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Climat et Santé: Il y a urgence d'agir

Du 27 au 29 août dernier, plus de 400 délégués, incluant une vingtaine de ministres de la santé nationaux, plusieurs experts, et quelques membres de la société civile se sont réunis pour discuter des nombreux impacts qu'ont les causes et les conséquences des changements climatiques sur la santé humaine. Le constat est clair: il y a urgence d'agir et les professionnels de la santé doivent montrer l'exemple.
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Il y a quelque temps, j'ai décidé d'interrompre mes études médicales pendant un an. Les raisons sont multiples, mais l'une de mes motivations principales était d'explorer la santé hors des murs de l'hôpital, dans un environnement plus flexible, plus multidisciplinaire, plus global. J'ai fixé le cap sur Genève, cette ville qui vit de santé mondiale et du développement de politiques internationales. Déjà arrivée et à peine installée, j'avais les deux pieds dans les bureaux principaux de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour y représenter plus d'un million d'étudiants en médecine d'à travers le monde à la toute première conférence de l'OMS sur le climat et la santé.

Ainsi, du 27 au 29 août dernier, plus de 400 délégués, incluant une vingtaine de ministres de la santé nationaux, plusieurs experts, et quelques membres de la société civile se sont réunis pour discuter des nombreux impacts qu'ont les causes et les conséquences des changements climatiques sur la santé humaine. Le constat est clair: il y a urgence d'agir et les professionnels de la santé doivent montrer l'exemple.

J'ai eu la chance de m'entretenir avec Dr. François Reeves, cardiologue d'intervention au CHUM et auteur du livre "Planète Coeur", et avec Yassen Tcholakov, étudiant en médecine à l'Université de Montréal et membre d'IFMSA-Québec. Je vous livre quelques de leurs réflexions.

Pourquoi en tant que membre de la profession médicale, vous vous sentez interpellés par le débat sur les changements climatiques et la santé?

Yassen Tcholakov (YT) : Les impacts négatifs sur la santé des changements climatiques sont indéniables. J'ai la profonde conviction qu'en tant que médecins, nous avons une responsabilité morale de nous prononcer au sujet des enjeux clés pour le bien-être de la population. Les étudiants en médecine sont des acteurs uniques dans ce débat complexe, étant capables de vulgariser les connaissances scientiques et de porter la voix d'une jeunesse ambitieuse et éclairée.

Dr François Reeves (FR): C'est d'abord la reconnaissance de l'environnement comme facteur de risque significatif et modulable pour la santé cardiaque qui m'a interpellé. Il y a tant d'études bien faites et pourtant si peu connues, que nous ne pouvons rester ignorants de ces faits. Nous devons les disposer dans un tout cohérent, et y expliciter les interactions avec la nourriture industrielle et notre mode de vie. Nous réalisons qu'avec des mesures environnementales, nous gagnons énormément en santé publique.

Dr Reeves, dans votre livre "Planète Coeur", vous parlez beaucoup du lien entre l'environnement et les maladies cardiaques. De quelles autres façons le climat, et plus particulièrement les changements climatiques, affectent-ils la santé de la population?

FR: Il faut d'abord comprendre que les changements climatiques et l'agression des polluants sur nos artères partagent la même source principale, soit l'usage massif des combustibles fossiles qui constituent aujourd'hui 85 % du portefeuille énergétique de la Planète. L'OMS l'a annoncé: il y a eu en 2012 sept millions de décès prématurés, soit un huitième de toutes les mortalités, causés par la pollution de l'air. Même au Canada, il y a plus de 20,000 morts excédentaires attribuables à l'environnement. Les changements climatiques en installation augurent des moments difficiles. Pensons aux 70,000 morts de la grande canicule d'Europe en 2003. Ou aux 10,000 Moscovites morts en une semaine l'été 2010, suite à sécheresse et d'importants feux de forêt. L'ensemble des changements (tempêtes, sécheresses, réchauffement, inondation, feux de forêt, etc.) est une menace aux infrastructures. La Banque Mondiale estime ces dommages à venir à plus de 6500 milliards de dollars.

Yassen, quelles sont, selon toi, les principales préoccupations de la jeunesse dans ce débat?

YT: Les jeunes sont concernés par tous les aspects du débat sur les changements climatiques, la santé étant certainement un aspect important. Toutefois, les jeunes ont la particularité d'amener au débat une certaine naïveté qui leur permet d'entrevoir des solutions plus ambitieuses. Leurs perspectives s'ancrent dans une vision beaucoup plus à long terme, car c'est nous qui hériterons de la Terre dans les prochaines décennies. Aussi, nous avons également la capacité d'exprimer haut et fort toutes nos idées, car nous ne sommes pas enchaînés politiquement parlant.

Selon vous, comment est-il possible de transformer cette grande menace à la santé en une opportunité pour améliorer la vie des individus?

YT: La santé environnementale est une science complexe, et il est parfois trop simple d'attribuer certains comportements à de mauvaises habitudes individuelles, plutôt que de considérer l'effet de l'environnement dans lequel évolue l'individu. Nous devons passer à l'action, et traduire les concepts scientifiques que nous possédons en politiques favorisant la création d'environnements sains. L'éducation est définitivement l'une des clés, mais un traité international fort et restreignant est nécessaire.

FR: La question donne la réponse: si on corrige la dérive environnementale, ses causes et ses répercussions, le milieu, donc la qualité de vie s'en trouve améliorée. Partout où des efforts ont été faits dans ce sens, on observe des gains en santé, qualité et espérance de vie.

Nous avons continué à discuter pendant quelque temps, mais une chose est certaine: nous n'avons plus à débattre des chiffres, des faits, de la science. Tout est là, et nous les connaissons. Les effets sociaux, économiques, politiques et sanitaires sont tels qu'il nous est aujourd'hui impérial d'agir. Heureusement, ce ne sont pas les pistes de solutions qui manquent et nous avons la possibilité de pouvoir redessiner l'environnement dans lequel nous vivions. Nous pouvons faire le choix de transférer nos investissements vers les énergies vertes et renouvelables, plutôt que de continuer d'encourager l'industrie des combustibles fossiles. Nous pouvons nous doter de politiques publiques concertées, afin de répondre à nos aspirations d'offrir à tous la chance de grandir, de croître, et de vieillir en santé. Nous avons le choix d'agir.

Je termine en demandant à Dr. Reeves si nous devons être optimistes face au futur en ce qui a trait à la lutte aux changements climatiques, ce à quoi il me répond:

Je reprends la réponse d'Hubert Reeves, qui a ce jour me semble la meilleure: l'important n'est pas d'être optimiste ou pessimiste, l'important est d'être déterminé.

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