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Projet de loi 59: de la censure officieuse à la censure officielle

Le projet de loi 59 est liberticide. Quiconque ayant exprimé des propos perçus comme «incitant à la violence» pourra être dénoncé par n'importe quel quidam anonyme et pourra faire l'objet d'une enquête.
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Nous étions déjà habitués à naviguer prudemment dans une société marquée par une censure officieuse, celle de la rectitude politique qui contribue largement à immuniser les communautés socioreligieuses de toute critique. Mais nous nous accommoderons beaucoup moins aisément de la création officielle d'un Tribunal de la bonne conscience, celui que tente d'instaurer le projet de loi 59 visant supposément à lutter «contre les discours haineux et à accroître les mesures de protection des personnes».

Si les médias, au sujet de la loi 62, ont déjà souligné l'absence presque totale d'encadrement des manifestations du religieux au sein de l'État, c'est surtout le projet de loi 59 qui devrait retenir l'attention.

Une lecture attentive du projet de loi 59 révèle sa nature liberticide. Ce projet instaurera en effet un climat de méfiance généralisé néfaste à la liberté d'expression. Quiconque ayant exprimé publiquement des propos perçus comme «haineux» ou «incitant à la violence» à l'endroit d'un groupe «de personnes présentant une caractéristique commune» pourra être dénoncé par n'importe quel quidam anonyme et pourra faire l'objet d'une enquête de la part de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse.

Comme le projet ne définit pas explicitement ce qu'est un «discours haineux» ou «incitant à la violence», il conférera à la Commission un pouvoir arbitraire qui risque d'être influencé fortement par l'idéologie de la bien-pensance actuelle.

Le coupable d'un délit d'opinion sera condamné à une amende allant jusqu'à 10 000 $ en plus de figurer sur une «liste noire» des hérétiques. Le simple fait de figurer sur la liste officielle des personæ non gratæ pourra compromettre la carrière d'un individu, par exemple en nuisant à sa candidature auprès d'un employeur soucieux du respect du «vivre ensemble» ou simplement en ternissant sa réputation.

Dans les faits, ce projet de loi instaurera une culture de la délation qui desservira les groupes qu'il vise pourtant à protéger. La moindre critique de l'islam, du judaïsme, du catholicisme ou de toute autre religion pourra être considérée comme une manifestation de «haine» par n'importe quel esprit pointilleux ou malveillant, tout comme le moindre comportement jugé suspect d'un croyant pratiquant pourra faire l'objet d'une enquête.

À l'évidence, ce projet de loi sera inefficace pour contrer le terrorisme et freiner le départ de jeunes islamistes vers des zones de guerre où le djihad est mené. Il faudrait peut-être expliquer au gouvernement de Philippe Couillard que les islamistes ne diffusent pas publiquement leur discours haineux et que le propre du terrorisme et de la radicalisation est d'agir dans l'ombre.

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Mai 2017

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