Avec son nouvel album, Très souvent, je pense à vous, Patrick Bruel rend un hommage sensible et mélancolique à Barbara dont il reprend 15 classiques. Une belle façon pour le chanteur de dire tout son amour pour la Dame en noir qui a bercé les tendres années de son enfance. Rencontre.
Surprenant cet album que l’on n’attendait pas vraiment de la part de Patrick Bruel qui a gardé la surprise jusqu’au bout. À part L’aigle noir, reprise au Québec dans une version célèbre signée Marie Carmen, la chanteuse Barbara demeure une icône un peu oubliée du grand public.
«C’est vrai. À force de rendre Barbara intouchable et mythique, il n’y a pas eu beaucoup de gens qui ont voulu chanter ses autres pièces et ainsi perpétuer son répertoire», regrette Patrick Bruel en entrevue.
En effet, hormis L’aigle noir, les œuvres de Barbara restent plutôt méconnues chez les jeunes générations, une énorme injustice pour ce monument de la chanson française disparue en 1997.
«Quand je leur dis Barbara, ils me disent Barbara qui? Cela me rend dingue. Mais elle ne passe pas vraiment sur les radios. Donc au bout d’un moment son héritage musical commence à disparaître de la mémoire collective. C’est inacceptable puisqu’elle est la plus grande auteure, compositrice, interprète du 20e siècle. Alors, je suis content de jouer ce rôle de passeur.»
Plus qu’un passeur, Patrick Bruel partage surtout sa reconnaissance envers une artiste qui l’aura accompagné très jeune. «Grâce à ma mère, elle a toujours fait parti de ma vie. Barbara a été un compagnon de route au même titre que Brel, Ferré ou Brassens. Je l’ai découvert à 8 ans avec l’album Bobino. Depuis, je suis allé à tous ses concerts. Je n’ai cessé d’en parler et de la chanter. Je l’ai toujours évoqué.»
La richesse des textes
Les deux solitaires se sont rencontrés en 1990 au Théâtre Mogador. Bruel, jeune trentenaire déjà auréolé par le succès de son deuxième album Alors regarde, n’avait jamais caché son admiration pour Barbara.
«Je n’osais pas rentrer dans sa loge, se souvient-il. Je la connaissais par le biais de ses chansons et je pensais que cela me suffisait. Et puis, elle a ouvert la porte. "Enfin!", m’a-t-elle lancé. Je me souviendrais toujours de ce moment. On a beaucoup parlé et mes craintes se sont alors évaporées. On a ensuite gardé des liens très forts. Un jour, elle m’a envoyé un texte qui se terminait par la phrase: "Très souvent, je pense à vous, avec force et tendresse", ce qui a inspiré le titre de l’album.»
Cela fait quinze ans que Patrick Bruel gardait l’espoir de faire un jour ce disque. Le déclic s’est produit en janvier dernier sur la scène de l’Opéra-Garnier de Paris où il a interprété le titre Vienne entouré de l’orchestre symphonique.
«L’émotion avait été si puissante que je ne voulais pas en rester là. Mais je ne voulais pas faire non plus faire de l’imitation. Même si sa magnifique voix a toujours été présente en moi, il a fallu que j’oublie l’interprète. Je voulais aborder ses chansons à travers mon regard, mon point de vue et un peu de mon histoire aussi.»
Les titres phares se suivent: L'aigle noir, Dis quand reviendras-tu? Le mal de vivre, Göttingen, Du bout des lèvres, Nantes, Ma plus belle histoire d'amour, Mon enfance… la voix de Bruel se fait intime, parfois cassante avec quelques murmures. De l’électro et une dose de rock progressif, il y a également de l’audace dans plusieurs arrangements.
«J’ai chanté Barbara en découvrant la puissance de ces textes et j’ai compris pourquoi je l’aime tant. Ses chansons me parlent et me renvoie un miroir sur ma propre vie.»
Album Très souvent, je pense à vous
1 – Madame
2 – Drouot
3 – L’aigle noir
4 – Dis, quand reviendras-tu?
5 – Le mal de vivre
6 – Du bout des lèvres
7 – Vienne
8 – Ma plus belle histoire d’amour
9 – Nantes
10 – Perlimpinpin
11 – Göttingen
12 – Mon enfance
13 – Parce que je t’aime
14 – À mourir pour mourir
15 – Pantin
