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Pourquoi les maladies cardiaques tuent plus de femmes que d’hommes?

Les symptômes des femmes sont mal interprétés: elles sont plus susceptibles de ne pas ressentir de douleur ou de manifester des symptômes peu caractéristiques.
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Au bout du compte, tant que le plafond de verre du sexisme dans la recherche cardiovasculaire ne sera pas brisé, les femmes continueront à en subir les conséquences.
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Au bout du compte, tant que le plafond de verre du sexisme dans la recherche cardiovasculaire ne sera pas brisé, les femmes continueront à en subir les conséquences.

Un bon soir, vous syntonisez votre émission médicale préférée. Dès la première scène, le calme de l'hôpital est rompu lorsqu'un patient se saisit la poitrine et s'effondre sur le sol. L'équipe médicale arrive précipitamment et s'affaire fiévreusement à sauver la victime d'une crise cardiaque.

Dans votre esprit, avez-vous imaginé que le patient était un homme ou une femme? La question est des plus pertinentes, car la plupart des gens associent les crises cardiaques aux hommes. Pourtant, les maladies cardiovasculaires sont la principale cause de décès dans le monde pour les deux sexes. Et les femmes sont plus susceptibles que les hommes de mourir d'une crise cardiaque.

Durant une crise cardiaque, les femmes sont plus susceptibles de ne pas ressentir de douleur ou de manifester des symptômes peu caractéristiques, incluant la fatigue ou un inconfort dans le cou, la mâchoire ou le dos.

Les directives thérapeutiques sont basées sur les données recueillies principalement auprès des hommes. Le sexisme dans la recherche cardiovasculaire signifie qu'on méconnait souvent la crise cardiaque chez les femmes, qui en outre ont aussi moins de chance de profiter des thérapies, des interventions et des possibilités de réadaptation recommandées.

Plus de femmes en meurent

L'un des troubles cardiaques les plus communs est la cardiopathie ischémique, qui peut causer une crise cardiaque. Une crise cardiaque survient lorsque les vaisseaux sanguins reliés au cœur sont bouchés, provoquant la mort du muscle cardiaque. Dans la plupart des cas, le blocage est dû à l'athérosclérose: l'accumulation de plaques adipeuses dans les artères coronaires.

Toutefois, plus de 50% des femmes souffrant de cardiopathie ischémique n'ont pas d'artères coronaires bouchées.

L'étude Women's Ischemia Syndrome Evaluation (WISE) a révélé que la cardiopathie ischémique chez la femme survient souvent lorsque de plus petits vaisseaux du cœur, appelés «microcirculation», se détériorent et se referment.

Tant que le plafond de verre du sexisme dans la recherche cardiovasculaire ne sera pas brisé, les femmes continueront à en subir les conséquences.
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Tant que le plafond de verre du sexisme dans la recherche cardiovasculaire ne sera pas brisé, les femmes continueront à en subir les conséquences.

En dépit des avancées qui ont réduit la mortalité due aux crises cardiaques, les femmes ont des taux de décès plus élevés comparativement aux hommes.

Pourquoi la même maladie tue plus de femmes que d'hommes?

Crises cardiaques sans douleur

La plupart des crises cardiaques sont des accidents soudains et douloureux qui provoquent l'effondrement des personnes qui en sont victimes. Le mal peut être graduel et confondu avec une indigestion ou une douleur musculaire.

Même si une douleur à la poitrine est le symptôme le plus commun pour les deux sexes, les femmes sont plus susceptibles de ne pas ressentir de douleur ou manifester des symptômes peu caractéristiques incluant la fatigue ou un inconfort dans le cou, la mâchoire ou le dos.

L'incapacité de reconnaître ces symptômes atypiques peut retarder le traitement et entraîner de graves lésions au cœur.

On s'inquiète depuis longtemps du fait que les femmes tardent à solliciter des soins médicaux et subissent des dommages plus graves faute d'agir rapidement. Une analyse de la recherche de 1960 à 2008 relève 11 études qui ont indiqué que les femmes tardent davantage à solliciter des soins et sept qui n'ont noté aucune différence entre les sexes. Même si la plupart des études ont indiqué que les femmes qui ont souffert d'une crise cardiaque ont pris plus de temps que les hommes à obtenir des soins médicaux, ces différences sont relativement faibles.

