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Le Moyen-Orient n'est plus le dépositaire dominant des richesses pétrolières

Le potentiel de transformer l'ensemble du Moyen-Orient en paradis terrestre aura été mal exploité.
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«Il est gênant politiquement d'admettre ce que chacun sait: la guerre d'Irak est pour l'essentiel une guerre pour le pétrole», écrit dans ses mémoires Alan Greenspan, ancien président de la Réserve fédérale des États-Unis.

Deux billions de dollars plus tard, l'Irak vit dans le chaos, déchiré entre le gouvernement irakien et ses milices chiites soutenues par l'Iran, les Sunnites qui se rallient par dépit à l'État islamique, et les Kurdes qui essaient d'augmenter leur autonomie. Qui plus est, en raison de l'insécurité ambiante et de la chute du prix du pétrole, l'extraction de nouveaux puits de pétrole est gelée en Irak.

Le fait qu'une grande puissance ait pu déclencher une invasion massive et qu'elle ait erré en bien des points nous amène à considérer l'exercice de politique-fiction basé sur les ventes de pétrole à partir du Moyen-Orient.

De façon générale, les consommateurs du monde entier bénéficient de la chute des prix du pétrole. Aux États-Unis, le prix de l'essence a baissé de 3,31$ à 2,12$ le gallon en l'espace de 110 jours. Cette baisse s'est traduite par un surplus annuel de 1800$ par foyer et la consommation est à la hausse. Les USA sont devenus les premiers producteurs de pétrole au monde et cela explique en partie leur désintérêt relatif de la région du Golfe. Toutefois, les techniques de fracturation hydraulique cesseraient d'être rentables une fois le prix du pétrole passé sous la barre des 40 dollars le baril.

Quant aux pays pétroliers, ils sont peu affectés car la chute des prix s'est accompagnée de la surproduction pétrolière. La sécurité des convois pétroliers des pays du Golfe est due avant tout au fait que tous les pays de la région tirent profit des ventes de pétrole, quoique l'Iran ne le fasse pas à la mesure de ses capacités compte tenu des sanctions internationales. Chaque jour, 17 millions de barils représentant 20% de la production mondiale de pétrole transitent dans le Golfe. Mais il suffirait d'y placer quelques mines marines ou sous-marines pour voir le prix du Brent augmenter. En outre, un conflit avec l'Iran pourrait faire flamber les prix du pétrole. La construction de pipelines terrestres aboutissant à Oman est une façon d'éviter le passage par le détroit d'Ormuz étant donné que l'Iran qui en occupe la rive orientale a menacé de le bloquer s'il se sentait acculé au pied du mur.

La Turquie importe 98% de ses sources d'énergie. Ce n'est plus un secret que ce pays achète à rabais le pétrole à l'État islamique en échange d'armes et de liquide. Des ententes fraîchement signées entre la Turquie et la Russie prévoient un gazoduc traversant la Turquie qui constituerait une alternative au gazoduc actuel passant par l'Ukraine. De la sorte, l'Ukraine, qui essaie de se dégager de l'emprise russe sur son pays, s'en trouverait appauvrie. Par ailleurs, Israël a découvert des champs gaziers en Méditerranée et vend son gaz à l'Égypte et à la Jordanie.

Les grands perdants de la chute du prix du pétrole sont le Venezuela, l'Iran, et la Russie. Malgré sa rhétorique antioccidentale, le Venezuela est impuissant devant des enjeux qui le dépassent. Restent l'Iran et la Russie.

La «mollahcratie» iranienne aimerait bien faire cesser les sanctions internationales. En effet, si les sanctions étaient levées, l'Iran pourrait construire des gazoducs vers le Pakistan et l'Inde et sa production de pétrole pourrait aisément augmenter de 2 millions de barils par jour. Mais à ce jour, le bien-être de la population iranienne est pris en otage par les idées fixes et les ambitions géopolitiques des mollahs iraniens.

Près de 50% du revenu de la Russie provient des ventes de pétrole. Ces derniers mois, le rouble a perdu 50% de sa valeur et le taux d'inflation a grimpé à 17%. C'est un réajustement difficile pour la Russie qui va devoir puiser dans ses réserves en devises étrangères pour amoindrir les méfaits du marasme économique. De son côté, la Chine bénéficie grandement de la chute du prix du pétrole et tient à ce que son approvisionnement reste stable.

En toute probabilité, la manne du pétrole est arrivée à son apogée au Moyen-Orient, qui n'en est plus le dépositaire dominant. Elle n'aura pas été uniformément distribuée à ses populations, les retombées servant en priorité des familles royales ou des gouvernements corrompus. L'investissement en armement a été, et est encore, prodigieux. Le chômage a atteint une proportion hors-norme et l'insatisfaction grandit. En outre, la pesanteur des structures sociales et religieuses moyenâgeuses ne répond pas aux attentes des sociétés du XXIe siècle. Le potentiel de transformer l'ensemble du Moyen-Orient en paradis terrestre aura été mal exploité.

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