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Le racisme imaginaire

L'obstacle final à l'intégration réside dans la discrimination bête et paresseuse, un manque d'intérêt à effectuer ce pas vers l'autre, à franchir la mince ligne de l'effort à accueillir.
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« Il n'y a qu'au Québec que l'on semble vouloir ignorer le sens des mots. Systémique ne veut pas dire « chronique » ou « sans répit ». Le mot ne renvoie pas à une société pourrie, à une gang de racistes impénitents, à une tache noire au palmarès des nations. On peut être des gens ouverts et tolérants, comme le professe M. Lisée, et quand même faire preuve de racisme systémique. Le terme fait plutôt référence à un « ordre établi » qui dicte la place qui nous est assignée selon des critères connus, mais souvent inconscients, tels le statut socioéconomique, le sexe et, oui, la race. Bref, le racisme et le sexisme sont systémiques, la bêtise, elle, comme la malhonnêteté intellectuelle, est individuelle. »

Voilà une jolie définition du mot « systémique ». Mais quand est-il du mot « racisme » ? Francine Pelletier, dans sa défense du projet de commission sur le racisme systémique fiévreusement défendu par Amir Khadir et Manon Massé, omet de le définir dans une chronique pourtant intitulée : Le sens des mots.

Alors, nous proposons cette définition du racisme : l'identification ou la supposition de déterminismes insurmontables liés à l'appartenance raciale.

Peut-on dès lors avancer que les distorsions observées au niveau de l'emploi ou de l'attribution de postes de gouvernance découleraient dans la société québécoise de croyances individuelles ou sociétales relatives à ces déterminismes insurmontables ? Non, évidemment. Est-ce que les causes de ces carences égalitaires peuvent raisonnablement s'expliquer par « un ordre établi » tout aussi vague que peu probant ? On peut en douter.

De tout temps, les sociétés ont fonctionné en réseaux. Réseau familial, scolaire, professionnel, sportif, amical, etc. Le réseautage est souvent la cause première de l'accès à un emploi. D'ailleurs, les politiciens devinent et pratiquent cette incontournable activité en côtoyant assidument les groupes d'intérêts, les groupes communautaires et autres associations d'envergures diverses afin d'asseoir leur « crédibilité électorale ».

Un immigré est ainsi démuni de cette facilité « sociale ». À cette difficulté s'ajoutent celles des compétences relatives à la communication générale, que ce soit au niveau de la langue ou des références culturelles globales.

Enfin, l'obstacle final à l'intégration réside dans la discrimination bête et paresseuse, un manque d'intérêt à effectuer ce pas vers l'autre, à franchir la mince ligne de l'effort à accueillir.

S'agit-il de racisme ? Non. L'État doit-il multiplier les commissions à débusquer un tel dérèglement de la société québécoise ? Encore moins.

Le premier chantier de l'État pour corriger la situation devrait être de mieux encadrer les associations professionnelles afin que les compétences des immigrés soient plus souvent reconnues. Trop d'immigrés formés et compétents se retrouvent dans des emplois ne nécessitant pas de qualification.

Sinon, l'instauration d'un programme de déductions fiscales aux entreprises qui offrent un emploi aux travailleurs dans leurs premières années d'immigration favoriserait une première embauche, un premier réseautage.

Tout le reste est une question de sensibilisation et d'éducation populaire.

Mais alors, d'où vient cette furieuse exaltation qui anime Québec solidaire ? En parfaite complicité avec l'agenda partisan du Parti Libéral ? Quel est donc ce mal qui accable la société québécoise comme nulle autre ?

Un peu d'histoire. De tout temps, les colonisateurs ont dénigré les velléités de prise en main politique des peuples asservis en les qualifiant de replis ethnocentristes, de refus ouverture à la « vérité » et de la « culture universelle » portée par le conquérant. Le Canada ne fait pas exception.

La particularité canadienne réside dans le fait que l'identité canadienne-anglaise, née au lendemain de la Première Guerre mondiale demeure fragile et peu ancrée lorsque le réveil politique souverainiste du Québec se manifeste au cœur des années 60.

Pierre Eliot-Trudeau, gagnant Ottawa afin de combattre la menace séparatiste, consolide alors cette identité canadienne en promulguant trois politiques déterminantes : le bilinguisme, le multiculturalisme et le rapatriement de la constitution. Trois politiques qui participent au même objectif, soit la négation du fait politique québécois (entre autres par le rejet de la notion historique des peuples peuples fondateurs)

Ainsi, le bilinguisme de Trudeau est un trompe-l'œil créé aux fins de dissimuler la force politique d'une communauté historique de 7 millions de francophones ; son multiculturalisme balaie sous le tapis la réalité d'une culture québécoise unique et rayonnante socialement et politiquement; et enfin, l'ignoble rapatriement de la constitution lui fournit l'occasion d'établir un cadre juridique contraignant au plus serré l'espace politique, ce que l'on nomme aujourd'hui : « le gouvernement des juges ».

Ces trois politiques motivées par le déni du fait politique québécois entraînent deux conséquences majeures pour les Canadiens du ROC : elles fondent leur identité sur une amnésie de la relation coloniale entretenue pendant deux siècles; elles enferment définitivement leur vision du Québec dans un discours néo-colonialiste où toute aspiration politique n'est qu'un repli ethnocentriste condamnable.

De là, les fréquents délires de ce « grand pays ridicule » (Foglia), tel le récent roman-savon de la série historique présentée par la CBC ou ces régurgitations coutumières des pires stupidités haineuses outrageant le peuple et les politiciens québécois.

Ainsi, il ne faut pas être dupes de l'enthousiasme des Khadir, Massé et Couillard à poursuivre le moindre couac islamophobe, fut-il imaginaire, le moindre grommellement inamical révélant l'atavisme raciste des fils de René Lévesque.

Leurs attaques de « racisme systémique » ou « d'islamophobie » ne sont que refontes des accusations de repli ethnocentriste proférées par le colon depuis les premiers temps de l'activisme « canadien-français ».

Leurs attaques de « racisme systémique » ou « d'islamophobie » ne sont que refontes des accusations de repli ethnocentriste proférées par le colon depuis les premiers temps de l'activisme « canadien-français ». Ces rengaines anti-québécoises remballées au goût du jour ne diffèrent que par l'usage d'un vocabulaire alambiqué et trompeur.

Ainsi ces reproches de projet insuffisamment « inclusif », ce « nous » jamais assez « inclusif » pour ces preux chevaliers de la croisade victimaire ne vaut guère plus que l'accusation « classique » de tribalisme accolée à nos velléités autonomistes.

Et que dire de l'affreuse locution: « nationalisme identitaire » ?

Le nationalisme non guerrier implique un constat ou une quête d'identité qui est en elle-même discriminante, puisqu'elle n'est dirigée que contre un groupe ou une autre nation particulière, mais bien forgée dans la recherche d'un bien collectif légitime acquis par la cohérence sociale et politique. Cette locution lancée à tout vent ne signifie rien. Strictement rien.

Les Québécois, Mme Pelletier, n'ignorent pas « le sens des mots ». Par contre, ils entendent depuis toujours les tentatives de déstabilisation de leur volonté démocratique. Et ils n'ont d'autres choix que de percevoir avec acuité les leurres démagogiques que leur proposent les politiciens qui détestent et craignent leur insoumission historique.

Une insoumission qui apparaît aujourd'hui plus que souhaitable face aux diktats nihilistes de l'hyperfédéraliste Couillard, face au bazar idéologique de Québec solidaire.

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Mai 2017

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