné” qu’une majorité qui “se vit comme un cabinet d’audit” ait créé une mission pour évaluer le coût des dégradations liées aux manifestations.
“Vous auriez, sans doute, en 1789, réclamé une évaluation des dégâts commis au nom de la liberté, et en 1936, une évaluation du coût des grèves du Front populaire”, raille l’élu de la Somme.
10 milliards pour le pouvoir d’achat
Le bras de fer politique est posé. D’un côté, les députés de la majorité veulent évaluer les dizaines de millions d’euros de dégradations commises en marge des manifestations du samedi des gilets jaunes, l’effort budgétaire massif de mobilisation et d’armement des forces de l’ordre, le manque à gagner pour les enseignes et artisans, empêchés de travailler, notamment pendant la période de Noël, le coût pour l’activité et donc la croissance du pays.
Selon le ministre de l’Economie Bruno Le Maire, le mouvement a eu un “impact direct et de court terme sur la croissance française” qui “peut aller jusqu’à 0,2 point de PIB (produit intérieur brut) pour 2018 et 2019″, soit plus de 4,5 milliards d’euros.
De l’autre, François Ruffin réclame que l’Assemblée établisse les gains de pouvoir d’achat obtenus par la mobilisation. Ce dernier souligne notamment que le président “a renoncé à augmenter la taxe sur le carbone” ou que “près de deux millions de salariés, dans 200.000 entreprises, ont touché une prime, de 450 euros en moyenne, abusivement nommée ‘prime Macron’, qui devrait être rebaptisée ‘prime gilets jaunes’”.
“Au total, environ une dizaine de milliards furent arrachés par les gilets jaunes”, rappelle François Ruffin, jugeant utile qu’une mission vienne préciser les bénéfices évalués ”à la louche”.
Riposte au lance-flamme de la majorité
Loin de se démonter, Roland Lescure, l’un des hommes forts de la majorité LREM à l’Assemblée nationale, a répliqué au courrier de son collègue insoumis en l’invitant à siéger dans la mission d’information qui, précise-t-il, tiendra compte “de l’impact sur l’économie et plus particulièrement sur la consommation des ménages” des mesures de pouvoir d’achat arrachées par les gilets jaunes au gouvernement.
Tout en se défendant de confondre manifestants et casseurs, le président de la commission des Affaires économiques accuse en revanche François Ruffin de promouvoir “un angélisme révolutionnaire” refusant de distinguer les acteurs d’un mouvement social “dont nul ne conteste la sincérité” et “les violences, les dégradations, les exactions” commises à sa marge.
Côté coûts, les dégradations commises durant les manifestations avaient été évaluées par le ministre Bruno Le Maire à 200 millions d’euros après la prise en compte de celles de l’acte 18 du mouvement. Le chômage partiel dû au mouvement a ainsi touché 73.500 personnes travaillant dans 5.100 entreprises, ce qui représente un coût de près de 40 millions d’euros pour les finances publiques, a-t-il également indiqué.