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Notre opposition au projet de loi 14, une question de principe

Le projet de loi 14 n'aurait que peu, ou pas, d'impact positif sur l'avenir du français. Au contraire, il contribuerait, s'il est adopté, à élever des barrières entre nous. Il donnerait l'image d'un gouvernement craintif, faible, n'hésitant pas à mettre les libertés en danger pour arriver à ses fins. Nous proposons à l'inverse la voie de la confiance et de la fierté partagée.Misons plutôt sur nos forces et, par-dessus tout, sur notre désir de vivre et de réussir ensemble.
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Ce blogue est cosigné par Philippe Couillard, chef du PLQ, et Marc Tanguay, député de LaFontaine et porte-parole de l'opposition officielle pour la Charte de la langue française.

Tous les Québécois profondément attachés au français, notre langue commune, souhaitent le voir continuer à s'épanouir sur ce coin d'Amérique que nous occupons depuis plus de 400 ans. Plusieurs lois successives, jusqu'à la Charte de la langue française, ont maintenu le délicat équilibre entre les droits individuels et collectifs. Ces actions ont produit des effets considérables et mesurables: nous avons réussi à faire du français le symbole et la réalité d'une nation prospère, moderne, confiante et ouverte sur le monde.

Le Parti libéral du Québec a, de tout temps, été un acteur de premier plan quant à l'épanouissement du français. Dès 1961, le gouvernement libéral de Jean Lesage créa l'Office de la langue française. En 1974, avec le projet de loi 22, Robert Bourassa fit du français la langue officielle du Québec, tout en jetant les bases de ce qui sera, par la suite, les principaux chapitres de l'actuelle Charte de la langue française. En 1993, toujours dans l'optique d'obtenir un équilibre, Robert Bourassa fit adopter le projet de loi 86 qui consacra la nette prédominance du français dans l'affichage public et la publicité commerciale. C'est cette recherche d'un équilibre entre l'objectif collectif et le respect des libertés individuelles que nous devons toujours poursuivre.

Ce précieux équilibre est aujourd'hui menacé par la lettre et l'esprit du projet de loi 14. Fidèle à son habitude, le gouvernement du Parti québécois brandit la menace du complot, de l'humiliation, plutôt que de renforcer l'affirmation de notre confiance. Près d'un million de Québécois parlent la langue anglaise dans leur vie quotidienne. Ce ne sont pas des étrangers, mais des Québécois à part entière, dont la très grande majorité utilise le français dans l'espace public. Leurs enfants sont le plus souvent bilingues (sinon trilingues), alors que beaucoup de nos jeunes francophones se voient privés des outils qui leur permettraient de le devenir. Il en est ainsi de cette intention du PQ de prioriser les étudiants appartenant à «la clientèle de langue anglaise» au détriment des francophones, lors des inscriptions aux collèges anglophones. Redisons-le sans crainte: le bilinguisme n'est pas une menace, mais un atout essentiel auquel tous les jeunes Québécois doivent avoir accès.

Le projet de loi 14 va malheureusement plus loin, comme l'a souligné le Barreau du Québec. Le bâtonnier du Québec, Me Nicolas Plourde, a affirmé que «certaines mesures proposées par le projet de loi 14 risquent d'affecter démesurément les communautés anglophones et allophones.» Le Barreau estime que l'approche qu'emprunte ce projet de loi quant aux modifications à la Charte des droits et libertés de la personne «serait contraire à l'esprit du préambule et de la Charte dans son ensemble». Par ailleurs, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse soulève des inquiétudes quant à l'ajout d'un considérant au préambule de la Charte des droits. La Commission s'interroge «sur l'interrelation entre ce nouveau droit et l'interdiction d'exercer de la discrimination fondée sur la langue» et craint que cela puisse «modifier l'interprétation des droits protégés dans la Charte, ce qui ne serait pas sans conséquences juridiques». Cette approche inutilement coercitive et judiciarisée comme des mesures irritantes - telle la révision du statut bilingue des municipalités - alimentent l'inquiétude de plusieurs de nos concitoyen(ne)s. Plusieurs ont également souligné l'augmentation très substantielle de la paperasse et de la lourdeur administrative que le projet de loi ferait peser sur nos PME comptant de 26 à 49 employés.

