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La technologie numérique face au cyberterrorisme, ces applications mobiles qui font peur aux émirs du net

Cela fait 20 ans que les industriels réfléchissent mais le contexte actuel de lutte anti-terrorisme devrait permettre d'accélérer la mise au point de ces outils. Des dispositifs de caméras intelligentes pourraient être mis sur le marché d'ici un à deux ans, estiment les spécialistes.
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Depuis l'avènement d'Internet, puis du web 2.0, les différents groupes terroristes ont migré vers la toile : ils ont troqué leurs cassettes VHS et leurs longs films de propagande contre des clips vidéos de quelques minutes, leurs tracts en noir et blanc contre des tweets tout en couleur ; en effet le changement d'époque et de public ont imposé un changement de moyens et de stratégies. Le monde a été pris au dépourvu par l'ampleur de cette propagande sans précédent, devenue plus féroce avec l'apparition du groupe terroriste Daech.

Depuis quelques années la Communauté internationale tente de s'organiser pour venir à bout de ce phénomène qui parasite le canal de communication le plus rapide que l'homme n'ait jamais créé : "Internet". Cette prise de conscience s'est renforcée après les derniers attentats qui ont eu lieu à Paris, contraignant les géants du web à une plus grande coopération, les autorités à mesurer l'ampleur de ce phénomène et la société civile à s'engager davantage.

Paris avait en effet organisé un Hackaton en janvier 2016, évènement passé presque inaperçu, et que je considère comme particulièrement intéressant pour avoir créé une dynamique de recherche contre le phénomène de radicalisation sur Internet. Parmi les projets qui se sont distingués, je citerais :

SOMs et Navarro Hotline : Ce projet a imaginé à quoi pourrait correspondre un service d'appel d'urgence par SMS. En un message, il serait possible de géolocaliser la personne, de l'identifier et de déterminer le type de situation d'urgence et d'envoyer les secours adaptés.

Lemon Tree, ou l'évaluation des risques, Pour soulager les plateformes d'appel, ce projet a opté pour la technologie de reconnaissances vocales, le but étant de déterminer le niveau de stress pour hiérarchiser les besoins.

Etaonis : un outil de traitement automatique des flux de données issues des réseaux sociaux, pour apporter rapidement une information pertinente et géolocalisée et ainsi permettre aux forces de l'ordre d'avoir une meilleure vision d'une situation.

Dispatch Victim est une application mobile permettant de rendre plus fluide le transport des blessés vers les différents hôpitaux en fonction de l'urgence de la situation et du taux d'occupation des établissements hospitaliers.

Nec Mergicure (Net Merge Cure) répondrait au défi de prévention de la radicalisation et de la conception et diffusion de contre-discours. La solution permettrait de rechercher les abonnés aux comptes Twitter de Daech afin de leur délivrer un discours adéquat (pédagogique, désintox, humour, détournement).

Chasseurs de rumeurs se baserait sur les réseaux sociaux pour permettre la détection de crises et de clusters d'utilisateurs pour éviter la propagation des rumeurs.

Hormis ces applications qui pourront bientôt se retrouver sur nos téléphones intelligents, d'autres moyens numériques sont mis en place à l'échelle européenne et mondiale

L'Unesco prend le train en marche

Dans son effort pour permettre aux jeunes d'en apprendre davantage sur les différentes cultures et ainsi devenir des citoyens du monde responsables, le Bureau régional de l'UNESCO à Dakar a signé en septembre 2015, un protocole d'entente avec la Fondation Touchable Earth. Cette collaboration a pour objectif de promouvoir l'éducation à la citoyenneté mondiale et prévenir la jeunesse contre la radicalisation.

Touchable Earth est une application mobile qui améliore la communication interculturelle entre les enfants et les jeunes du Monde. Le Mali a été choisi pour le lancement de cette campagne.

Quand les GAFA deviennent les géants de la prévention contre la radicalisation

Google renforce son dispositif en ligne contre la radicalisation. Le moteur de recherche a commencé à offrir des espaces publicitaires aux associations luttant contre l'endoctrinement, afin de promouvoir un contre-discours, et ce en réponse aux critiques qui lui ont été faites par le passé, notamment depuis la série d'attentats en France.

Selon le responsable des politiques publiques de Google en Europe Anthony House, les messages s'affichent en haut de la page de recherche, comme les publicités, lors d'une recherche sur des termes et des expressions identifiées comme étant sensibles. Par exemple, "rejoindre Daech". Il n'y a en revanche pas de modification de l'ordre des résultats.

Ce programme pilote s'inscrit dans le cadre de Google AdWords Grands, le service qui octroie de l'argent aux organisations caritatives, afin de promouvoir leur mission et de les aider à recruter des volontaires. Dans le cas de la lutte contre la radicalisation en ligne, Google propose près de 10.000 dollars par mois de publicités gratuites aux ONG, pour leur permettre de diffuser leurs messages. Le projet est encore à ses balbutiements.

