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Politique de mobilité durable: du vœu pieux à l'échec assuré

Certains groupes environnementaux ont applaudi trop rapidement à ces politiques, donnant ainsi à la population l'impression d'une réelle avancée dans le domaine.
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milehightraveler via Getty Images

Le 17 avril dernier, le gouvernement du Québec dévoilait en grande pompe sa nouvelle «Politique de Mobilité Durable 2030» et son «Plan d'action 2018-2023». Le 25 avril, la compagnie Ford Motor annonçait qu'elle abandonnait presque complètement la construction de voitures compactes et sous-compactes pour se consacrer au créneau des VUS et des camionnettes. Selon le constructeur, l'engouement actuel envers ce type de véhicules fait en sorte qu'il n'y a malheureusement plus de profits à faire avec le marché des voitures.

Quel est le lien entre ces deux annonces faites à une semaine d'intervalle? Simple coïncidence? Je me permets de tirer la conclusion que Ford et le gouvernement Couillard vivent en parfaite harmonie, consciente ou inconsciente. À une autre époque, on aurait parlé de synchronicité. Qu'est-ce qui appuie cette affirmation qui semble farfelue?

Commençons par regarder les données concernant le marché des véhicules routiers au Québec. La publicité (pour ne pas dire le lavage de cerveau) que diffusent les constructeurs fait la promotion incessante des gros véhicules, dont la marge de profit est beaucoup plus élevée que pour les petites voitures. Les constructeurs prétendent qu'ils ne font que de répondre à la demande du marché. Mais le marché est sous contrôle, et le désir a été créé artificiellement. Selon le rapport «État de l'énergie au Québec», entre 1990 et 2014, les émissions de GES attribuables au transport par véhicule personnel ont augmenté de 7%. De leur côté, les émissions attribuables au transport commercial ont augmenté de 30%. Et la tendance ne semble pas s'inverser. Il faudrait pour cela que le prix de l'essence augmente de façon significative, mais aucune prévision à court terme ne pointe dans cette direction.

Au Québec, les principales zones de consommation de pétrole liées au transport sont Montréal et sa banlieue, ainsi que les trajets interurbains entre Montréal, Québec et quelques autres villes. Ce sont donc ces zones qu'il faut analyser et où il faudrait intervenir en tout premier lieu. Pour répondre à ce problème, que propose le Plan de mobilité durable? Si on excepte le REM, qui ne réglera pas grand-chose, et la ligne bleue du métro de Montréal, qui ne sera pas fonctionnelle avant plusieurs années, on ne trouve dans ce Plan qu'un saupoudrage de petites mesures qui semblent couvrir tous les aspects du transport routier. Citons que deux exemples : les automobiles autonomes, qui ne règlent aucunement les problèmes de congestion et de pollution, et la logistique de transport pour les entreprises. Rien de structurant pour vraiment prendre le problème à bras le corps.

Ce manque de courage politique de la part du gouvernement fait le jeu des constructeurs automobiles en leur laissant libre accès à l'inconscient des consommateurs. Un système bonus-malus s'est pourtant avéré très efficace dans d'autres pays pour endiguer le goût du clinquant et du «je veux être VUS», car il touche une corde sensible: le prix. Pour imposer une diminution importante du nombre total de véhicules sur les routes et une diminution de la puissance motrice de chaque véhicule, les vœux pieux sont en effet inopérants. La liberté sans contraintes dont profitent individuellement les automobilistes pénalise toute l'humanité en favorisant le dérèglement du climat et accélère l'épuisement d'une ressource non renouvelable.

Un autre aspect déplorable de ce Plan est le manque flagrant d'importance accordée au transport par train, que ce soit pour les personnes et les marchandises. Un plan cohérent devrait viser le déploiement du transport par trains électriques. Pas besoin de TGV, juste des trains ponctuels reliant à une bonne fréquence les grandes villes du Québec, et les banlieues aux centres-villes. C'est là la seule façon de juguler l'afflux sans cesse croissant de voitures entre des banlieues de plus en plus éloignées et les centres-villes, afflux qui ne peut qu'accroître l'engorgement, surtout dans une ville comme Montréal située sur une île.

Le Plan réitère par ailleurs les cibles de réduction des émissions de GES que s'est données le gouvernement dans le domaine du transport, mais il ne permettra certainement pas de les atteindre d'ici 2030. Ces cibles sont de toute façon trop timides et entrent en contradiction avec les politiques de construction de nouvelles autoroutes qui permettront à toujours plus de véhicules lourds de circuler et de parcourir plus de kilomètres.

Certains groupes environnementaux ont applaudi trop rapidement à ces politiques, donnant ainsi à la population l'impression d'une réelle avancée dans le domaine. Mais ils n'en ont pas vraiment analysé les détails et les conséquences, ce qui est très dommage. Une réelle transition énergétique est incompatible avec une telle politique vouée à un échec assuré.

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