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Stratégie pétrolière: le gouvernement Harper en difficulté

Le plan Harper pour l'avenir du pétrole a du plomb dans l'aile et l'entêtement du gouvernement à museler ses critiques est en train de lui faire perdre contact avec la réalité. Comme le disait Yogi Bera : « Le futur n'est plus ce qu'il était ». Il est temps pour ce gouvernement d'en prendre acte.
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Depuis son élection majoritaire en 2011, le gouvernement Harper a déployé de manière agressive une stratégie destinée à accélérer la croissance de l'industrie pétrolière albertaine. Cette stratégie consistait à lever les barrières réglementaires qui pouvaient ralentir la construction d'oléoducs, à bloquer toute action sur la question du climat, à organiser une campagne internationale de promotion des sables bitumineux, et à museler les scientifiques, les écologistes, les autochtones et les citoyens. Cette stratégie commence à se retourner contre lui.

La dernière semaine a été catastrophique pour Harper et le lobby pétrolier. Ce fut d'abord l'économiste de renommée internationale Jeff Rubin qui affirmait, dans le Globe and Mail, que « le rêve de faire du Canada une superpuissance énergétique partait en fumée ». Rubin appuie sa thèse sur plusieurs exemples. D'abord, Total E&P Canada, le bras canadien de la pétrolière française Total SA et ses partenaires Suncor Energy, Occidental Petroleum et la Japonaise Inpex ont abandonné le projet Joslyn North d'une valeur de 11 milliards $ qui devait extraire 100 000 barils par jour. Cette décision suit celle de Royal Dutch Shell de suspendre son projet à la mine Pierre River qui devait extraire 200 000 barils par jour. Dans les deux cas, les promoteurs n'ont pas réussi à trouver une manière de rendre leurs projets rentables.

Rubin affirme que ces annulations sont loin d'être les dernières. Il souligne que si ceux-ci ne sont pas rentables dans les conditions actuelles, comment pourront-elles l'être lorsque les marchés d'exportation commenceront à s'attaquer aux changements climatiques ? Selon Rubin, le premier ministre peut se conforter dans l'idée que les changements climatiques sont une fraude, mais le reste du monde ne le suivra pas dans son déni.

Les marchés financiers commencent d'ailleurs à s'intéresser au risque de dévaluation des actifs pétroliers si la communauté internationale commençait à réglementer plus sévèrement les émissions de gaz à effet de serre. Le Financial Times rapportait récemment qu'Exxon-Mobil avait été forcée par ses actionnaires à évaluer le risque financier associé à la dévaluation de ses actifs pour cause d'action sur le climat. La publication rapportait aussi qu'un assureur norvégien, Storebrand, désinvestissait le secteur pétrolier pour éviter de s'exposer à ce risque.

Le lendemain de l'intervention de Rubin, le président Obama annonçait un plan sans précédent pour réduire les émissions de gaz à effet de serre tout en invitant le Canada à emboîter le pas. Le principal partenaire commercial du Canada s'attaque directement à sa plus grande source d'émissions, les centrales au charbon, qui devront réduire leurs émissions de 30% d'ici 2030 par rapport au niveau de 2005, un effort considérable. Cette annonce fait tomber une pièce maîtresse du plan Harper qui affirmait depuis près d'une décennie vouloir s'aligner sur les États-Unis sur la question climatique. Le plan Obama laisse le Canada plus isolé que jamais non seulement sur le continent, mais aussi au plan international puisqu'il relance les négociations en vue d'un accord multilatéral plus tard cette année.

Et comme si la semaine n'était pas déjà suffisamment mauvaise pour le gouvernement Harper et ses alliés, 300 scientifiques, dont des récipiendaires de l'ordre du Canada, rejetaient les conclusions du panel mis sur pied par le gouvernement fédéral pour évaluer les impacts du projet d'oléoduc Northern Gateway sur la côte Ouest. Le verdict des scientifiques est dévastateur : le processus mis sur pied par le gouvernement Harper est biaisé, s'appuie sur des informations fournies par le promoteur sans expertise indépendante et omet des enjeux importants comme la question du climat. Le gouvernement contredit l'avis de ses propres scientifiques et s'appuie sur un plan de réponse à un déversement qui est inexistant. Aucune surprise, dans ce contexte, à ce qu'un sondage rendu public la même journée démontre que les trois quarts des citoyens de la Colombie-Britannique font confiance aux écologistes et aux autochtones dans ce dossier, alors qu'à peine la moitié accordent leur confiance au gouvernement et à Enbridge.

Le plan Harper pour l'avenir du pétrole a du plomb dans l'aile et l'entêtement du gouvernement à museler ses critiques est en train de lui faire perdre contact avec la réalité. Comme l'affirme Rubin dans son article, plutôt que de choisir une stratégie prudente, le gouvernement Harper a choisi de jouer quitte ou double sur le pétrole et il risque de perdre, entraînant avec lui l'économie et la réputation du Canada.

Comme le disait Yogi Bera : « Le futur n'est plus ce qu'il était ». Il est temps pour ce gouvernement d'en prendre acte.

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