YouTube est aussi concerné

Google a essuyé, avec les autres grandes plateformes Internet, des critiques incessantes à propos de son rôle supposé dans la radicalisation en ligne.

Google admet ne pas réussir à filtrer les flux, notamment sur YouTube, où près de 300 heures de vidéos sont mises en lignes chaque minute. Selon Anthony House plus de 14 millions de vidéos ont été retirées de son service, pour avoir été en contradiction avec sa charte d'utilisation et certaines pour apologie du terrorisme. Les utilisateurs participent eux aussi aux retraits des vidéos au "contenu inapproprié". Pour faire barrage aux différentes critiques, Google serait en train de créer des vidéos anti-radicalisation qui seraient mises en ligne sur YouTube.

La lutte contre la propagande concerne aussi d'autres acteurs du Web, dont Twitter et Facebook. Twitter disposerait d'une équipe de 100 personnes, dont le but est de retirer de la plateforme les contenus violents, extrémistes et inappropriés. Cette année Twitter a annoncé la fermeture de plus de 125 000 comptes liés à des activités terroristes.

Pendant ce temps-là, WhatsApp fait cavalier seul

Le service de messagerie WhatsApp a décidé de chiffrer "de bout en bout" les envois sur sa plateforme : mesure qui a pour but de protéger davantage les données de ses utilisateurs.

Plus concrètement, et expliqué par le service sur son blogue officiel : "quand vous envoyez un message, la seule personne qui peut le lire est la personne ou le groupe à qui vous envoyez ce message. Personne (d'autre) ne peut rentrer dans ce message. Pas les cybercriminels. Pas les pirates. Pas les régimes oppressifs."

Bientôt Big Brother sera mis à contribution

Les récentes attaques terroristes dans le métro de Bruxelles ont relancé l'idée d'un logiciel intelligent pour détecter les comportements suspects. DéGIV (Détection et Gestion d'Incidents dans un Véhicule ferroviaire)

En effet les chercheurs travaillent sur la mise au point de logiciels intelligents. En juin 2015, un dispositif a été testé sur la ligne 14 du métro parisien. Un boitier audio et vidéo baptisé DéGIV a été utilisé. Ce boitier analyse en temps réel les comportements inhabituels, mais pour l'instant, il s'agit plutôt d'actes de vandalisme et d'agressions plutôt que d'actes terroristes. Difficile pour les chercheurs de travailler sur ce sujet : un comportement suspect dans une foule reste compliqué à déterminer.

Cela fait 20 ans que les industriels réfléchissent, mais le contexte actuel de lutte anti-terrorisme devrait permettre d'accélérer la mise au point de ces outils. Des dispositifs de caméras intelligentes pourraient être mis sur le marché d'ici un à deux ans, estiment les spécialistes.

En somme, la recherche dans des projets d'intelligence artificielle ne fait que commencer et pose déjà des questions d'ordre déontologique, éthique et philosophique concernant le respect de la vie privée des citoyens : une affaire de curseur et d'efficacité, car en effet deux questions se posent actuellement : À quel point ces projets seront efficaces pour prévenir et empêcher que des attentats se produisent ? Et jusqu'où les citoyens sont-ils prêts à sacrifier leur liberté contre "un peu" de sécurité ?

