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Mon fils devra subir une greffe cardiaque. Il a neuf ans.

Au moment même où la pandémie arrivait au Québec, nous apprenions que notre fils aurait besoin d’un nouveau coeur.

Les propos de ce témoignage ont été recueillis par le HuffPost Québec et retranscrits à la première personne.

Raphaël, c’est mon plus jeune, c’est mon bébé. À l’âge de sept mois et demi, il a eu un diagnostic de leucémie.

Raphaël, alors qu'il était encore bébé, avec son grand frère Eliot.
Courtoisie
Raphaël, alors qu'il était encore bébé, avec son grand frère Eliot.

Pour s’en sortir, il a eu besoin d’une greffe de moelle osseuse. Heureusement, il était compatible à 100% avec son grand frère Eliot - il y avait une chance sur quatre qu’ils soient compatibles - alors il a pu avoir la greffe. Au jour 100, Raphaël a eu une rechute de sa leucémie. Son frère a pu le sauver une deuxième fois grâce à la greffe. Depuis quelques années, mon garçon de maintenant neuf ans est en rémission de sa leucémie.

En mars 2019, lors d’un suivi annuel, les médecins ont détecté qu’il y avait quelque chose à son coeur qui n’allait pas. Un an plus tard, en mars dernier, on a appris que Raphaël aurait probablement besoin d’une greffe de coeur. Diagnostic: une cardiomyopathie. Son coeur devient rigide et fait de la pression sur ses poumons.

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D’autres tests viennent d’être effectués, et c’est confirmé. Il n’y a pas d’autres options, mon fils de neuf ans a besoin d’un nouveau coeur. Il a dû passer d’autres examens pour savoir si une greffe est bel et bien possible pour lui, mais ça s’annonce pour que ce soit le cas. Mais on ne sait pas il en aura pour combien de temps sur la liste d’attente. Si la pression sur ses poumons monte trop, la greffe devient impossible. Il faut donc qu’on puisse lui trouver un coeur compatible rapidement.

Un enfant qui a besoin d’une greffe de coeur, c’est très rare. C’est la chimiothérapie lors de sa leucémie qui aurait abîmé son coeur. À l’époque, ce traitement-là, c’était pour le sauver, on ne pouvait pas savoir ce qui arriverait à plus long terme. On va retourner dans l’inconnu. On sait qu’on devra retourner à l’hôpital, mais on ne sait pas pour combien de temps.

“C’est comme si on nous avait allumé plein de feux, mais on n’a pas de pompiers pour les éteindre.”

On avait récemment un rendez-vous avec un médecin pour avoir plus de détails au sujet de la greffe. On nous a dit que généralement, il y a une travailleuse sociale lors de cette rencontre-là. Par contre, cette semaine-là, elle tombait en vacances… Finalement, on était dans le bureau avec deux médecins et l’infirmière-pivot. C’était beaucoup d’informations et on repartait chez nous avec tout ça, sans avoir de soutien.

C’est comme si on nous avait allumé plein de feux, mais on n’a pas de pompiers pour les éteindre. Je ne peux pas éteindre le feu de mon mari, il ne peut pas éteindre le mien. On a autant de peine l’un que l’autre. Ils nous ont renvoyé chez nous avec ce gros feu qui brûle… C’est beaucoup de choses à encaisser en même temps.

Quand Raphaël a eu son diagnostic de leucémie lorsqu’il était bébé, on était naïfs et on faisait confiance aux traitements. Lors de sa rechute, c’était pire que l’annonce initiale, parce qu’on savait ce qui nous attendait. Sa plus longue hospitalisation a duré neuf mois. On vivait à l’hôpital. C’était notre quotidien d’être entouré d’enfants qui ont le cancer... Alors disons qu’à partir du moment où on est retourné chez nous après ça, on a profité de la vie à 100%. Ça allait bien, on était bien. Je ne sais pas pourquoi ça nous tombe encore dessus.

À partir du moment où on est retourné chez nous après ça, on a profité de la vie à 100%. Ça allait bien, on était bien.
Courtoisie
À partir du moment où on est retourné chez nous après ça, on a profité de la vie à 100%. Ça allait bien, on était bien.

Après un cancer, la vie est normale; mon enfant n’avait pas de séquelles visibles. Mais je sais qu’après une greffe de coeur, il n’aura plus une vie comme les autres. Il sera immunosupprimé et vivra dans des conditions particulières pour le reste de sa vie. Et contrairement au temps où il avait sa leucémie, il est conscient de ce qui lui arrive.

Raphaël devait entrer en quatrième année, mais il ne peut pas aller à l’école pour l’instant. De mes deux enfants, c’est lui qui avait le plus hâte de retourner à l’école. Son frère Eliot devra faire encore plus attention que les autres à l’école pour ne pas attraper la COVID-19. Je ne travaillerai pas et je vais rester à la maison avec Raphaël. Une amie a gentiment mis sur pied une collecte de fonds pour nous aider dans le contexte actuel.

“Je n’ai pas envie qu’il soit à l’hôpital longtemps. Ce n’est pas une vie pour mon enfant qui a appris à marcher là-bas.”

Ça fait peur. C’est juste de l’inconnu, on ne sait pas du tout où est-ce qu’on s’en va. Je n’ai aucune idée de quoi nos prochains mois seront faits. Est-ce que l’attente va être à la maison ou à l’hôpital? Je n’ai pas envie qu’il soit à l’hôpital longtemps. Ce n’est pas une vie pour mon enfant qui a appris à marcher là-bas.

Raphaël a peur. Ce qui est le plus difficile pour lui, c’est qu’en ce moment, il n’est pas diminué. Il n’est pas alité, pas mal en point. Alors lui, il veut jouer et voir ses amis. Son seul symptôme, pour l’instant, c’est qu’il s’essouffle plus vite. Mais il a l’air «normal», il va bien présentement.

Puisque Raphaël sera immunosupprimé, il doit déjà s’y préparer. Ça implique qu’on se débarrasse de nos reptiles à la maison. Il ne pourra plus jouer dans le bois ou dans les feuilles à cause des champignons, il ne peut plus manger de sushis, de tartare, ses oeufs doivent être bien cuits, il ne peut plus manger de fromage cru, de lait cru, etc. Il prend aussi un anticoagulant, alors il faut qu’il reste prudent au quotidien, parce que s’il saigne, ça va être difficile à arrêter. Et même avec un nouveau coeur, il devra prendre des médicaments pour le reste de sa vie. Sa vie et la nôtre sont en train de changer.

Raphaël est très proche de son papa. C’est souvent lui qui va le réconforter, par exemple quand il fait des prises de sang.
Courtoisie
Raphaël est très proche de son papa. C’est souvent lui qui va le réconforter, par exemple quand il fait des prises de sang.

Avec tout ce qu’on a vécu, on est une famille très unie. Raphaël est entre autres très proche de son papa. C’est souvent lui qui va le réconforter, par exemple quand il fait des prises de sang. Et son grand frère Eliot est un grand sensible. C’est rendu que les deux frères se font des câlins!

Tout ce que Raphaël a vécu l’a rendu résilient. On le félicite souvent. Il a subi des choses que nous, on ne subira probablement jamais dans nos vies. Il est tellement résolu, c’est un champion.

J’ai toujours dit que mon enfant, c’est mon héros.

La section Perspectives propose des textes personnels qui reflètent l’opinion de leurs auteurs et pas nécessairement celle du HuffPost Québec.

Propos recueillis par Florence Breton.

Les parents de Raphaël donnent des nouvelles de leur fils via leur page Facebook Ensemble pour Raphaël.

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