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Blocage et polarisation dans le système politique américain

Au-delà d'une campagne électorale sans substance et de la démonisation des deux prétendants à la maison blanche, on est en droit de se demander si l'élection de l'un ou de l'autre des candidats pourra mettre un terme à la paralysie du système politique américain.
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Au-delà d'une campagne électorale sans substance et de la démonisation des deux prétendants à la maison blanche, on est en droit de se demander si l'élection de l'un ou de l'autre des candidats pourra mettre un terme à la paralysie du système politique américain.

Basé sur les «poids et les contrepoids» (checks and balances), le système concède au Congrès (chambre des représentants et Sénat) des pouvoirs considérables et donne aux élus une autonomie appréciable qui leur permet à la fois d'agir comme garde-fous contre les abus potentiels de l'exécutif (le président), et de représenter les meilleurs intérêts de leurs électeurs (districts ou États) et de la nation, au-delà des contraintes imposées par la discipline de parti. De son côté, l'électeur peut voter pour le candidat de son choix, indépendamment de ses allégeances politiques.

Le bon fonctionnement de la démocratie américaine repose en grande partie sur la propension des élus à collaborer au-delà des lignes de partis. Cela est d'autant plus vrai lorsque le président élu provient d'une formation politique (démocrate ou républicain), alors que l'autre parti détient une majorité en chambre et/ou au Sénat.

Longtemps considérée comme un modèle de stabilité et de transparence, la démocratie américaine traverse aujourd'hui des moments difficiles.

Avec un cycle électoral quasi permanent, des contrepoids tout aussi nombreux que complexes, une prolifération de groupes d'intérêts et une armature constitutionnelle très difficile à amender, le processus démocratique américain est fragile dans le meilleur des cas.

Longtemps considérée comme un modèle de stabilité et de transparence, la démocratie américaine traverse aujourd'hui des moments difficiles. Depuis le milieu des années 1990, la vie politique américaine est de plus en plus polarisée, les deux principaux partis refusent fréquemment de dialoguer et l'influence de l'argent ne cesse de croitre dans le processus électoral.

Selon ce qu'on observe depuis les 6 dernières années, notamment avec l'émergence du Tea Party (maintenant représenté en partie par le «Freedom Causus»), certaines factions minoritaires, mais bien représentées au Congrès placent la pureté idéologique au-dessus du consensus.

En effet, cette faction ultraconservatrice du parti républicain, qui privilégie une extrême rigueur fiscale, a mené les États-Unis au bord du défaut de paiement en 2011 et 2013. Une entente conclue non sans peine en 2015 a autorisé le relèvement du plafond de la dette jusqu'en 2017 et tout laisse croire qu'Hillary Clinton ne sera pas épargnée par ce genre de complications.

De la même façon, les mesures somme toute modestes proposées par le Président Obama pour mieux identifier les acheteurs d'armes, pourtant appuyées par une majorité d'Américains, ont été bloquées par des élus près de la National Rifle Association. Même le «Affordable Care Act» ou «Obamacare», sans doute l'héritage législatif le plus important du président, a fait l'objet de tellement d'amendements et de compromis que les États-Unis se retrouvent aujourd'hui avec un système beaucoup plus coûteux et moins efficace que prévu.

Les élus américains passeraient en moyenne 40% de leur temps à solliciter des fonds pour financer leurs campagnes.

La prolifération des lobbies et l'absence de réglementation des dépenses électorales ont permis aux groupes d'intérêts d'exercer une influence démesurée et corrosive sur la démocratie américaine. Selon certaines études, les élus américains passeraient en moyenne 40% de leur temps à solliciter des fonds pour financer leurs campagnes. Ces groupes ont des objectifs qui varient de l'opposition à toute augmentation des impôts ou des dépenses gouvernementales à la mise en place de réglementations sectorielles.

Déjà profondément insatisfaits de la performance du Congrès (les taux d'insatisfactions ont atteint les 80%), les Américains ont en plus dû subir la crise financière de 2008, le dérapage de l'intervention militaire en Irak, le déclin de leur pouvoir d'achat, l'explosion de la dette et la détérioration des infrastructures et du système d'éducation. Il n'est donc pas étonnant que cette insatisfaction se soit transformée en un vif ressentiment envers l'establishment politique et ait contribué à l'émergence de candidats hors-normes comme Donald Trump et Bernie Sanders.

La polarisation et la paralysie du système politique américain ne sont pas anecdotiques, elles représentent un réel danger pour la paix sociale aux États-Unis. L'idée même d'un programme législatif cohérent et ambitieux qui contribuerait à reconstruire la classe moyenne et éliminer l'extrême pauvreté, à l'image du «New Deal» de Roosevelt ou de la «War on Poverty» de Lyndon Johnson, est presque inimaginable aujourd'hui. Faute d'un tel programme, on peut penser que la colère des Américains, qui est principalement liée à leur situation économique, ne fera que grandir dans les prochaines années.

Dans ce contexte, Hillary Clinton, qui va sans doute l'emporter malgré le fait que la course se soit resserrée à quelques jours du scrutin, devra absolument reprendre au moins l'une des deux chambres (les démocrates ont une chance d'obtenir une majorité au Sénat), sans quoi elle aura beaucoup de difficultés à mettre son programme en pratique. Et comme il s'agit de l'une des plateformes les plus progressistes de l'histoire récente du parti démocrate, sous l'influence d'une aile gauche de plus en plus vigoureuse (l'axe Sanders-Warren), la déception et la discorde pourraient facilement s'installer chez les démocrates dans l'optique d'une présidence Clinton axée sur les compromis et les demi-mesures.

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