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Nouveau bras de fer entre le gouvernement et le DG de la Sûreté du Québec

Une commission enquêtera et soumettra un rapport sur l’existence ou non d’une cause de destitution de Martin Prud’homme.
Geneviève Guilbault et Martin Prud'homme. (photos d'archives)
La Presse canadienne/montage HuffPost Québec
Geneviève Guilbault et Martin Prud'homme. (photos d'archives)

La saga entourant la suspension du directeur général de la Sûreté du Québec, Martin Prud’homme, n’est pas près de se terminer.

La ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a transféré vendredi le dossier de M. Prud’homme à la Commission de la fonction publique afin qu’elle recommande ou non la destitution de ce dernier.

La Commission fera enquête et soumettra à la ministre un rapport «quant à l’existence ou non d’une cause de suspension sans rémunération ou de destitution» de M. Prud’homme.

Le DG de la SQ, qui est suspendu avec solde depuis mars 2019, s’est dit consterné et habité d’un «sentiment profond d’injustice», avant même que Geneviève Guilbault ne prenne la parole à Québec pour annoncer cette nouvelle étape dans le processus prévu dans les lois sur la police et sur la fonction publique. Dans un communiqué publié tôt vendredi matin, il a estimé qu’il n’a jamais pu défendre ses droits adéquatement.

Martin Prud’homme a été relevé de ses fonctions temporairement le 6 mars 2019 en raison d’allégations d’infractions criminelles, dont aucun détail n’avait été dévoilé au moment de l’annonce de sa suspension avec solde. Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a décidé en avril dernier de ne pas déposer d’accusations contre lui dans ce dossier qui concernait un appel téléphonique du 23 octobre 2017 à Annick Murphy, directrice du DPCP.

Puisque le dossier est toujours en cours, Mme Guilbault n’a pas voulu commenter davantage la situation lors de sa conférence de presse.

Interrogé sur la nature de l’appel entre Me Murphy et M. Prud’homme, la ministre a souligné que M. Prud’homme pourrait consentir à ce que le contenu du rapport des experts du Secrétariat aux emplois supérieurs soit rendu public pour donner un éclairage sur la situation. M. Prud’homme a reçu ce rapport le 9 juin dernier, a précisé Mme Guilbault.

Le Secrétariat aux emplois supérieurs a par la suite entamé une enquête de nature déontologique et éthique. Il a jugé «qu’il y a eu une faute de nature à ce que la suite soit analysée par la Commission de la fonction publique», a affirmé Mme Guilbault. Elle n’a pas fourni d’échéancier pour la publication du rapport de la Commission.

La vice-première ministre a révélé qu’elle était «d’accord avec la recommandation du Secrétariat» d’en référer à la Commission puisqu’elle jugeait le motif «sérieux».

«Si le Secrétariat aux emplois supérieurs lui-même avait jugé que la faute était mineure ou inexistante, ils auraient pu régler la situation à leur niveau, soit réintégrer M. Prud’homme ou aller dans des éléments plus disciplinaires», a-t-elle expliqué.

«Est-ce que ce n’est pas de l’acharnement ou une façon déguisée de s’en débarrasser? Pas du tout. Parce que, si c’était ça, on n’aurait pas voté notre propre loi no 1 pour se compliquer la chose», a avancé Mme Guilbault.

Conformément à la Loi sur la police, une destitution de M. Prud’homme, si c’est la décision finale du gouvernement, devra être entérinée par un vote aux deux tiers de l’Assemblée nationale.

Prud’homme donne sa version

M. Prud’homme indique que selon lui, la véritable intention de ces enquêtes était plutôt «de mener une vaste partie de pêche» visant à l’associer aux fuites médiatiques émanant de l’UPAC sur la simple présomption de ses liens d’amitié avec le député Guy Ouellette et de ses liens familiaux avec l’ex-commissaire à l’UPAC, Robert Lafrenière. M. Prud’homme est le gendre de M. Lafrenière.

«La preuve a été faite que toutes les informations à cet égard se sont avérées inexactes», a-t-il réitéré dans le communiqué.

«Le gouvernement s’apprête à prendre une décision sur la base de faits erronés, incomplets et qui comportent une multitude de raccourcis. Je n’ai jamais eu le droit de me défendre adéquatement et j’en conclus aujourd’hui que je suis victime d’une volonté du gouvernement de mettre fin à 32 ans de carrière au service du public», a-t-il fait valoir.

«J’entends défendre mes droits et ma réputation devant une instance juste et impartiale puisque j’ai perdu toute confiance dans la capacité du sous-pouvoir politique qui a déjà décidé que ma carrière était terminée», a-t-il ajouté.

Prud’homme occupe le poste de DG de la SQ depuis 2014. En décembre 2017, il a commencé un mandat intérimaire d’un an à la tête du SPVM afin de remettre de l’ordre dans le corps policier montréalais. Il est ensuite retourné au quartier général de la SQ.

La confiance envers la police minée

Le Parti libéral du Québec a déploré le manque de transparence de la ministre Guilbault.

«On ne sait toujours pas ce qui est reproché (à M. Prud’homme)», s’est insurgé le porte-parole libéral en matière de sécurité publique, Jean Rousselle.

«C’est du numéro un de la SQ dont on parle. À la lumière des informations dont on dispose, cela s’apparente à un règlement de compte et de l’acharnement.»

Par ailleurs, cette situation minerait la confiance des citoyens envers les institutions policières québécoises, selon M. Rousselle.

Pour Québec solidaire, «il est temps de mettre un terme à la petite politique dans la police: ça ternit nos institutions policières déjà en mal de confiance».

«Plus que jamais, il faut introduire des civils pour briser ces dynamiques malsaines qui perdurent depuis des années au sein de ces institutions. Le Québec a grand besoin d’une transformation de ses corps policiers», a déclaré le député Alexandre Leduc.

Avec La Presse canadienne.

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