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François Perreault, ex-VP chez Genivar : 17 fausses factures découvertes

17 fausses factures découvertes chez Genivar
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Genivar a eu recours à de la fausse facturation des années durant, au milieu des années 2000, pour pouvoir faire du financement politique municipal, a admis un ex-vice-président, mercredi, devant la Commission Charbonneau.

François Perreault, qui a été vice-président de Genivar jusqu'à vendredi dernier, a assuré que si la firme donnait aux partis politiques, c'est parce qu'elle était sollicitée pour le faire. "Si on n'avait pas joué le jeu, je ne crois pas qu'on aurait survécu dans ce monde-là. C'est presque une obligation" au municipal, a-t-il lancé.

En 2010, lorsque Radio-Canada a diffusé un reportage sur de la fausse facturation, Genivar a déclenché une enquête interne. Celle-ci a permis de découvrir 17 fausses factures datant de 2005 à juillet 2009, autorisées et signées par les hauts dirigeants, dont lui-même.

Ces entreprises qui avaient émis de fausses factures à Genivar n'avaient en fait jamais rendu ces services. Il s'agissait d'"entreprises éphémères", qui ont pu exister temporairement puis sont disparues, a-t-il expliqué. La fausse facture était imputée à un projet donné de Genivar pour qu'elle semble plus plausible.

Il pouvait même s'agir d'un projet réalisé pour le ministère des Transports du Québec, alors que l'argent servait à du financement municipal, a-t-il admis. Mais jamais les coûts n'ont été refilés au client, le donneur d'ouvrage, a-t-il assuré.

Les bureaux de Montréal et de Laval de Genivar ont participé au stratagème, a précisé le témoin.

M. Perreault n'a jamais mis ses supérieurs au courant. Il a affirmé en avoir payé le prix, lorsque le stratagème a été découvert, ayant été privé de son boni de 100 000 $. Il a aussi remis sa lettre de démission vendredi dernier.

M. Perreault a estimé que Genivar a donné de "300 000 $ à 400 000 $" au fil des ans à Bernard Trépanier, l'ancien responsable du financement à Union Montréal, le parti au pouvoir.

Il a avoué s'être parfois demandé si M. Trépanier n'en gardait pas pour lui, mais comme Genivar obtenait effectivement les contrats qu'il lui avait dit que la firme obtiendrait, tout semblait marcher.

D'autres cadres de Genivar ont nécessairement été mis au courant du stratagème, mais tous ont fermé les yeux, n'ont pas posé de questions ou n'ont pas voulu savoir, a-t-il résumé. "On n'était pas très à l'aise de faire ça", a-t-il convenu. Et les autres firmes de génie aussi se seraient passées du système, si elles avaient pu s'en passer, a-t-il laissé entendre.

"Toutes les firmes avaient l'appât du gain et peu de conscience sociale, parce que si on avait eu une conscience sociale, il y aurait eu quelqu'un qui aurait dénoncé le système", a lancé la juge France Charbonneau.

Le procureur de la commission, Me Paul Crépeau, lui a demandé pourquoi il ne s'en était pas ouvert au maire Gérald Tremblay, s'il était si mal à l'aise. "On était conscient que ça ne durerait pas; ça ne pouvait pas ad vitam aeternam durer comme ça. C'était quand même très lourd à supporter", a-t-il expliqué, lui qui a déjà dit que toutes les firmes de génie qui avaient de gros mandats avec la Ville y participaient, à l'époque.

"Comment un tel système avec autant de joueurs a pu fonctionner si longtemps?" s'est étonné le commissaire Renaud Lachance. M. Perreault n'a pu répondre, mais a admis lui-même qu'"à Montréal, c'était exagéré" et que le système avait "atteint des sommets".

Guerre de prix

La collusion entre firmes de génie a pris fin, selon lui, en 2009 avec l'escouade Marteau et la multiplication des reportages dans les médias. Mais depuis, on assiste à une guerre de prix telle, entre firmes de génie, que la qualité du travail s'en ressent.

"Aujourd'hui, ce n'est pas mieux, parce que même s'il n'y a plus de collusion, il y a une guerre de prix incroyable, et puis vous n'y gagnez pas. Les municipalités n'y gagnent pas. Ce n'est pas vrai qu'on peut faire faire des services d'ingénierie à 50 pour cent des barèmes, 30 pour cent des barèmes et ne pas perdre sur la qualité du projet en bout de ligne", a-t-il opiné.

Pour ce qui est du financement par le biais de participation à des cocktails ou des petits-déjeuners, M. Perreault a admis que lui et sa conjointe ont fait des dons, à la fois à Union Montréal et à Vision Montréal de 2000 à 2009. "Ce n'était pas par conviction politique, c'était par opportunisme", a-t-il avoué.

Après M. Perreault, la commission entendra cette semaine Charles Meunier, ingénieur dans une autre firme de génie, BPR, puis André Noël, l'ex-journaliste d'enquête du quotidien La Presse devenu enquêteur à la Commission Charbonneau.

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