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Est-ce toujours à propos de commémorer l'action des Patriotes?

Que nous inspirent les Patriotes de 1837-38? Quelle résonnance ont-ils chez les Québécois? Si ces questions sont simples, les réponses ne sont guère aisées à formuler, car la grande majorité des Québécoises et des Québécois ne connaît pas cette partie de l'histoire.
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Que nous inspirent les Patriotes de 1837-38? Quelle résonnance ont-ils chez les Québécois? Si ces questions sont simples, les réponses ne sont guère aisées à formuler, car la grande majorité des Québécoises et des Québécois ne connaît pas cette partie de l'histoire. Elle ne connaît pas les raisons profondes du combat qu'ils ont livré. Et pourtant, ils ont lutté pour l'instauration d'un gouvernement responsable, c'est-à-dire pour l'instauration d'un gouvernement élu démocratiquement par le peuple.

À cette époque, le Bas-Canada est une colonie dirigée par un gouverneur qui garde le contrôle de l'exécutif et du législatif. Il est le représentant du pouvoir britannique et de l'oligarchie marchande composée exclusivement d'anglophones. C'est lui qui nomme les fonctionnaires aux postes clefs. La majorité canadienne n'a pas droit au chapitre. En 1834, 92 résolutions sont présentées par les députés canadiens afin de régler l'ensemble de ces problématiques. Mais en 1836, le ministre britannique de l'Intérieur, John Russel, refuse en bloc les demandes des Canadiens. Pire, le gouverneur, Lord Aylmer, pourra adopter des mesures budgétaires sans même passer par l'assemblée coloniale. Enfin, le blocage de la loi scolaire cette même année par sept députés protestants achève de mettre le feu aux poudres. Le conflit passera donc par les armes.

Si les Patriotes rassemblés par Louis-Joseph Papineau et Wolfred Nelson remportent la première bataille à Saint-Denis, ils ne font pas le poids lors des batailles de Saint-Charles et Saint-Eustache. Sur le plan militaire, ils n'avaient ni les armes, ni l'expérience pour s'opposer à l'armée britannique. Aucun de leurs officiers ne connaissait les arts de la guerre. Mais plus important encore, ils n'avaient pas le soutien de la population. Même si certains ecclésiastiques rejoignent les Patriotes, Mgr Lartigue, qui mange dans la main des Anglais, réussit à faire en sorte que ses curés ne sortent pas du rang. En condamnant l'action des Patriotes en chaire, il a largement contribué à leur échec.

En 1838, Robert Nelson, exilé aux États-Unis avec d'autres Patriotes, organise l'invasion du Bas-Canada. Mais encore une fois, l'entreprise échoue. Les Patriotes sont défaits facilement lors des batailles de Beauharnois, Lacolle et Odelltown. Si Nelson et les principaux dirigeants échappent à la justice britannique, ce n'est pas le cas de 12 de ses hommes qui seront pendus dans la cour de la prison du Pied-du-Courant à Montréal. D'autres seront exilés en Australie. La défaite est consommée.

Évidemment, la défaite ne trouve pas beaucoup de résonnance dans l'imaginaire populaire, à moins que celle-ci soit glorieuse à l'image de celle de Dollard des Ormeaux au Long Sault (21 mai 1660). Car avant de fêter l'action des Patriotes, les Québécois commémoraient le mythe de Dollard, tombé aux mains des Iroquois afin de sauver la colonie naissante de la Nouvelle-France. Du moins, c'est là la version donnée par l'abbé Lionel Groulx, l'homme à l'origine du mythe. Si Dollard fut longtemps célébré comme un héros, s'il fut la figure emblématique de plusieurs générations de Canadiens-Français, il est tombé dans l'oubli au cours des années 60 et 70. La cause de cette déchéance réside très certainement dans le rejet par les Québécois des valeurs de l'Église et des mythes qu'elle a construits.

Afin de relancer la ferveur nationaliste, surtout après l'échec référendaire de 1995, Bernard Landry propose une motion invitant l'Assemblée nationale à souligner «l'importance de la lutte des patriotes de 1837-1838 pour la reconnaissance de notre nation, pour sa liberté politique et pour l'établissement d'un gouvernement démocratique.» L'histoire encore au service de la cause indépendantiste, la fête des Patriotes est «célébrée» pour la première fois le 19 mai 2003.

Mais quand j'écris «célébrée», c'est là un bien grand mot. Car cette fête n'a jamais véritablement eu d'écho chez la vaste majorité des Québécoises et des Québécois. La greffe n'a jamais pris. Et de fait, il faut bien se l'avouer, ceux qui la soulignent sont généralement des souverainistes purs et durs.

À Sherbrooke par exemple, elle ne rassemble qu'une poignée de personnes et bien entendu, ce sont toujours les mêmes. Tous sont membres du Parti Québécois ou de Québec Solidaire. L'option souverainiste étant en berne, je pense que cette fête n'a pas beaucoup d'avenir. Les gens la prennent pour ce qu'elle est: un jour férié. Dommage toutefois que le combat des Patriotes ne soit pas davantage apprécié. Il faut se rappeler qu'ils se sont d'abord battus pour l'avancement de la démocratie et la reconnaissance d'un peuple et ce combat, peu importe nos opinions politiques, nous rejoint toutes et tous. En cela, il est toujours pertinent de se souvenir de ceux qui sont mort pour que la liberté triomphe.

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