Les directives cliniques fixent des points de contrôle pour les examens et traitements qu'on omet souvent pour les femmes. La Fondation des maladies du cœur et de l'AVC du Canada a noté que les femmes étaient moins susceptibles que les hommes de passer un électrocardiogramme — un examen pour dépister les crises cardiaques — dans l'intervalle recommandé de 10 minutes après l'arrivée à l'urgence.

Des diagnostics plus exacts non utilisés

Les troponines dans le sang (les protéines sécrétées quand le muscle cardiaque a été endommagé) sont la référence absolue comme biomarqueur pour diagnostiquer une crise cardiaque. Mais les critères pour les analyses de troponines ont été définis à partir de données recueillies principalement auprès des hommes. Les hommes ont des taux de circulation de troponines jusqu'à 2,4 fois supérieurs à ceux des femmes.

La hausse de troponines chez les patientes victimes d'une crise cardiaque peut ne pas dépasser le seuil diagnostique. Jusqu'à 20% des crises cardiaques ne sont pas dépistées chez les femmes lorsqu'on utilise le seuil masculin pour identifier les crises cardiaques.

L'angiographie identifie les artères coronaires bouchées lors d'une crise cardiaque, mais elle ne dépiste pas les blocages de microcirculation qui surviennent souvent chez les femmes.

Les examens d'imagerie comme la TEP et la SPECT sont des outils de diagnostic plus exacts pour les femmes victimes d'une crise cardiaque. Malheureusement, ces outils d'imagerie ne sont pas couramment utilisés, ce qui fait que les femmes ne reçoivent pas un diagnostic adéquat.

Moins de femmes profitent de la réadaptation cardiaque

Les femmes victimes d'une crise cardiaque sont moins susceptibles de recevoir les thérapies recommandées. Les interventions comme le cathétérisme cardiaque et le pontage coronarien sont moins courants chez les femmes.

À leur congé de l'hôpital, les femmes sont moins susceptibles de recevoir des prescriptions bien qu'il soit prouvé que la mortalité diminue lorsqu'on suit les directives de médication.

Davantage de recherche fondamentale est nécessaire — pour comprendre les différences des maladies cardiovasculaires dans le corps des hommes et des femmes.
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Davantage de recherche fondamentale est nécessaire — pour comprendre les différences des maladies cardiovasculaires dans le corps des hommes et des femmes.

Les traitements à long terme pour les patients victimes de crise cardiaque comprennent la réadaptation cardiaque. Ces services sont sous-utilisés en général, mais plus particulièrement par les femmes.

Les femmes sont moins susceptibles d'être référées à la réadaptation cardiaque par leur médecin. Même quand elles le sont, les femmes sont moins susceptibles de s'inscrire au programme et plus susceptibles de l'abandonner avant qu'il soit terminé.

Le sexisme dans la recherche cardiaque

Les directives de traitement sont basées sur des données recueillies principalement auprès des hommes. Un énoncé de 2016 de l'American Heart Association note que les femmes ont bénéficié des traitements recommandés pour les crises cardiaques, mais que des données définitives sur les différences sur l'efficacité des traitements entre les sexes sont insuffisantes.

Des investissements dans la recherche fondamentale pour identifier les différences quant au sexe en matière de santé et de maladie sont indispensables pour élaborer des thérapies en fonction du sexe plus efficaces, tout comme l'inclusion de plus de femmes dans les essais cliniques.

Les agences de recherche ont des directives pour accroître l'inclusion des femmes dans les essais cliniques et encourager la recherche sur les différences entre les sexes concernant les maladies cardiovasculaires. Toutefois, ces recommandations doivent être appliquées pour avoir une incidence sur la santé des femmes.

Au bout du compte, tant que le plafond de verre du sexisme dans la recherche cardiovasculaire ne sera pas brisé, les femmes continueront à en subir les conséquences.

La version originale de cet article a été publiée sur La Conversation.

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