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Marc Lévy publie «Une autre idée du bonheur» (ENTREVUE)

Un 15e roman pour Marc Lévy (ENTREVUE)
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Christian Geisselmann.

L’auteur français Marc Lévy était de passage à Montréal pour présenter son 15e roman, Une autre idée du bonheur. Il nous a parlé de sa notion de la liberté, de son rapport à l’écriture et à la langue et de la pression du succès. Entrevue intime entre deux avions.

Pourquoi écrivez-vous?

En ce qui me concerne, j’écris pour dire à voix basse ce que je n’ai jamais été capable de dire à voix haute, parce que je suis quelqu’un de très timide et très pudique. Je n’aime pas parler de moi, je déteste ça. C’est lié à l’éducation. Une forme de culpabilité de parler de soi, même dans le cercle intime d’ailleurs. J’ai commencé par le piano. Quand j’avais 15 ans, j’écrivais de la musique. Ce que je n’arrivais pas à dire à voix haute, je le disais avec le piano. Je jouais beaucoup. J’ai grandi dans un milieu où il n’y avait pas de tabous par rapport à la musique, parce qu’elle était considérée comme un truc secondaire. Alors que l’écriture était beaucoup trop sacralisée. Si à 15 ans j’avais dit que j'allais m’exprimer par l’écriture, immédiatement il y aurait eu cette sanction: «Tu te prends pour un écrivain maintenant?» Il y avait un tabou, un interdit.

À 39 ans, après avoir réalisé une partie de ma vie, je me suis senti assez fort pour me dire: «Maintenant j’écris». L’écriture est un combat contre la pudeur, c’est une façon de dire à voix basse ce qu’on n’arrive pas à dire à voix haute aux autres et même parfois aux siens d’ailleurs. Avec l’espoir caché, un peu tordu, qu’ils le découvrent à travers les lignes, maintenant ou plus tard. J’ai écrit Et si c’était vrai pour mon fils, mais aussi pour moi-même, pour dire des choses à voix haute qui étaient impossible à entendre à voix basse. Parce qu’il y a des choses que vous pouvez faire dire à vos personnages que vous ne pourriez pas dire vous-mêmes à voix haute sans passer pour un donneur de leçons de morale. Celui qui dépasse du rang se fait taper sur la tête.

Rencontrez-vous des difficultés du fait que vous vivez dans un pays anglophone et que vous écrivez en français?

Ça arrive, mais c’est un exercice passionnant. Parce que, bien sûr, quand on vit dans un pays ou la langue est différente, il arrive de tomber sur des formules linguistiques où l’on se dit: «qu’est-ce que c’est facile de dire ça en anglais! Qu’est ce qu’on pourrait trouver comme expression française?» Mais, c’est un jeu assez stimulant et assez amusant que de chercher le bon mot, la bonne formule, la bonne combinaison de mots, voire même parfois de s’autoriser des déviations. Une langue est vivante tant qu’on la torture un peu, tant qu’on la stimule. Il ne faut pas sombrer dans le carcan académique.

Comment faites-vous pour écrire et vivre avec la pression du public?

On ne fait pas. Il n’y a rien à faire. Je vais être très franc avec vous: quand on a un public à l’ère du zapping et d’Internet, on n’a pas un public. Parce que le public est à la fois fidèle et infidèle. C’est-à-dire que si vous le trahissez ou le décevez, une fois ça va, mais si vous le décevez deux fois, c’est mort. Votre public passe à autre chose. Et même si vous ne le trahissez pas ou ne le décevez pas, c’est dans l’air du temps de passer à autre chose. Même moi qui suis dingue de Romain Gary, s’il en avait publié 40, je ne sais pas si je les aurais tous lus.

Après il y a deux choix, qui ne sont pas irréversibles. Il y a un choix qui est de s’inscrire dans une ligne éditoriale comme Agatha Christie, Maigret, San Antonio... On retrouve un peu toujours la même thématique, le même univers. C’est un choix qui n’est ni mieux, ni moins bien que celui de faire un truc à chaque fois différent. Ça, c’est un truc qui plaît moins aux éditeurs! (Rires)

Mon seul trac, ce serait de raconter deux fois la même histoire. Par exemple, ça fait des années que je crève d’envie, mais vraiment, de retrouver Arthur et Lauren et de faire un tome trois avec Si c’était vrai. Mais tant que je n’ai pas trouvé une histoire à leur donner qui n’ait rien à voir avec les premiers, je ne le ferais pas. Parce que si c’est pour écrire une deuxième fois une histoire, je n’en ai pas envie. La pression pour moi, ce n’est pas le nombre de lecteurs, la pression c’est de me dire est-ce que je vais m’ennuyer en écrivant cette histoire? Est-ce que je vais autant m’amuser? Est-ce que je vais encore plus m’amuser que la fois d’avant?

Le thème de la liberté est très présent dans ce livre, que représente-t-il pour vous?

La possibilité de se remettre en question en permanence et à tout moment. Si on est libre de se remettre en question, on est vraiment libre. C’est extraordinaire. Si vous vous êtes enfermé dans une vie et que vous ne pouvez plus en sortir, alors vous avez perdu votre liberté. C’est tout ce que raconte Agatha dans mon roman. Ce que le gouvernement américain a trouvé dans les années 50, le moyen de contrôler la population en créant une société modèle dont le citoyen devient dépendant. Quand on a réussi à conditionner toute une génération en lui laissant entendre que le bonheur, c’est le petit pavillon de banlieue, comme on le voit dans les films américains des années 60, la belle voiture, telle robe pour les femmes, tel costume pour les hommes, on a rendu les gens dépendant d’un modèle de société. Tout à coup, celui qui disait «Je n’ai pas envie de ça» passait pour un utopiste.

Donc oui, se remettre en question, c’est la vraie liberté. C’est très important de pouvoir changer de condition. Moi j’ai changé quatre fois de vie professionnelle, quatre fois de statut. Je garde des souvenirs très amusés du regard que la société portait sur mes changements. Tout le combat de la vie que l’on mène, c’est d’être le gardien de sa propre identité, au-delà de toutes les apparences et des regards. C’est le plus grand espoir de la vie. C’est un exercice extrêmement difficile, beaucoup plus qu’il n’y paraît et qui, je crois, est au faite des plus grandes évolutions de la société.

Une autre idée du bonheur, Marc Lévy, Éditions Robert Laffont/Versilio

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