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La CAQ, entre opportunisme et responsabilité

Malgré l'importance de prendre une décision responsable dans le dossier linguistique, la CAQ semble plutôt s'affairer à des calculs politiques.Plus particulièrement, elle semble tomber dans le même panneau que l'ADQ de Mario Dumont de 2007. En posant des objections sur tout, en n'appuyant rien, mais en se disant tout de même «ouverte», la Coalition prolonge inutilement le suspense.
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Radio-Canada.ca

Que se passe-t-il ces jours-ci à l'Assemblée nationale? Rien de semble filtrer. Rien en effet, puisque les députés du Parti libéral boudent. Ils boudent parce qu'on leur parle encore de langue. Cette satanée langue à la source de tous leurs problèmes. Ils boudent en prolongeant indument les travaux afin de retarder le vote en première lecture du projet de loi 14 destiné à réparer la Charte de la langue française. Eux qui n'ont même pas attendu la commission parlementaire pour annoncer qu'ils s'y opposeront de toute façon. Eux qui considèrent l'érosion du français comme un mythe et qu'il faut absolument préserver la paix linguistique (elle-même justement assurée par la loi 101).

Décidément, la hargne du PLQ envers la défense du français ne semble pas connaître de fin. Ces 50 députés libéraux n'ont apparemment aucun égard envers leur responsabilité historique, ni la moindre conscience nationale. Un bel exemple nous en est encore fourni aujourd'hui même par la députée de Hull, Mme Maryse Gaudreault, qui démontre candidement son mépris de sa propre culture en pleine Assemblée nationale:

Pour moi l'apprentissage de l'anglais a été une des conséquences (sic) de mon arrivée ici à l'Assemblée nationale, et je me demande encore pourquoi des gens voudraient empêcher des parents de permettre à leurs enfants de fréquenter une école anglaise. [Or], on le sait, ce n'est pas possible à cause de la loi 101.

La députée étale crument sa profonde ignorance des enjeux linguistiques nord-américains où, de toutes parts, les francophones du Québec sont cernés par 400 millions d'anglophones. À l'entendre, si 50 000 immigrants par année souhaitent s'angliciser, pourquoi la loi 101 devrait-elle les en empêcher? Combien d'années donnez-vous encore au français si on mettait en pratique le sage conseil de la députée de Hull?

Si la cause du PLQ est entendue, on est beaucoup moins certain de comprendre où s'en va la Coalition Avenir Québec dans le dossier linguistique. Les 19 députés de la CAQ tiennent pourtant le sort du projet de loi linguistique entre leurs mains et devront en porter la responsabilité. Il est essentiel que chaque électeur et électrice regarde très attentivement comment cette jeune formation politique assumera ses responsabilités face à l'avenir du français.

Par conséquent, François Legault, Daniel Ratthé, André Spénard, Marc Picard, Denise Trudel, vous avez été élus dans des comtés francophones et vous êtes présentés en campagne électorale comme des nationalistes. Cette semaine encore, en plein Huffington Post, un de vos maîtres à penser, M. Mario Asselin écrivait que : « Le parti québécois n'a pas le monopole de la défense et de la promotion de la langue française.» Jamais vous n'aurez une aussi belle occasion de respecter votre parole. Jamais vous ne pourrez mieux vous démarquer du Parti libéral ni mieux démontrer que vous avez le Québec à cœur.

Quant à Stéphane Le Bouyonnec, Christian Dubé, Nathalie Roy, Michelyne St-Laurent , vous avez été élus sous une étiquette fédéraliste, mais cela ne vous commande pas de renier le combat mené par vos mères et vos pères depuis quatre siècles. Nous autres francophones, n'avons qu'une seule grande ville, un seul centre international qui nous met en contact avec le monde. Sans Montréal, le Québec français est voué à se replier sur lui-même, sans capacité d'intégration ni de pouvoir d'attraction pour les nouveaux arrivants. Il faut impérativement franciser les petites et moyennes entreprises de Montréal.

Justement, Donald Martel, Jacques Marcotte, Jacques Duchesneau, vous craignez que la francisation des entreprises de cinquante employés et moins provoque de la paperasse. Ces entreprises sont pourtant celles où se retrouvent le plus les néo-québécois, le lieu privilégié de leur francisation. La paperasse, nous la sauverons quand ces néo-québécois sauront aussi s'exprimer dans la langue normale du Québec. La paperasse nous la sauverons surtout quand on se sera débarrassé d'un gouvernement de trop au Québec.