Ce billet de blogue a été initialement publié sur le HuffPost France

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10 propositions radicales contre le terrorisme
Contrôler Internet et les réseaux sociaux(01 of10)
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Le premier ministre Manuel Valls a demandé à son ministre de l'Intérieur des propositions d'ici 8 jours pour accentuer la surveillance et la répression des comportements haineux sur Internet et les réseaux sociaux. La loi Cazeneuve, votée en novembre dernier, prévoit pourtant déjà le blocage administratif de sites faisant "l'apologie du terrorisme".Si l'on ignore encore le contenu des propositions du ministre, l'Asic, principale association française des acteurs du web incluant Google ou Dailymotion, a fait part de son inquiétude en demandant au gouvernement de "respecter l'ensemble des libertés". A suivre. (credit:Shutterstock / Juergen Faelchle)
Rétablir la peine de mort(02 of10)
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L'idée est défendue depuis son abolition par le Front national. Dans la foulée de l'attentat visant Charlie Hebdo, sa présidente Marine Le Pen a répété que, une fois élue présidente de la République, elle proposerait le retour de la peine capitale par référendum. "Je pense que la peine de mort doit exister dans notre arsenal juridique, à charge évidemment pour les jurés, pour les crimes les plus odieux, de pouvoir faire ce choix", expliquait-elle. (credit:AFP)
Interdire le retour de jihadistes en France(03 of10)
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La législation actuelle prévoit déjà la possibilité de déchoir de leur nationalité française les terroristes binationaux. Le secrétaire général de l'UMP, Laurent Wauquiez préconise d'aller plus loin encore en interdisant le retour en France des nationaux partis faire le jihad à l'étranger.Problème: une telle décision reviendrait à faire de ces Français des apatrides, au mépris des conventions internationales signées par la France. Laurent Wauquiez n'exclut pas de rompre avec ces textes (dont la Convention de Genève), mais l'UMP se cantonne à plaider en faveur d'une interdiction de territoire visant uniquement les binationaux et les étrangers. (credit:remiforall/Flickr)
Instaurer l'Etat d'urgence(04 of10)
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L'idée, un temps envisagée par des députés de la majorité, est défendue avec force par le président du parti souverainiste Debout la République, Nicolas Dupont-Aignan. "Cela n’a rien d’extravagant et a déjà existé par le passé, par exemple en 2005 (lors des émeutes de banlieue). L'état d'urgence permettrait de simplifier considérablement les procédures juridiques et renforcerait d'autant l'efficacité des forces de l'ordre", plaide l'ancien candidat à la présidentielle.L'état d'urgence confère des pouvoirs exceptionnels à l'Etat: instauration de couvre-feu, mesures discrétionnaires d'interdictions de séjour, possibilité d'ordonner des perquisitions et de prendre "toute mesure pour assurer le contrôle de la presse et de la radio". (credit:AFP)
Envoyer l'armée en banlieue(05 of10)
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La banlieue, repère du terrorisme? Certains responsables politiques n'excluent pas d'envoyer l'armée dans les quartiers les plus sensibles pour, notamment, lutter contre le trafic d'armes de guerre. Une idée défendue de longue date à Marseille par la sénatrice socialiste Samia Ghali et aujourd'hui reprise par l'ancien ministre UMP Xavier Bertrand. (credit:AFP)
Frapper les parents(06 of10)
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Que faire des élèves qui n'ont pas respecté la minute de silence à l'école en l'honneur des victimes des attentats? Alors que l'Education nationale s'est saisie du dossier, le député UMP Eric Ciotti a fait une proposition surprenante sur Twitter ce jeudi: retirer les allocations familiales des parents des élèves concernés.Le député des Alpes-Maritimes n'a pas précisé quel sort il comptait réserver aux parents des frères Kouachi. (credit:AFP)
Créer une peine d'indignité nationale(07 of10)
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Cette proposition est avancée officiellement par l'UMP dans ses 12 mesures anti-terroristes. Objectif: frapper les terroristes français d'une peine d'indignité nationale, sanction créée par l'ordonnance du 26 août 1944 à la suite de la Seconde Guerre mondiale et qui visait les Collaborateur du régime de Vichy.Cette peine entraîne la perte du droit de vote et de tous les droits civiques, l'interdiction de travailler dans la fonction publique, l'armée, ou la presse. (credit:AFP)
Sortir ou suspendre l'espace Schengen(08 of10)
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Cette proposition visant la libre circulation en Europe est défendue par l'UMP, Debout la République et le Front national à des degrés divers. L'UMP de NIcolas SArkozy préconise plus sobrement une réforme des traités Schengen "pour améliorer les contrôles aux frontières et les échanges d’information".Nicolas Dupont-Aignan préconise de rétablir temporairement les contrôles aux frontières tandis que le Front national prône depuis longtemps le rétablissement permanent des frontières françaises. Objectif: empêcher le retour ou l'arrivée de terroristes.Pour rappel, les trois auteurs des attaques de la semaine dernière étaient Français et en règle sur le territoire national. (credit:Eisbäärchen/Flickr)
Créer des centres de détention spéciaux(09 of10)
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Pour éviter les phénomènes d'endoctrinement en prison, le gouvernement socialiste a déjà ordonné la généralisation de l'isolement des détenus fanatisés dans les centres pénitentiaires avant la fin de l'année. La ministre de la Justice Christiane Taubira veut elle lancer un programme de déradicalisation dans les prisons existantes.L'UMP préconise d'aller plus loin encore en créant des centres de détention spéciaux consacrés à la déradicalisation des terroristes djihadistes condamnés. Ceux-ci seraient alors totalement isolés des autres détenus, contrairement au dispositif actuel où ils continuent de partager des activités scolaires et sportives avec le reste de la population carcérale. L'idée de centres dédiés, défendue notamment par le député UMP Eric Ciotti, nécessiterait d'importants investissements et de sérieuses discussions avec les villes qui les accueilleront. (credit:AFP)
BONUS: rétablir l'uniforme à l'école (publique et privée)(10 of10)
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L'idée émane du Front national mais est également proposée par le député UMP Bernard Debré. Alors que des incidents ont émaillé par endroit les minutes de silence en l'honneur des victimes de Charlie Hebdo, Marine Le Pen préconise de rétablir l'autorité en milieu scolaire en imposant le port de l'uniforme partout. (credit:dok1/Flickr)

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