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Préhistoire: quand les animaux géants fertilisaient l'Amazone grâce à leurs excréments

Préhistoire: les animaux géants fertilisaient l'Amazone grâce à...
Haplochromis/WikimediaCommons/CC

Durant des milliers d'années, des animaux géants ont fertilisé le bassin de l'Amazone en propageant azote, phosphore et autres nutriments dans leurs excréments, avant de disparaître brutalement, privant définitivement la région de cet apport massif d'engrais, révèle une étude publiée dimanche 11 août dans la revue Nature Geoscience.

A l'époque du Pléistocène, l'Amérique du Sud ressemblait beaucoup à la savane africaine actuelle. Et les dinosaures, depuis longtemps disparus, avaient cédé la place à une "mégafaune" impressionnante: des mastodontes proches des éléphants, des paresseux géants de cinq tonnes ou des glyptodons, sortes de tatous de la taille d'une petite voiture.

Redistribution des engrais

Majoritairement herbivores, ces mammifères géants consommaient des quantités importantes de végétaux, absorbant azote et phosphore pour les relâcher dans leurs crottes et leur urine au gré de leurs pérégrinations. Selon cette étude, ils ont ainsi contribué à redistribuer, sur de très grandes distances au fil du temps, ces engrais naturels vers des sols qui seraient autrement restés stériles, en particulier dans le bassin amazonien.

Mais que s'est-il donc passé lorsque cette mégafaune a disparu, il y a environ 12.000 ans, à la suite d'une extinction massive probablement liée à un changement climatique et aux activités humaines ?

Selon les calculs des chercheurs, l'éparpillement des engrais a rapidement cessé, se limitant aux sédiments transportés depuis les Andes par le biais des rivières et des fleuves. D'après leur modèle mathématique, la dispersion du phosphore dans le bassin de l'Amazone aurait ainsi chuté de 98% !

"Les artères de la planète"

"En d'autres termes, les grands animaux sont comme les artères de la planète pour ces engrais, et s'ils s'éteignent ça revient à trancher ces artères", résume le principal auteur de l'étude, Christopher Doughty, de l'université britannique d'Oxford.

"C'est parce que la plupart de ces animaux ont disparu que le monde compte autant de régions peu fertiles, beaucoup plus qu'il n'y en aurait eu dans le cas contraire", assure à l'AFP le chercheur.

L'étude s'est concentrée sur l'Amazonie mais il juge probable que de tels transferts d'engrais ont eu lieu dans tout le continent sud-américain, ainsi qu'en Australie et d'autres régions du globe. Et à chaque fois, ces transferts ont stoppé avec la disparition de la mégafaune.

"Même si 12.000 ans, c'est une échelle de temps qui n'a pas grand sens pour la plupart des gens, avec ce modèle nous montrons que les extinctions qui sont survenues à l'époque continuent d'affecter aujourd'hui la santé de notre planète", estime M. Doughty.

D'après lui, le modèle conçu pour l'étude est également adapté à notre monde moderne. "Nous pouvons à présent calculer l'effet que cela aurait sur la fertilité du sol à long terme si des animaux comme les éléphants disparaissaient", dit-il.

"Si les humains ont contribué à l'extinction de masse des animaux géants voici 12.000 ans, alors nous pouvons en conclure qu'ils ont commencé à affecter l'environnement bien avant l'émergence de l'agriculture", relève de son côté Adam Wolf, chercheur en écologie à l'université américaine de Princeton, qui a participé à l'étude.

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