Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Les sociétés militaires privées: une alternative aux armées nationales?

Communément appelés ainsi en raison de leur vocation marchande, les SMP fournissent des services de sécurités aux gouvernements et aux organisations humanitaires dans des zones à risque ou réputées dangereuses.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Les missions de paix ont subi des transformations majeures dans les dernières décennies, notamment sous l'influence grandissante des sociétés militaires privées (SMP). Communément appelés ainsi en raison de leur vocation marchande, les SMP fournissent des services de sécurités aux gouvernements et aux organisations humanitaires dans des zones à risque ou réputées dangereuses.

L'actuel conflit en Syrie permet d'observer l'importance de ce phénomène devenu planétaire. C'est ainsi que des employés d'entreprises de sécurité localisées à Saint-Pétersbourg ont participé, en mars dernier, à l'assaut militaire ayant permis de reprendre la cité de Palmyre des mains de l'État islamique. Dans un contexte où les conflits ne sont plus directement pris en charge par les États, et se jouent très souvent à petite échelle, les sociétés militaires privées servent de substitut aux armées conventionnelles. Ces dernières sont habituellement employées pour partir en guerre contre un ennemi facile à cibler et à repérer.

Aujourd'hui, on hésite de plus en plus à sacrifier des vies humaines dans des guerres qui apparaissent lointaines, éloignées des préoccupations citoyennes. Un récent article du Journal Foreign Policy parle d'ailleurs de majorité silencieuse pour désigner les employés de sociétés militaires privées tués lors de missions menées à l'étranger. L'intervention militaire américaine au Moyen-Orient est révélatrice de ce phénomène qui prend de l'ampleur. Entre janvier et mars 2016, par exemple, 1540 employés de sociétés militaires privées ont été tués en Irak et en Afghanistan contre 1301 soldats américains durant la même période. On ne saurait évoquer la situation des SMP et celle du désengagement de l'État comme bras de l'armée sans parler du flou juridique qui entoure l'utilisation de ces entreprises de sécurité privées - autre terme pour désigner les SMP.

Il n'existe guère actuellement de tribunal militaire ou d'instance pénale pour juger l'activité des SMP, d'où les inquiétudes exprimées à ce sujet par l'ONU et autres instances transnationales. On reproche notamment le manque d'imputabilité des SMP dans un contexte où ils n'ont de comptes à rendre qu'à leurs clients. Si les SMP ne sont redevables qu'à ceux qui sollicitent leurs services, il devient en effet difficile d'établir un code juridique encadrant leurs pratiques à une échelle non seulement locale, mais internationale. Pourtant depuis 2012, il existe un code éthique destiné au SMP rédigé par l'Association du code de conduite internationale des entreprises de sécurité privées (ICoCA). Si cette dernière n'oblige aucune entreprise de sécurité à adopter ce code éthique, elle les incite à y adhérer sur une base volontaire. Il ne s'agit donc guère d'un mécanisme contraignant, mais bien d'une recommandation tout au plus destinée à ériger un consensus qui demeure fragile.

Le flou juridique lié au statut des sociétés militaires privées n'est donc toujours pas dissipé, puisqu'il n'existe aucun instrument juridique international encadrant officiellement leurs pratiques. Le fond du problème demeure donc entier, d'autant plus que les États y voient une alternative intéressante aux armées nationales qui sont coûteuses en ressources matérielles et en vies humaines.

À la différence des armées conventionnelles, les SMP sont amenés à intervenir pour des raisons mercantiles dans un contexte où le droit est souvent difficile à appliquer, voire inapplicable. L'externalisation du marché de la guerre en dehors des prérogatives des États prive la communauté internationale des moyens d'assurer le respect des droits humains en zones de guerres. Trop souvent, la violence se substitue au dialogue lors d'opérations essentiellement offensives peu soucieuses du bien-être des populations dont les droits sont systématiquement ignorés, pour ne pas dire purement et simplement bafoués. Autre signe de cette absence de réglementation: l'emploi d'enfants soldats par des entreprises de sécurité intervenant en sol étranger.

C'est ainsi qu'en avril dernier, l'on apprenait que l'entreprise britannique Aegis Defence Services aurait recruté depuis 2011 des enfants de la Sierra Leone pour intervenir directement en sol irakien. Cela est d'autant plus scandaleux que cette compagnie prétend souscrire aux conditions émises par le document de Montreux de 2008 qui prévoit des normes procédurières à l'adresse des États employant des sociétés militaires privées.

Force est de constater qu'il n'existe guère, à l'heure actuelle, d'organisations faisant de la sécurité sa priorité dans le contexte d'un marché déréglementé où les SMP peuvent intervenir à leur guise.

Au Québec, l'organisme à but non lucratif (Azøth) a récemment été créé dans l'objectif d'assurer la protection des convois humanitaires. À la différence des SMP, Azøth est un organisme à but non lucratif dont l'objectif n'est pas le profit, mais bien le respect des droits des populations avant toute autre finalité.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

MIDEAST-CRISIS/SYRIA-LATAKIA

Attentats en Syrie - 23 mai 2016

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.