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Mathieu Dupuis, le premier Québécois à publier un livre à la National Geographic Society

Ses photos du Québec vous en mettront plein la vue!
Mathieu Dupuis

Il aura fallu près de 20 ans de carrière professionnelle et 7 ans de négociations au photographe abitibien Mathieu Dupuis pour que se concrétise son rêve ultime de carrière: publier un livre, dont il signe toutes les photos et pratiquement tous les textes, à la National Geographic Society, l'organisation qui publie également le légendaire magazine. Son sujet? La vie riche et les paysages formidablement contrastés du Québec. Son titre? Québec, tout simplement.

Qu'est-ce que ça représente de publier un livre chez Nat Geo?

Pour moi, c'est un rêve d'enfance. Avoir l'opportunité de publier un ouvrage dans une organisation iconique de l'industrie du voyage, c'est un honneur et une fierté. En matière de reconnaissance dans mon industrie, c'est difficile d'aller plus haut. J'ai souvent publié des photos sur les différentes plateformes du magazine, mais c'est beaucoup plus difficile de publier un livre en solo. Dans le futur, si je veux atteindre un nouveau stade dans ma carrière, il faudrait simplement que je fasse un autre projet du genre. C'est l'aboutissement ultime. J'ai bientôt 37 ans et je ne suis même pas à mi-carrière. Je vais donc devoir user de créativité!

Le Québec vu par Mathieu Dupuis

Pourquoi choisir le Québec comme sujet?

C'est un territoire extrêmement vaste et contrasté, qui offre une gamme d'expériences très diversifiées. On vit majoritairement le long du fleuve Saint-Laurent, dans les grandes villes et les campagnes environnantes, qui sont relativement uniformes en termes de décor. Mais on a aussi quatre régions maritimes, qui ont un style de vie complètement différent, avec le fleuve et la nature grandiose. Puis, au Nord-Ouest, on a notre belle Abitibi-Témiscamingue, ma région natale. Sans oublier la terre des Cris et les Inuits du Nunavik. Dans ces latitudes extrêmes, on découvre des espaces exotiques et complètement dépaysants. La variété est aussi très présente sur les plans culturel, culinaire et dans le plein air. Quand je voyage ailleurs, j'ai souvent le sentiment d'être dans une destination plus égale, presque linéaire. Ici, avec les contrastes et les quatre saisons, il y a un caractère unique.

Explique-moi la logistique derrière la création d'un livre de 230 photos?

J'ai eu ce projet en tête pendant 7 ans. Puisque mon marché de travail principal est le Québec, j'accumulais aussi du matériel pour ce grand projet dès que j'en avais l'occasion. Néanmoins, tout s'est joué durant deux années intensives, pendant lesquelles je me suis concentré presque à temps plein sur le livre. J'ai suspendu tous mes autres contrats à l'international pour me concentrer sur le Québec. J'ai parcouru 100 000 km de route en deux ans et dormi 270 nuits dans mon véhicule adapté pour la route, aménagé avec des panneaux solaires et toutes les commodités pour être 100% autonome sur la route, y compris en hiver. Au final, j'ai pris des dizaines de milliers de photos. J'en ai proposé 3000 à Nat Geo pour la sélection finale, dont 250 pages couverture. C'est un travail costaud.

Mathieu Dupuis / National Geographic

Photographies-tu le Québec de la même façon qu'un territoire que tu découvres complètement?

Il y a toujours des découvertes à faire ici. Dans certains territoires moins accessibles comme le Nunavik, j'ai été émerveillé, car je n'ai pas l'occasion d'y aller souvent. Et même tout près de Montréal, j'ai été très surpris par les îles de Sorel et de Berthier : j'avais l'impression d'être dans un bayou en Louisiane. En fait, chaque région du Québec continue de me surprendre. Cela dit, c'est un atout de bien connaître un endroit. Ça permet d'aller plus loin dans l'exploration. Ton filet de sécurité est en place, tu sors des sentiers battus et des classiques, et tu peux faire du travail de fond.

Comment décris-tu ta signature de photographe?

On me dit souvent que mes photos ont une luminosité spécifique et qu'on sait tout de suite qu'une image vient de moi. Pour ma part, je dirais que je suis un photographe proactif et motivé. Je me lève beau temps, mauvais temps, une heure avant l'aube, même dans les territoires où le soleil se lève à 2h50 du matin. Et j'étire mes journées de travail jusqu'à tard en soirée. Je ne lésine pas sur les moyens pour atteindre mes fins. Même si l'expédition dure plusieurs heures en territoire isolé.

Comment t'es-tu initié à la photographie?

J'étais un enfant de Sainte-Justine. J'ai été très malade, entre 9 et 13 ans. Et dans toute bonne salle d'attente qui se respecte, il y a toujours un ou deux magazines du Nat Geo qui traîne. Ça a été mon introduction en la matière, à un âge où on est des éponges. J'étais curieux de comprendre l'univers de la photo, mais je faisais face à un grand défi avec ma santé. Je me suis raccroché à mon rêve pour rester à flot. C'est devenu presque une obsession dans ma vie : je devais être publié dans le magazine un jour. Quand j'ai retrouvé la forme, j'ai canalisé le trop plein d'énergie de ces années passées dans un lit d'hôpital à travailler pour atteindre mon objectif. Mon père, qui développait ses photos en noir et blanc dans son labo durant les années 70, m'a donné son équipement. Mes deux parents m'ont beaucoup encouragé. Et tout s'est enchaîné par la suite. Avant de faire mes études en photo commerciale, je publiais déjà des photos. C'est ma principale source de revenus depuis mon adolescence.

Pourquoi es-tu spécialisé en photographies de nature et d'aventure?

Les gens pensent que c'est ma spécialité, mais ce n'est pas le cas. Je fais de la publicité, de la photo corporative pour des multinationales, de la photo culinaire, des projets sur le yoga, les mines, le ski alpin, la course à pied, l'aéronautique, etc. Je suis tellement bien implanté dans chaque secteur que les gens pensent que je suis uniquement spécialisé dans le leur. Par contre, je fais uniquement la promotion de la nature et de l'aventure sur mes réseaux sociaux. Et mon site web est entièrement destiné à ça. C'est ce que j'aime le plus, mais j'adore aussi les autres sujets, qui m'amènent à mieux comprendre le monde.

Quels sont tes projets à venir?

Je rêve à certaines destinations au Canada, en Scandinavie et dans le reste du monde. Et je sais que l'équipe du Nat Geo attend mon nouveau projet de livre. Je ne prends pas ça à la légère. Ce sont des projets qui durent deux ou trois ans, pendant lesquels on doit s'imprégner d'une destination durant plusieurs années. Je ne sais pas comment je vais intégrer le tout à ma vie personnelle et à ma vie de famille.

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