Au fait, Gérard Deltell, François Bonnardel, Sylvie Roy, lâchez-nous avec vos étiquettes de «Caribous», de «nationaleux» et de «fanatiques», tout juste bonnes à émoustiller les radios-poubelles. Face au recul du français, nous sommes tous égaux et, devant la puissance de la culture et de la langue anglaise, nous sommes tout autant Cajuns, Métis, Francaskois et Acadiens.

Oui, Hélène Daneault, Éric Caire, Sébastien Schneeberger, Sylvain Lévesque, votre droit à être consultés et considérés dans le cadre d'un gouvernement minoritaire est pleinement légitime. Tous les députés de l'opposition qui ont à cœur la survie de la culture française au Québec ont cependant le devoir de se rallier aux mesures minimales proposées par le projet de loi de la ministre De Courcy, et faire en sorte que quatre siècles d'enracinement en Amérique ne soient pas balayés par pur opportunisme politique.

Malgré l'importance de prendre une décision responsable dans le dossier linguistique, la CAQ semble plutôt s'affairer à des calculs politiques.Plus particulièrement, elle semble tomber dans le même panneau que l'ADQ de Mario Dumont de 2007.

Rappelez-vous. Propulsé à la tête de 40 députés et tenant entre ses mains le sort du gouvernement minoritaire de Jean Charest, Mario Dumont avait choisi de se donner de l'importance en montrant qu'il pouvait faire plier le gouvernement lors du vote sur le budget. Le résultat a été que Jean Charest avait alors démasqué l'amateurisme et l'opportunisme politique de l'ADQ et lancé sa campagne de 2008 «les deux mains sur le volant». On connaît la suite pour l'ADQ.

La CAQ de François Legault semble vouloir rejouer dans le même film. En posant des objections sur tout, en n'appuyant rien, mais en se disant tout de même «ouverte», la CAQ prolonge inutilement le suspense aux seules fins d'attirer l'attention des médias et de se présenter comme le parti du compromis.

Désolé, mais les compromis ont déjà été faits et c'est à peine si le projet de loi De Courcy satisfait les nationalistes sincères. À tergiverser pour se donner de l'importance, la CAQ semble en fait sur le point de faire l'ultime démonstration de sa profonde insignifiance en matière de langue, de culture et d'identité.

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La Loi 101 au Québec
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Camille Laurin lors de son entrée à l'Assemblée nationale, le 27 avril 1977, jour où il déposa son projet de loi sur la langue française. (credit:PC)
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Un vétéran de la Seconde guerre mondiale proteste contre la Loi 101. (credit:PC)
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Camille Laurin appose un badge YES sur le veston de René Lévesque, lors de la campagne du référendum sur l'indépendance du Québec en février 1980. (credit:PC)
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Camille Laurin s'adresse au caucus du PQ lors du 20ème anniversaire de la Loi 101, célébré le 26 août 1997. (credit:PC)
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Un restaurateur montréalais montre les sous-bock en anglais qui lui ont valu, en mars 2000) d'être réprimandé par les inspecteurs de l'Office de la langue française. (credit:PC)
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Gilles Duceppe, Louise Harel et Pauline Marois en tête de la manifestation montréalaise organisée le 26 août 2007, pour les 30 ans de la Loi 101. (credit:PC)
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Des partisans de la Loi 101 manifestent pour la défense de la Charte de la langue française, le 26 août 2007 à Montréal. (credit:PC)
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Un défenseur du Québec francophone, lors de la manifestatiom organisée pour les 30 ans de la Loi 101. (credit:PC)
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Le premier ministre Jean Charest, le 3 juin 2010, lors d'un débat houleux à l'Assemblée nationale portant sur une décision de la Cour supérieure qui a autorisé les enfants de neuf familles à fréquenter une école anglophone. (credit:PC)
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Pauline Marois, le 3 juin 2010, lors d'un débat houleux à l'Assemblée nationale portant sur une décision de la Cour supérieure qui a autorisé les enfants de neuf familles à fréquenter une école anglophone. (credit:PC)
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L'édifice de l'Office québécois de la langue française, à Montréal, porte le nom du père de la Loi 101. (credit:PC)
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Le député indépendant, et ex-péquiste, Pierre Curzi présente, le 27 mai 2012, un projet de loi visant à modifier la Charte de langue française qui élargirait la portée de ses dispositions. (credit:PC)
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La ministre responsable de la Charte de la langue française, Diane De Courcy, a présenté le 5 décembre 2012 un projet de loi visant à modifier la Loi 101, et notamment à inclure l'usage du français Charte québécoise des droits et libertés. (credit:PC)
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