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L'islam m'a fait découvrir la femme que je voulais être

Pour beaucoup de gens, l'islam est un synonyme de répression de la femme.
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Il n'y a pas de pays parfait, de société parfaite et encore moins d'humain parfait.
Warda Naili
Il n'y a pas de pays parfait, de société parfaite et encore moins d'humain parfait.

Fidèle à ma part du marché, j'ai pris le temps de lire chaque commentaire et réponse aux commentaires que j'ai pu trouver ici et là. J'ai envie de continuer mon récit, mais avant je crois qu'il est essentiel que je clarifie quelques points. Avant tout, je ne suis pas rémunérée pour écrire. HuffPost Québec a généreusement accepté mon offre de collaboration, car je trouvais qu'on entendait peu parler de ces femmes qui portent le niqab, alors qu'elles ont beaucoup fait jaser au cours des dernières années. Mon but, je l'ai dit, c'est d'aller à la rencontre de l'autre, dans l'optique de rehausser le dialogue et ainsi de nous aider tout un chacun à trouver un équilibre au sein de la société. Comme je l'ai dit dans mon deuxième texte, mon but n'est pas de faire aimer l'islam ou le niqab. Encore moins de convertir qui que ce soit. De plus, bien que j'aie des amis et connaissances qui œuvrent au sein de diverses associations communautaires, je ne suis membre d'aucune d'entre elles. J'aimerais terminer cet éclaircissement en disant que si j'ai pris la liberté de parler de moi, c'était simplement pour expliquer mon cheminement, peu importe le sens que vous lui donnerez, car musulmane ou « niqabi » n'est pas forcément synonyme d'étrangère, puisque pour ce que j'en sais, la majorité des femmes que je connais qui le portent sont toutes nées et/ou ont grandi ici. J'aimerais aussi dire que ce texte promettant d'être long, car il y a beaucoup à dire, il sera scindé en plusieurs parties. Ceci dit, permettez-moi de continuer.

Ma mère a su voir au-delà des étiquettes ou de ce qu'elle avait entendu à propos de cette religion.

Ma découverte de l'islam m'a fait découvrir la femme que je voulais être et j'ai donc décidé d'emprunter cette voie, à mon rythme. Je n'ai pas changé ma vie du jour au lendemain, j'ai plutôt vécu une longue transition, une évolution au fil de mon cheminement. Par contre, je dois avouer que j'ai gardé le secret plus d'une année avant d'avoir le courage d'en parler autour de moi. J'avais tellement peur de ne pas être comprise. D'être jugée. J'avais peur de décevoir ma mère. Surtout elle. Et pourtant, j'ai eu une chance inouïe, comparativement à d'autres converties qui ont vu leur famille leur tourner le dos. Ma mère a su voir au-delà des étiquettes ou de ce qu'elle avait entendu à propos de cette religion. Elle a vu comment l'islam m'a aidée à changer ma vie, à l'améliorer, comment cela m'a aidée à prendre soin de moi. Ma foi m'a permis de pardonner des gestes que je regrettais. Ça m'a permis d'aller de l'avant.

Pour beaucoup de gens, l'islam est un synonyme de répression de la femme. Il est clair que si l'on regarde le traitement fait aux femmes dans certains pays musulmans, il serait facile de généraliser, mais je pense qu'il faut aller au-delà des apparences. Une religion, ce n'est pas une entité, ce n'est pas une personne. La religion, c'est une chose, ce que l'humain en fait en est une autre. Je ne suis pas d'accord avec le traitement fait aux femmes iraniennes, saoudiennes ou encore afghanes, qu'on voile de force et à qui aucune voix n'est donnée au chapitre. Ce qu'elles vivent, il faut le dénoncer, le condamner. Mais il faut aussi faire la part des choses.

Personnellement, mon contact avec l'islam m'a donné une autre image de la femme musulmane que celle montrée par Betty Mahmoody dans son triste récit Jamais sans ma fille, qui a su frapper l'imaginaire des gens et avec raison quand on voit qu'elle a été voilée de force, battue et brimée dans ses droits et sa dignité. Il existe plusieurs récits tels que celui que je viens de mentionner. Des histoires d'horreur, mais encore une fois soyons réalistes, de telles histoires, des femmes brimées, ça existe dans toutes les cultures, dans tous les pays.

Nos femmes ici ne sont peut-être pas forcées de se voiler, mais combien trouvent refuge chaque année dans ces maisons pour femmes battues ou en difficulté ?

Nos femmes ici ne sont peut-être pas forcées de se voiler, mais combien trouvent refuge chaque année dans ces maisons pour femmes battues ou en difficulté ? Combien de drames familiaux et de crimes passionnels à la suite de séparations? Ou encore, combien de jeunes femmes se rendent malades à essayer d'entrer dans un moule pour tenter de se faire accepter de la société, et ce, au détriment de leur corps et leur personnalité? Il n'y a pas de pays parfait, de société parfaite et encore moins d'humain parfait. Je crois que nous faisons tous de notre mieux, selon nos moyens et notre conscience. Et disons que côté conscience, on dirait bien que la distribution n'a pas été équitable pour tous.

Quand on me demande si je n'ai pas pensé, en me convertissant et en me voilant, à ces femmes qui se sont battues ici au Québec, pour gagner leur indépendance, leur liberté et leurs droits, j'ai envie de parler de ma grand-mère. Ma grand-mère est née en 1916. Elle était de cette époque où les femmes devaient avoir un enfant après l'autre sous peine d'être excommuniées et ainsi devenir des parias de la société. Une époque aussi où il y avait peu de communication au sein des couples et donc beaucoup de frustrations. Ma grand-mère a eu huit enfants. Au troisième, elle n'en voulait plus. Mais les conventions voulaient autre chose. Elle s'est retrouvée prisonnière d'une vie qu'elle ne voulait pas. Et en 1963, elle a fait un choix. Un choix lourd de conséquences pour sa famille, mais une véritable renaissance pour elle. Elle a quitté mari et enfants pour aller vivre la vie qu'elle se serait choisie. Je sais qu'elle aimait ses enfants, et malgré les blessures, je suis persuadée qu'ils le savent aussi, mais elle devait se choisir elle, pour son équilibre, sa survie. Ma grand-mère fait partie de ces femmes qui ont conquis leur indépendance sur tous les points, si elle était toujours de ce monde, elle se ferait un plaisir de vous en parler. Une grande libération, non sans conséquence. Mais je suis fière d'elle d'avoir choisi d'être la femme qu'elle voulait être, comme moi je l'ai fait plus tard.

À suivre.

Paix.

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