Pour leur part, les militants et parlementaires libéraux donneront plutôt l'exemple de mesures visant à valoriser notre langue et à en promouvoir l'usage dans l'espace public et les milieux de travail. De nombreuses pistes s'offrent à nous. Par exemple, nous devrions faire profiter nos entreprises d'un accompagnement par des agents de francisation agissant au sein de nos chambres de commerce locales. Nous devrions intensifier l'effort collectif pour assister à la francisation de logiciels. Nous devrions d'ailleurs interpeller la Francophonie mondiale à ce sujet. Nous avons déjà beaucoup fait pour assurer la francisation des nouveaux arrivants et les statistiques l'attestent, mais nous devrions ajouter des ressources et des moyens dans nos écoles et nos organismes communautaires d'accueil pour aller encore plus loin. Voilà donc les choix qui s'offrent à nous : une approche autoritaire inutilement agressante ou la promotion d'une citoyenneté basée sur un objectif commun à toutes et à tous, celui de la réussite d'une société francophone prospère, moderne et inclusive.

Ce projet de loi 14 n'aurait que peu ou pas d'impact positif sur l'avenir du français. Au contraire, il contribuerait, si adopté, à élever des barrières entre nous. Il donnerait l'image d'un gouvernement craintif, faible, n'hésitant pas à mettre les libertés en danger pour arriver à ses fins. Nous proposons à l'inverse la voie de la confiance et de la fierté partagée.

Misons plutôt sur nos forces et, par-dessus tout, sur notre désir de vivre et de réussir ensemble.

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La Loi 101 au Québec
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Camille Laurin lors de son entrée à l'Assemblée nationale, le 27 avril 1977, jour où il déposa son projet de loi sur la langue française. (credit:PC)
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Un vétéran de la Seconde guerre mondiale proteste contre la Loi 101. (credit:PC)
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Camille Laurin appose un badge YES sur le veston de René Lévesque, lors de la campagne du référendum sur l'indépendance du Québec en février 1980. (credit:PC)
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Camille Laurin s'adresse au caucus du PQ lors du 20ème anniversaire de la Loi 101, célébré le 26 août 1997. (credit:PC)
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Un restaurateur montréalais montre les sous-bock en anglais qui lui ont valu, en mars 2000) d'être réprimandé par les inspecteurs de l'Office de la langue française. (credit:PC)
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Gilles Duceppe, Louise Harel et Pauline Marois en tête de la manifestation montréalaise organisée le 26 août 2007, pour les 30 ans de la Loi 101. (credit:PC)
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Des partisans de la Loi 101 manifestent pour la défense de la Charte de la langue française, le 26 août 2007 à Montréal. (credit:PC)
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Un défenseur du Québec francophone, lors de la manifestatiom organisée pour les 30 ans de la Loi 101. (credit:PC)
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Le premier ministre Jean Charest, le 3 juin 2010, lors d'un débat houleux à l'Assemblée nationale portant sur une décision de la Cour supérieure qui a autorisé les enfants de neuf familles à fréquenter une école anglophone. (credit:PC)
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Pauline Marois, le 3 juin 2010, lors d'un débat houleux à l'Assemblée nationale portant sur une décision de la Cour supérieure qui a autorisé les enfants de neuf familles à fréquenter une école anglophone. (credit:PC)
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L'édifice de l'Office québécois de la langue française, à Montréal, porte le nom du père de la Loi 101. (credit:PC)
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Le député indépendant, et ex-péquiste, Pierre Curzi présente, le 27 mai 2012, un projet de loi visant à modifier la Charte de langue française qui élargirait la portée de ses dispositions. (credit:PC)
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La ministre responsable de la Charte de la langue française, Diane De Courcy, a présenté le 5 décembre 2012 un projet de loi visant à modifier la Loi 101, et notamment à inclure l'usage du français Charte québécoise des droits et libertés. (credit:PC)
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